Deux robots coopèrent entre eux (ONERA)

Comment faire coopérer des robots autonomes

Dossier : Les dronesMagazine N°718 Octobre 2016
Par Patrick BECHON
Par Magali BARBIER
Par Charles LESIRE

Un drone est un sys­tème auto­nome s’il maî­trise trois fonctions : 

 le diag­nos­tic de son bon état de fonctionnement
 la maî­trise de sa navi­ga­tion autonome
 la maî­trise de sa mis­sion autonome 

On peut envi­sa­ger ensuite de faire tra­vailler simul­ta­né­ment plu­sieurs appa­reils s’ls savent com­mu­ni­quer entre eux. 

Pour qu’un drone soit un sys­tème auto­nome, il doit maî­tri­ser trois aspects. 

  • Le pre­mier aspect est la maî­trise de son fonc­tion­ne­ment interne, de son état. Ain­si, le véhi­cule doit être capable de diag­nos­ti­quer les pannes de ses propres com­po­sants et de déter­mi­ner s’il peut encore appli­quer cor­rec­te­ment les consignes qu’il reçoit. 
  • Le deuxième aspect est la maî­trise de la navi­ga­tion auto­nome, c’est-à-dire des dépla­ce­ments du véhi­cule dans son envi­ron­ne­ment. Par exemple, la capa­ci­té pour le véhi­cule de pou­voir rejoindre un point de pas­sage en tenant compte des obs­tacles comme des bâti­ments et de l’absence pos­sible de don­nées GPS mas­quées par ces bâtiments. 
  • Quand cette navi­ga­tion est maî­tri­sée, on peut deman­der au véhi­cule de réa­li­ser une mis­sion par lui-même, par exemple pour la pla­ni­fi­ca­tion d’une patrouille pour sur­veiller une zone. Ce troi­sième aspect est la maî­trise de la mis­sion autonome. 

Quand les com­mu­ni­ca­tions le per­mettent, cer­taines fonc­tion­na­li­tés peuvent être dépor­tées dans un centre d’opérations.

REPÈRES

Les capacités individuelles des drones progressent rapidement. Néanmoins, pour pouvoir leur confier des missions plus complexes dans un environnement contraint où les communications peuvent être difficiles et où la téléopération par un pilote n’est pas envisageable dans de bonnes conditions, la coopération entre robots hétérogènes offrant des capacités complémentaires est nécessaire. Cette coopération demande davantage d’autonomie dans l’équipe de robots.

EXPLOITER LES COMPLÉMENTARITÉS ENTRE ROBOTS

Au niveau « mul­ti­drone », une mis­sion de sur­veillance par exemple peut exploi­ter les drones aériens pour la sur­veillance de larges zones, tan­dis que des robots ter­restres sont char­gés d’explorer les bâti­ments et les zones cou­vertes par la végétation. 

“ La coopération entre drones aériens et sous-marins permet de rechercher plus efficacement une épave ”

Une coopé­ra­tion entre drones aériens et sous-marins per­met de recher­cher plus effi­ca­ce­ment une épave de bateau relâ­chant le conte­nu de son réser­voir en mer. 

Les drones aériens peuvent ain­si détec­ter des éma­na­tions d’hydrocarbures en sur­veillant une large zone pour gui­der plus pré­ci­sé­ment les drones sous-marins vers l’épave échouée. Ces mis­sions tirent par­ti de la com­plé­men­ta­ri­té entre les dif­fé­rents robots, qui per­met aus­si de résis­ter à la perte d’un robot. 

Mais elles intro­duisent aus­si de nou­velles contraintes, notam­ment liées à la com­mu­ni­ca­tion néces­saire pour un tra­vail d’équipe.

DES CHAMPS DE RECHERCHE ÉTENDUS

SYSTÈME AUTONOME

Un système autonome est défini par sa capacité à réaliser une mission, seul ou en équipe, avec des contacts limités avec les opérateurs présents dans le centre d’opérations. Les opérateurs peuvent être amenés à prendre certaines décisions.

Ces mis­sions font l’objet de nom­breuses recherches, comme c’est le cas à l’ONERA, sur les fonc­tions d’autonomie indi­vi­duelle (navi­ga­tion en envi­ron­ne­ment sans GPS, recon­fi­gu­ra­tion suite à une panne), de fusion des don­nées (inté­gra­tion des don­nées en pro­ve­nance des dif­fé­rents cap­teurs), de pla­ni­fi­ca­tion (cal­cul de plans d’action pour l’équipe hors ligne avant le début de la mis­sion et en ligne pen­dant la mis­sion lorsqu’un évé­ne­ment per­tur­ba­teur empêche sa réa­li­sa­tion) et de super­vi­sion (contrôle en ligne de l’exécution cor­recte des actions du plan et ges­tion de la réac­tion aux évé­ne­ments perturbateurs). 


