Dissuasion nucléaire

La dissuasion nucléaire de l’adhésion tacite au doute contestataire

Dossier : ExpressionsMagazine N°782 Février 2023
Par Jacques BORDÉ (64)

L’opinion publique fran­çaise a adhé­ré mas­si­ve­ment au concept de dis­sua­sion nucléaire défen­du par la Ve Répu­blique et, par consé­quent, sou­te­nu les inves­tis­se­ments mas­sifs consen­tis dans cette pers­pec­tive. L’auteur, qui est oppo­sé aux armes nucléaires, estime que cet état de choses évo­lue actuel­le­ment et que la poli­tique de dis­sua­sion de la France ne fait plus l’unanimité. Nous invi­tons nos lec­teurs à en débattre en bas de l’article, dans la sec­tion com­men­taires. 

Dans le dos­sier « Nucléaire, retour vers le futur » du n° 780 de La Jaune et la Rouge, Fan­ny Bazile décrit dans son article à la page 54 les ques­tions liées à l’acceptabilité du nucléaire civil par la popu­la­tion. Son article est inti­tu­lé « De la contro­verse à l’acceptation » et ne traite que du nucléaire civil. 

Elle évoque cepen­dant le nucléaire mili­taire, pour sou­li­gner l’aspect dual de l’énergie nucléaire et la révé­la­tion de cette éner­gie au grand public par l’effroyable démons­tra­tion au Japon en 1945, qui a pu engen­drer dans l’opinion un pré­ju­gé défa­vo­rable à l’énergie nucléaire civile. 

Ce lien intime entre les deux filières indus­trielles, mili­taire et civile, sœurs sia­moises à la nais­sance, a des rai­sons his­to­riques et struc­tu­relles en France ; il a été encore rap­pe­lé par Emma­nuel Macron en décembre 2020 dans son dis­cours au Creu­sot : « Sans nucléaire civil pas de nucléaire mili­taire, sans nucléaire mili­taire, pas de nucléaire civil. » 

Nucléaire civil, nucléaire militaire, même combat ? 

Cette orga­ni­sa­tion en termes de pro­duc­tion et de recherche n’a de sens que si le Gou­ver­ne­ment sou­haite déve­lop­per l’armement nucléaire et faire accep­ter sans dis­cus­sion la filière mili­taire par la filière civile ; il doit en effet faire accep­ter qu’il ait mani­fes­te­ment pri­vi­lé­gié le finan­ce­ment de la filière mili­taire ces der­nières années, alors que la filière civile a beau­coup décli­né. Il veut aujourd’hui relan­cer le nucléaire civil, convaincre qu’il croit en son ave­nir néces­saire pour des rai­sons indus­trielles et envi­ron­ne­men­tales. Il veut obte­nir l’adhésion du public à ce renou­veau ambi­tieux du nucléaire civil et jus­ti­fier ipso fac­to l’énorme bud­get alloué à la dis­sua­sion nucléaire, qui engage aus­si la France pour des décennies.

En réa­li­té, le béné­fice que le nucléaire civil retire de notre arme nucléaire est indi­rect et n’est pas indis­pen­sable : la filière civile pour­rait très bien se déve­lop­per sans que la France pos­sé­dât des armes nucléaires (à l’instar du Japon ou de l’Italie, ou d’autres pays). En outre, mal­gré leur paren­té, les deux sujets sont très dif­fé­rents du point de vue socié­tal, voire oppo­sés sous de nom­breux aspects : les enjeux, les objec­tifs, l’efficacité pour les atteindre, le rap­port coût-béné­fice, l’information dis­po­nible. Dans ce contexte, il me paraît utile de com­pa­rer les conclu­sions de Fan­ny Bazile sur le nucléaire civil à l’évolution de la socié­té face au nucléaire mili­taire. 

