Anton Bruckner : Symphonie n° 5

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°693 Mars 2014Par : l'orchestre du festival de Lucerne, direction Claudio AbbadoRédacteur : Marc DARMON (83)Editeur : 1 DVD ou un Blu-Ray Accentus 10243

On a déjà par­lé ici de l’orchestre le plus fab­uleux du monde, celui qui réu­nit tous les étés à Lucerne les solistes et les chefs de pupitre les plus célèbres pour jouer des œuvres sym­phoniques lors de ce festival.

Le regret­té Clau­dio Abba­do a recréé cet orchestre, inspiré par ce qu’avait fait Toscani­ni dans les années trente : les artistes qu’il appré­cie depuis des décen­nies, chefs de pupitre de l’Orchestre phil­har­monique de Berlin ou de Vienne, d’autres solistes inter­na­tionaux tels que Sabine Mey­er, Natalia Gut­man, Wol­fram Christ, Emmanuel Pahud, Renaud Capuçon, les mem­bres des Quatuors Alban Berg et Hagen et bien d’autres, se réu­nis­sent tous les ans sous la direc­tion du maestro.

Après avoir joué et enreg­istré les œuvres de Mahler en dix ans (pro­curez-vous les Blu-Ray Euroarts, pour l’Île déserte), Abba­do a joué à l’été 2012 la Cinquième Sym­phonie de Bruck­n­er (une Sep­tième Sym­phonie avait été aus­si filmée il y a quelques années, mais à notre sens sans attein­dre la réus­site de ses Mahler ou de cette Cinquième Sym­phonie).

On sait que d’exceptionnelles cir­con­stances ne mènent pas sys­té­ma­tique­ment à un con­cert excep­tion­nel. Pour­tant, à Lucerne, chaque année le mir­a­cle se repro­duit et les con­certs aux­quels on assiste sont vrai­ment inoubliables.

Les sym­phonies de Bruck­n­er ont été com­posées entre 1865 et 1896. Les musi­ciens de cette époque, en Alle­magne comme en France, n’ont pas tous été influ­encés par Wag­n­er. Bruck­n­er, con­traire­ment à Brahms par exem­ple, a pris claire­ment le par­ti du wag­nérisme. Ce com­pos­i­teur autrichien laisse à sa mort unique­ment une dizaine de sym­phonies (seules neuf sont offi­cielle­ment numérotées, comme chez Beethoven, Schu­bert, Dvo­rak et Mahler).

Ses sym­phonies, toutes sur la même struc­ture en qua­tre mou­ve­ments (héritée de Beethoven), dévelop­pent une orches­tra­tion wag­néri­enne assez impres­sion­nante, pleine de con­trastes et de puissance.

Des œuvres mon­u­men­tales, puis­santes, struc­turées. La Cinquième Sym­phonie, com­posée en 1876, présente la par­tic­u­lar­ité d’une con­ti­nu­ité thé­ma­tique entre les qua­tre mou­ve­ments. Notam­ment, trois des mou­ve­ments sont intro­duits par des séquences de pizzi­cati très proches, sur lesquelles se déploie la mélodie.

Les ama­teurs se pro­curent tous les enreg­istrements filmés de l’Orchestre du fes­ti­val de Lucerne et d’Abaddo depuis près de dix ans jusqu’à son décès en jan­vi­er dernier. Et année après année, on recon­naît les mêmes musi­ciens, leur place­ment varie en fonc­tion de l’équilibre orches­tral que le chef choisit de faire ressentir.

Cette année, l’orchestre est par­ti­c­ulière­ment fourni, avec pas moins de dix con­tre­bass­es par exem­ple, remar­quable­ment impres­sion­nantes lorsqu’elles lan­cent la fugue du dernier mou­ve­ment, mou­ve­ment grandiose de plus de vingt-cinq minutes.

Comme chaque fois, l’image est splen­dide, et les plans dif­férents très nom­breux grâce à un nom­bre impres­sion­nant de caméras, très bien cam­ou­flées. L’interprétation ten­due et éblouis­sante d’Abbado, qui dirige par cœur, rend ce disque indispensable.

Abba­do a dirigé dans les mêmes cir­con­stances l’année suiv­ante, l’année de ses 80 ans, la Neu­vième Sym­phonie. Espérons-en vite la parution.

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