Maurice Bernard devant le P5

Connaître l’Histoire pour éclairer l’action

Dossier : X-Histoire et archéologie - La légende des sièclesMagazine N°630 Décembre 2007
Par Maurice BERNARD (48)

Qui ne connaît Mau­rice Ber­nard, qui fut direc­teur du Centre natio­nal d’é­tudes des télé­com­mu­ni­ca­tions, direc­teur de l’en­sei­gne­ment et de la recherche de l’É­cole poly­tech­nique, ou encore du Labo­ra­toire des musées de France ? On sait moins qu’il pré­side depuis plus de dix ans le groupe « X‑Histoire et Archéo­lo­gie ». Au-delà de l’ap­pli­ca­tion des sciences et des tech­niques au ser­vice de l’His­toire de l’art et des civi­li­sa­tions, c’est à une vision du pas­sé néces­saire pour peser sur l’a­ve­nir qu’il invite chaque tri­mestre quelques dizaines de membres assidus.

Un patrio­tisme régional
Mau­rice Ber­nard com­pare volon­tiers le pôle micro­élec­tro­nique de Gre­noble aux plus grandes réus­sites américaines.
« Les Gre­no­blois, ce sont des tigres. Ils se mor­dillent entre eux, mais se battent côte à côte pour chas­ser les crédits.
Ce genre d’état d’esprit est indispensable.
Sans doute est-il né d’une sorte de patrio­tisme régio­nal héri­té des pion­niers de la houille blanche. »

« La mémoire est indis­pen­sable à tout savoir-faire. Les Grecs l’a­vaient si bien com­pris qu’ils avaient fait de Mné­mo­syne la mère de toutes les muses et pas seule­ment de Clio, la muse de l’His­toire » se plaît à rap­pe­ler Mau­rice Ber­nard. De mémoire, il n’en manque pas. De ses débuts comme jeune ingé­nieur des télé­coms au CNET, il retient la nais­sance de « ce qui fut ma pas­sion pro­fes­sion­nelle, la phy­sique ». Jouis­sant d’une grande liber­té, de cré­dits sub­stan­tiels, il eut la chance de pou­voir atti­rer et for­mer de brillants cher­cheurs. Pen­dant que d’autres au CNET réus­sis­saient le pari incroyable de la com­mu­ta­tion numé­rique, à laquelle même les Amé­ri­cains ne croyaient pas », son équipe par­ti­ci­pait au déve­lop­pe­ment pro­di­gieux de la phy­sique des solides et des tech­no­lo­gies micro­élec­tro­niques et optiques.

Évaluer la recherche

« Je suis res­té vingt ans, mes moyens s’ac­crois­saient, mon labo­ra­toire deve­nait connu, j’en­sei­gnais à l’É­cole poly­tech­nique. Bref, j’é­tais pro­ba­ble­ment en train de deve­nir un man­da­rin. Mais, fin 1974, je suis ten­té par d’autres sirènes. Gérard Thé­ry (X 52), nou­veau tsar du télé­phone fran­çais, et son flam­boyant adjoint Jean-Pierre Sou­vi­ron (X 57) me demandent de mon­ter une cel­lule d’é­va­lua­tion de la recherche et déve­lop­pe­ment de France Télé­com. » Suivent plu­sieurs années « fabu­leuses » avec le rat­tra­page du retard fran­çais en matière du télé­phone, « le lan­ce­ment du Mini­tel, le début des fibres optiques, l’ex­plo­sion de la micro­élec­tro­nique, en par­ti­cu­lier à Grenoble ».

Deve­nu direc­teur du CNET en 1978, Mau­rice Ber­nard le res­te­ra trois ans, avant que les cir­cons­tances poli­tiques ne le ren­voient au ten­nis et au sport.

On le retrouve un peu plus tard comme direc­teur de l’en­sei­gne­ment et de la recherche de l’É­cole poly­tech­nique, « un poste dif­fi­cile, aux côtés d’un pré­sident d’é­ta­blis­se­ment public et d’un direc­teur géné­ral mili­taire ». Il se sou­vient des réformes labo­rieu­se­ment écha­fau­dées, comme l’in­tro­duc­tion des majeures et des mineures, la bio­lo­gie en tronc com­mun, la thèse de l’É­cole poly­tech­nique, le pre­mier dépar­te­ment ensei­gne­ment recherche (chi­mie), la créa­tion de la SABIX (1985), de la Fon­da­tion (1986), du Col­lège de poly­tech­nique, etc.