Une archi­tec­ture logi­cielle mul­ti­drone per­met de faire coopé­rer plu­sieurs véhi­cules auto­nomes pour la réa­li­sa­tion de leur mission.

UN PROGRAMME MULTIDRONE

L’objectif du programme d’études amont Action (2007−2015) est de développer et d’implémenter sur des véhicules hétérogènes autonomes une architecture logicielle multidrone permettant de les faire coopérer pour la réalisation de leur mission. Des démonstrations impliquant jusqu’à huit robots réels et quatre robots simulés pour faire de la surveillance de zone ont été réalisées. Ce programme, financé par la DGA, a été réalisé par l’ONERA et par le CNRS-LAAS.

COMMUNICATIONS NON GARANTIES

Pour être capables de coopé­rer, les robots doivent pou­voir com­mu­ni­quer ensemble. Dans des envi­ron­ne­ments éten­dus ou sur­char­gés, ces com­mu­ni­ca­tions ne sont pas garan­ties. L’équipe doit donc pou­voir gérer ces com­mu­ni­ca­tions incertaines. 

Cer­taines des approches pro­po­sées veulent main­te­nir la com­mu­ni­ca­tion en per­ma­nence entre tous ses membres. 

Cer­tains robots sont alors char­gés de ser­vir de relais de com­mu­ni­ca­tion pour per­mettre aux autres de se concen­trer sur la mis­sion à accomplir. 

Cela per­met par exemple d’assurer la dif­fu­sion d’un flux vidéo depuis un robot très éloi­gné du centre de super­vi­sion même en l’absence de com­mu­ni­ca­tion directe (par exemple le pro­jet Anchors). 

PLUS D’AUTONOMIE

Une autre approche consiste à pour­suivre la mis­sion même en l’absence de com­mu­ni­ca­tion. Cela néces­site une auto­no­mie plus impor­tante de la part de chaque robot, qui peut se retrou­ver iso­lé du reste de l’équipe tout en devant conti­nuer d’assurer la mis­sion (par exemple le pro­jet Action). 

C’est aus­si le cas des mis­sions sous-marines où les com­mu­ni­ca­tions entre les robots sont limi­tées par le sup­port acous­tique (par exemple le pro­jet Swarms). 

“ Donner à l’équipe la capacité de décider en ligne des réactions aux changements ”

Un autre chal­lenge en robo­tique auto­nome concerne l’autonomie sur le long terme. Cela implique, pour un robot, d’être capable de se rechar­ger auto­ma­ti­que­ment pour réa­li­ser des mis­sions allant au-delà de son auto­no­mie énergétique. 

Cela signi­fie aus­si être capable de recon­naître des chan­ge­ments qui trans­forment l’environnement et changent ce que les cap­teurs per­çoivent du même envi­ron­ne­ment : le pas­sage jour-nuit, le brouillard, la tom­bée de la neige, la chute des feuilles en automne, etc. 

Au niveau des capa­ci­tés de l’équipe, il devient néces­saire de ne plus tout pré­voir dès le début de mis­sion mais de savoir mettre le plan à jour régulièrement. 

NOUVELLES PERSPECTIVES

La coopé­ra­tion entre drones hété­ro­gènes per­met non seule­ment de tirer avan­tage des capa­ci­tés intrin­sèques de chaque robot, mais aus­si d’implémenter des stra­té­gies qui aug­mentent leurs capa­ci­tés cumu­lées. Il devient alors pos­sible de réa­li­ser des mis­sions com­plexes qu’un seul robot ne pour­rait mener à bien. 

Les recherches doivent se pour­suivre pour amé­lio­rer cette coopé­ra­tion qu’on ne trouve qu’en labo­ra­toire ; par exemple, le pro­jet Action a per­mis de tes­ter les déve­lop­pe­ments scien­ti­fiques dans un envi­ron­ne­ment repré­sen­ta­tif. Les nom­breuses thèses sur le sujet montrent l’intérêt de cette autonomie. 

Dans ces recherches, le pre­mier défi est d’embarquer sur les drones des capa­ci­tés de mis­sion auto­nome leur per­met­tant de s’entraider pour la réa­li­sa­tion de la mission. 

Dans un contexte réel, des évé­ne­ments vont régu­liè­re­ment per­tur­ber le dérou­le­ment de la mis­sion. Le deuxième défi est alors de don­ner à l’équipe la capa­ci­té de déci­der en ligne des réac­tions à ces changements. 

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