FineHeart

De nouvelles perspectives pour lutter contre l’insuffisance cardiaque sévère

Dossier : Vie des entreprisesMagazine N°783 Mars 2023
Par Arnaud MASCARELL
Par Guillaume BUC (X85)

Avec l’ICOMS® FLOWMAKER®, Fine­Heart apporte une véri­table inno­va­tion de rup­ture en matière de trai­te­ment de l’insuffisance car­diaque sévère. Arnaud Mas­ca­rell, son CEO, revient sur la créa­tion de la Med­Tech et la valeur ajou­tée du dis­po­si­tif médi­cal qu’elle déve­loppe. Expli­ca­tions.

Comment est née FineHeart ?

Ingé­nieur bio­mé­di­cal, j’ai réa­li­sé la plus grande par­tie de ma car­rière chez Med­tro­nic, un des lea­ders mon­diaux des tech­no­lo­gies implan­tables, notam­ment dans le domaine vas­cu­laire. Au cours de mon par­cours, j’ai eu la chance de tra­vailler avec des lea­ders d’opinion en car­dio­lo­gie et en ryth­mo­lo­gie, dont le doc­teur Sté­phane Guar­rigue, un des cofon­da­teurs de Fine­Heart. C’est jus­te­ment pour concré­ti­ser son concept inno­vant visant à trai­ter l’insuffisance car­diaque que la Med­Tech a vu le jour.

Quels sont les constats qui ont motivé la création de FineHeart ?

L’insuffisance car­diaque sévère est une des mala­dies chro­niques les plus graves. Elle est la 2e cause de mor­ta­li­té après toutes les formes de can­cer. Il n’existe pas de trai­te­ment effi­cace et pérenne. La mala­die pour­suit inexo­ra­ble­ment son évo­lu­tion et l’espérance de vie est en moyenne de moins de cinq ans.
C’est pour appor­ter une réponse thé­ra­peu­tique que les équipes et méde­cins cofon­da­teurs de Fine­Heart ont déve­lop­pé l’ICOMS® FLOWMAKER®. Il est, par ailleurs, impor­tant de sou­li­gner que cette équipe n’en est pas à son pre­mier coup d’essai dans l’innovation en matière d’insuffisance car­diaque. Par­mi elle, le Dr Phi­lippe Rit­ter, co-inven­teur de la thé­ra­pie de resyn­chro­ni­sa­tion car­diaque deve­nue un stan­dard pour trai­ter l’insuffisance car­diaque qui se tra­duit par l’incapacité du cœur, à chaque contrac­tion, d’éjecter suf­fi­sam­ment de sang dans l’ensemble de l’organisme. Ce dis­po­si­tif est aujourd’hui une des thé­ra­pies phares de la car­dio­lo­gie implantable.
Pour plus de 200 000 per­sonnes, leur insuf­fi­sance car­diaque est due à une fai­blesse du cœur qui ne peut pas éjec­ter suf­fi­sam­ment de sang dans l’organisme. Pour trai­ter ces patients, une des options est d’implanter un géné­ra­teur de flux direc­te­ment dans le cœur. Fine­Heart a déve­lop­pé une petite tur­bine, l’ICOMS® FLOWMAKER®, envi­ron 10 cm, qui peut être implan­tée dans le cœur et dont l’action est syn­chro­ni­sée avec le fonc­tion­ne­ment natif du cœur afin d’accélérer le flux sanguin.

En quoi l’ICOMS® FLOWMAKER® est-il différent des autres dispositifs médicales existants ?