X‑HISTOIRE ET ARCHÉOLOGIE

Pré­sident : Mau­rice Bernard
tél. : 06.83.69.45.65

Secré­taire : Jac­que­line Pottier
tél. : 01.42.50.65.57

Une struc­ture très légère
Le groupe X‑Histoire et Archéo­lo­gie s’est asso­cié au GPX (groupe pari­sien des X) pour sa gestion.
Les réunions se tiennent à la Mai­son des X. Le pro­gramme est dif­fu­sé dans La Jaune et la Rouge et dans le bul­le­tin du GPX.
À la modeste coti­sa­tion annuelle s’ajoute le prix du dîner qui suit les confé­rences, le confé­ren­cier étant invi­té par le groupe X‑Histoire et Archéologie.
.Mau­rice Ber­nard (X 48), ingé­nieur géné­ral des télé­com­mu­ni­ca­tions, ancien direc­teur du CNET, ama­teur à ses heures de bridge et de ten­nis, s’est tou­jours pas­sion­né pour la science. Maître de confé­rences dès l’âge de 28 ans à l’École poly­tech­nique, dont il fut plus tard direc­teur de l’enseignement et de la recherche, il consacre encore aujourd’hui beau­coup de son temps aux rap­ports entre la recherche et la socié­té et pré­side le Comi­té édi­to­rial de La Jaune et la Rouge.

La science au musée

Il devient ensuite, pour ses der­nières années de car­rière, direc­teur du Labo­ra­toire du Louvre (deve­nu depuis le Labo­ra­toire de recherche des musées de France).

C’est sans doute là, char­gé de mettre au point un accé­lé­ra­teur de par­ti­cules pour l’a­na­lyse des œuvres d’art, qu’il se convainc que « l’his­toire et l’ar­chéo­lo­gie s’ap­puient de plus en plus sur les apports métho­do­lo­giques et ins­tru­men­taux de la Science. »

D’Hannibal à Churchill

C’est donc sous le double patro­nage de l’His­toire et de la Méthode scien­ti­fique que Mau­rice Ber­nard accepte en 1995 la pré­si­dence du groupe X‑Histoire et Archéo­lo­gie, fon­dé dans les années cin­quante. S’a­joute l’i­dée « qu’une vision his­to­rique de notre pas­sé est tou­jours néces­saire pour éclai­rer l’ac­tion et nous per­mettre de peser sur l’avenir. »

Depuis, une cin­quan­taine d’a­ma­teurs par­ti­cipent régu­liè­re­ment à des confé­rences sui­vies d’un dîner.

Ces der­niers mois ont per­mis, par exemple, de s’in­ter­ro­ger sur la per­son­na­li­té de Chur­chill, sur l’en­jeu poli­tique de l’é­vo­lu­tion du décor de la place de la Concorde, de retra­cer mille ans d’his­toire mili­taire ou de suivre en Gaule les élé­phants d’Hannibal.

« Les confé­ren­ciers, le plus sou­vent des pro­fes­sion­nels recon­nus, inter­viennent à titre bénévole. »

Mais il lui arrive aus­si de faire appel à des ingé­nieurs, sou­vent des anciens élèves, « qui se découvrent une deuxième com­pé­tence en par­tant à la retraite et n’hé­sitent pas à pré­pa­rer une thèse, écrire des livres, ou encore s’i­ni­tier à la comp­ta­bi­li­té des Sumériens. »

Le Labo­ra­toire de recherche des musées de France
Le lan­ce­ment en 1927 de la recherche de moyens scien­ti­fiques per­met­tant d’authentifier les tableaux conduit à la créa­tion, en 1932, du Labo­ra­toire du Louvre. Diri­gé de 1990 à 1994 par Mau­rice Ber­nard, il emmé­nage dans les locaux très modernes du Grand Louvre. Il est aujourd’hui une par­tie essen­tielle du Centre de recherche et de res­tau­ra­tion des musées de France.
http://www.c2rmf.fr

Pro­pos recueillis par
Jean-Marc Cha­ba­nas (X 58)

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