Cognac : le temps du renouveau

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°589 Novembre 2003Rédacteur : Laurens DELPECH

Avant l’effondrement des mar­chés asia­tiques, la plu­part des mai­sons de cognac avaient délais­sé le mar­ché fran­çais, peu rému­né­ra­teur, pour se consa­crer à l’exportation, qui a par­fois repré­sen­té ces der­nières années plus de 95 % de la pro­duc­tion totale. Aujourd’hui, le relais de l’Asie a été sur­tout pris par le mar­ché amé­ri­cain, qui bat des records, mais la France semble se récon­ci­lier avec le cognac, dont la consom­ma­tion aug­mente à nou­veau dans l’Hexagone…

Les mai­sons de cognac ont su atti­rer de nou­veaux consom­ma­teurs en leur pro­po­sant des eaux-de-vie jeunes des­ti­nées à être consom­mées en long drinks, allon­gées de jus de fruits ou d’eau gazeuse ou qui servent de base à des cock­tails. Mais sur­tout, le renou­veau se fait sur le thème de la légi­ti­mi­té du rai­sin. Le cognac est en effet le pro­duit de vins blancs issus du ter­roir des Cha­rentes et dis­til­lés deux fois dans le fameux alam­bic cha­ren­tais, il évoque donc spon­ta­né­ment le raf­fi­ne­ment des ter­roirs et des mil­lé­simes, sur­tout dans un pays comme la France, qui pos­sède les plus grands crus du monde.

La plus grande par­tie de la pro­duc­tion de cognacs est dis­til­lée et assem­blée par de grandes mai­sons de négoce. Par­mi les plus grandes marques, Rémy Mar­tin a tou­jours su pré­ser­ver une solide tra­di­tion de qua­li­té. Ses eaux-de-vie pro­viennent toutes des deux meilleures régions de pro­duc­tion : la Grande Cham­pagne et la Petite Cham­pagne. Le VSOP, recon­nais­sable à sa fameuse bou­teille sati­née, est un des meilleurs cognacs de sa caté­go­rie, mais il faut aus­si décou­vrir les cuvées haut de gamme et notam­ment le Rémy Mar­tin Extra, un assem­blage de très belles eaux-de- vie aux sub­tiles saveurs de jas­min, de boîtes à cigares et de feuilles de thé séchées. Son charme et sa sub­ti­li­té en font un excellent choix pour conclure un repas de chasse à base de gibiers à plumes.

Si la répu­ta­tion d’un châ­teau dans le Bor­de­lais ou d’un domaine de Bour­gogne dépend sur­tout du ter­roir sur lequel est situé son vignoble, à Cognac, celle d’un négo­ciant dépend lar­ge­ment de la qua­li­té de ses “ coupes ” ou assem­blage des eaux-de-vie qui vont faire un cognac. De ce point de vue Dela­main, qui s’approvisionne uni­que­ment en Grande Cham­pagne, pos­sède plei­ne­ment l’art sub­til de la coupe, qui repose sur le savoir-faire mais aus­si – et sur­tout – sur l’importance et la qua­li­té des stocks dont dis­pose l’assembleur. Ce génie de l’assemblage se révèle dans le “ Pale and Dry XO ”, un cognac élé­gant et racé, qui se dis­tingue par des arômes d’agrumes confits (citron, pam­ple­mousse), rele­vé de déli­cates notes flo­rales et épi­cées. En bouche, il est très onc­tueux. La mai­son Dela­main se carac­té­rise par son art de l’assemblage, mais c’est aus­si une des rares mai­sons à pro­po­ser des cognacs mil­lé­si­més. Faute de contrôle, l’Interprofession du cognac s’était inter­dit de vendre des cognacs mil­lé­si­més en 1963. À cette époque, Dela­main avait créé un chai spé­cial, étroi­te­ment contrô­lé par la répres­sion des fraudes, puis par le Bureau natio­nal du Cognac. En 1989, la légis­la­tion a chan­gé, et il est de nou­veau pos­sible de com­mer­cia­li­ser des cognacs millésimés.

Les ama­teurs de cigares appré­cie­ront aus­si les excel­lents cognacs Davi­doff, qui sont dignes de la sobre devise de Zino Davi­doff : “ Dans la vie, un homme doit savoir se conten­ter du meilleur. ” De fait, le Davi­doff Clas­sic est consti­tué d’une qua­ran­taine d’eaux-de-vie, dont les plus âgées ont une ving­taine d’années. Cette eau-de-vie est puis­sante et raf­fi­née, très ronde en bouche, avec de belles saveurs de miel et de vanille et une bonne per­sis­tance en fin de dégus­ta­tion. La fran­chise de ce cognac aux notes épi­cées et sa puis­sance aro­ma­tique en feront une très belle conclu­sion pour un repas consa­cré à des gibiers à poils mari­nés et ser­vis avec des sauces, comme le san­glier, par exemple.

Pour ceux qui appré­cient plu­tôt le cognac sur le registre de la finesse, le Cor­don bleu de Mar­tell reste une réfé­rence incon­tour­nable. Mar­tell se dis­tingue des autres marques de cognac par l’utilisation pré­pon­dé­rante de vin pro­ve­nant des Bor­de­ries, le plus petit des crus de Cognac, qui pro­duit des eaux-de-vie très flo­rales et très sub­tiles. Ce sont des cognacs très raf­fi­nés, doux, légers et fins.

On retrouve dans Cor­don bleu ces notes flo­rales et épi­cées, comme on appré­cie en bouche une ron­deur et un moel­leux excep­tion­nels. Un cognac très agréable, presque volup­tueux qui finit sur une déli­cate note de chocolat.

Sigles et Crus

Fine Champagne

Assem­blage d’eaux-de-vie issues de Petite Cham­pagne et de Grande Cham­pagne (les deux meilleures régions de pro­duc­tion), avec au moins 50 % de ce der­nier cru.

VS (Very Old) ou ***

Assem­blage d’eaux-de-vie âgées d’au moins quatre ans et demi.

VSOP (Very Superior Old Pale)

Assem­blage d’eaux-de-vie dont les plus jeunes sont âgées de quatre ans et demi à six ans et demi (en fait, les mai­sons que nous citons uti­lisent pour leur assem­blage des eaux-de-vie de plus de dix ans).

XO, Napoléon, Hors‑d’Âge

L’âge de l’eau-de-vie la plus jeune dépasse six ans et demi (en fait, il s’agit le plus sou­vent d’un assem­blage de coupes de plus de vingt ans en moyenne).

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