Pour les patients les plus sévères que nous ciblons aus­si avec notre dis­po­si­tif, il existe des assis­tances car­diaques par­tiel­le­ment implan­tables ou des pompes car­diaques qui viennent rem­pla­cer la fonc­tion car­diaque. L’implantation de ces dis­po­si­tifs qu’on appelle LVAD – (left ven­tri­cu­lar assist device) néces­site un chi­rur­gie plus inva­sive (arrêt du cœur, mise en place d’une cir­cu­la­tion extracor­po­relle…). Ces pompes aspi­ra­tives sont pla­cées à l’extérieur du cœur avec une canule implan­tée dans le cœur pour aspi­rer le sang qu’il contient et le « court-cir­cui­ter » afin de le reje­ter direc­te­ment dans l’aorte. Parce qu’elles ont voca­tion à rem­pla­cer l’activité native du cœur, ces pompes ont besoin de beau­coup d’énergie et sont ain­si ali­men­tées par des bat­te­ries exter­na­li­sées connec­tées à la pompe implan­tée dans le tho­rax du patient par un câble per­cu­ta­né, voie d’entrée de nom­breuses infec­tions très dif­fi­ciles à soi­gner et mal­heu­reu­se­ment trop sou­vent fatales pour le patient.

En paral­lèle, les LVAD fonc­tion­nant majo­ri­tai­re­ment en conti­nu sans prendre en compte la contrac­tion native du cœur et sans res­pec­ter la pul­sa­ti­li­té, leur uti­li­sa­tion va sur le long terme dégra­der l’imperméabilité des mem­branes des artères, expo­sant ain­si les patients à un fort risque d’hémorragie qu’il est là aus­si très dif­fi­cile de stop­per, les patients néces­si­tant un trai­te­ment anti­coa­gu­lant dès l’implantation de ce type de dispositif.
Au cours des 20 der­nières années, ces dis­po­si­tifs ont été amé­lio­rés et minia­tu­ri­sés, mais les risques de com­pli­ca­tions, infec­tion majeure, hémor­ra­gie, sou­vent mor­telles, suite à l’implantation, res­tent très éle­vés. Avec l’ICOMS® FLOWMAKER®, nous pre­nons le contre-pied de cette approche : nous ne rem­pla­çons pas l’activité car­diaque native, mais l’augmentons. Nous uti­li­sons la fonc­tion native du cœur, certes alté­rée, nous la fac­to­ri­sons grâce notre petite turbine.
En syn­chro­ni­sant son action avec la fonc­tion native du cœur, nous allons pou­voir géné­rer le même flux san­guin que les pompes aspi­ra­tives en consom­mant cinq à dix fois moins d’énergie. Et pour l’alimenter en éner­gie, nous met­tons en place une bat­te­rie inter­na­li­sée et implan­tée au niveau de l’abdomen du patient , qui se recharge grâce à un sys­tème d’induction (TET), qui ne néces­site pas de fil percutané.

Pour résumer, quels sont les bénéfices de l’ICOMS® FLOWMAKER® ?

Notre dis­po­si­tif médi­cal , mini­ma­le­ment inva­sif, est entiè­re­ment implan­table à cœur bat­tant . Son implan­ta­tion ne néces­site pas d’ouvrir le tho­rax, ce qui réduit consi­dé­ra­ble­ment le risque de com­pli­ca­tions post-chi­rur­gi­cales. Enfin parce que nous res­pec­tons la syn­chro­ni­sa­tion de la pul­sa­ti­li­té du cœur, nous n’altérons pas la per­méa­bi­li­sa­tion des artères ce qui n’expose pas les patients au risque d’hémorragie. Son ali­men­ta­tion par TET, sans fil exté­rieur, ne va pas géné­rer de com­pli­ca­tions lourdes liées.

Aujourd’hui, où en êtes-vous ? Quelles sont les prochaines étapes ?

Fine­Heart emploie actuel­le­ment plus de 50 per­sonnes et a déjà levé plus de 40 M d’euros. Nous avons récem­ment obte­nu une sub­ven­tion de l’Europe dans le cadre du Pro­gramme d’Investissement d’Avenir de l’EIC. Sur 3 000 can­di­dats, 13 socié­tés fran­çaises ont été rete­nues et Fine­Heart est la seule Med­Tech. Depuis notre créa­tion, nous sommes sou­te­nus par une com­mu­nau­té inter­na­tio­nale de car­dio­logues, en attente de solu­tion effi­cace pour le trai­te­ment effi­cace de leurs patients atteints d’insuffisance car­diaque sévère, par la région Aqui­taine et la région Centre, la BPI, ain­si que des d’investisseurs pri­vés de renom­mée inter­na­tio­nale. Aujourd’hui, après avoir fran­chi avec suc­cès tous les tests pré­cli­niques, nous sommes impa­tients de mon­trer et confir­mer l’efficacité de notre inno­va­tion sur des patients humains, au cours d’un essai cli­nique, First in Human, pré­vu cette année.

Et pour conclure ?

Dès le départ, nous avons fait le choix de nous ins­crire dans une logique d’internalisation des com­pé­tences et des exper­tises pour gagner en agi­li­té (desi­gn, pro­to­ty­page, fabri­ca­tion, déve­lop­pe­ment…). Cela nous per­met aujourd’hui d’être tota­le­ment auto­nomes et de mettre en place notre pro­cess d’industrialisation. Nous sommes fiers d’avoir conçu et déve­lop­pé grâce à nos ingé­nieurs en R&D l’ICOMS® FLOWMAKER®, un dis­po­si­tif médi­cal 100 % fran­çais, capable de se syn­chro­ni­ser avec la fonc­tion pul­sa­tile du cœur, et d’avoir acquis la maî­trise com­plète de son industrialisation.


La parole à Guillaume Buc (X85), directeur technique de FineHeart

Présentez-nous votre parcours.

Diplô­mé de l’École poly­tech­nique en mathé­ma­tiques appli­quées et de l’École Natio­nale Supé­rieure des Télé­com­mu­ni­ca­tions de Paris en trai­te­ment des images et infor­ma­tique, j’ai com­men­cé ma car­rière dans une socié­té de ser­vices dans le sec­teur de la défense avant de rejoindre en 1995 GE Heal­th­care, un des acteurs mon­diaux de l’imagerie de diag­nos­tic où j’ai occu­pé diverses fonc­tions. En 2013, j’ai rejoint Pixium Vision, une med­tech qui déve­loppe un implant réti­nien qui a voca­tion à sti­mu­ler élec­tri­que­ment les fonc­tions rési­duelles de la rétine dans le cadre de mala­dies neu­ro­dé­gé­né­ra­tives de ces cel­lules, comme la DMLA. Neuf ans plus tard, j’ai eu le plai­sir de rejoindre Fine­Heart et de retrou­ver le monde de la car­dio­lo­gie que j’avais décou­vert chez GE Healthcare.

Au sein de FineHeart, quels sont votre feuille de route et vos principaux enjeux ?

Aujourd’hui, je mets mon expé­rience des enjeux régle­men­taires et de la ges­tion « mul­ti métiers » d’un medi­cal device inno­vant au ser­vice du déve­lop­pe­ment de l’ICOMS® FLOWMAKER®.
Sur le très court terme, il s’agit de conso­li­der le déve­lop­pe­ment de la socié­té en nous concen­trant sur dif­fé­rents axes com­plé­men­taires : l’évolution du dis­po­si­tif actuel et son déve­lop­pe­ment au cours des pro­chaines géné­ra­tions, l’investigation de nou­velles appli­ca­tions pour notre tech­no­lo­gie, la sécu­ri­sa­tion de l’industrialisation. L’objectif est de mettre au point un dis­po­si­tif essen­tiel pour la vie des patients. Cela repré­sente une res­pon­sa­bi­li­té et un chal­lenge de grande enver­gure. Ce dis­po­si­tif inno­vant a voca­tion à amé­lio­rer signi­fi­ca­ti­ve­ment la vie des patients atteints d’insuffisance car­diaque sévère.

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