L’absence de débat pour le nucléaire militaire

Fan­ny Bazile met l’accent à juste titre sur l’importance de débats publics et d’une infor­ma­tion suf­fi­sante et fiable pour que la socié­té civile puisse se faire une opi­nion rai­son­née sur le rap­port coût-béné­fice de l’énergie nucléaire civile. Il en est de même pour l’armement nucléaire : ces débats et infor­ma­tions seraient indis­pen­sables, mais ils ne sont pas acces­sibles au grand public. Il faut noter aujourd’hui ce contraste entre l’existence de débats et d’information pour le nucléaire civil et leur absence pour le nucléaire mili­taire. Depuis de Gaulle, la seule infor­ma­tion répé­tée conti­nû­ment aux Fran­çais par le Gou­ver­ne­ment est que la pos­ses­sion de l’arme nucléaire serait vitale pour les inté­rêts de la France, pour son rôle dans le monde, pour les pro­grès de notre indus­trie civile dans tous les domaines, et cela ne se dis­cute ni dans les arènes publiques ni dans les médias.

La popu­la­tion fran­çaise a accep­té sans dis­cus­sion de pla­cer sa fier­té dans cet exploit tech­no­lo­gique cen­sé lui appor­ter la sou­ve­rai­ne­té et dis­sua­der tous nos enne­mis. Rien n’est débat­tu en public quant aux coûts réels, aux consé­quences de guerres nucléaires pos­sibles, aux risques d’accident, à l’utilité face aux menaces d’agression de plus en plus variées. Le dis­cours offi­ciel conti­nue à affir­mer de façon dog­ma­tique qu’« elle est notre fier­té et notre garan­tie de paix ! » (même dans les enceintes aca­dé­miques où l’on pour­rait espé­rer davan­tage d’objectivité). Dans un article récent « La socié­té civile face au nucléaire mili­taire » paru dans Recherches inter­na­tio­nales (n° 124, avril-juin 2022, p. 23–31), je décris que cette accep­ta­tion aveugle est en train de chan­ger à l’échelle pla­né­taire, avec des retom­bées qui com­mencent à se per­ce­voir en France . Cette ten­dance « De l’acceptation à la contro­verse » est donc l’inverse du titre de l’article de Fan­ny Bazile sur le nucléaire civil ! 

L’apparition de la contestation mondiale du nucléaire militaire

Le dogme offi­ciel de la dis­sua­sion nucléaire a fini par inter­pe­ler des per­sonnes mieux infor­mées que l’ensemble de la popu­la­tion sur la réa­li­té de l’apport des armes nucléaires à l’équilibre géo­po­li­tique mon­dial. Ce sont des per­son­na­li­tés qui, par leur pro­fes­sion (scien­ti­fiques, méde­cins, poli­tiques…), étaient plus proches des dos­siers et ain­si plus au fait des moments dra­ma­tiques où une catas­trophe nucléaire, cau­sée par un acci­dent ou par un mal­en­ten­du, n’a été évi­tée que par miracle.

Cette prise de conscience leur a per­mis de mieux éva­luer le rap­port béné­fice-risque de la pos­ses­sion d’une telle arme et d’alimenter la réflexion de la socié­té civile sur la vali­di­té du dis­cours offi­ciel. En outre, à la dif­fé­rence du nucléaire civil, dis­po­nible pour tous les pays qui sou­haitent et peuvent le déve­lop­per, l’arme nucléaire est inter­dite à la majo­ri­té des pays et nombre de ceux-ci ont com­pris que l’existence de ces armes était davan­tage une menace envi­ron­ne­men­tale grave pour leur propre sur­vie qu’une assu­rance de paix.

« La France est absente du TIAN. »

Ils ont réus­si à faire voter à l’ONU en 2017 un Trai­té sur l’interdiction des armes nucléaires (TIAN) dont l’effet a été de sus­ci­ter des débats publics et mon­diaux sur le dan­ger qu’elles repré­sentent pour l’humanité. Une grande par­tie de la popu­la­tion civile mon­diale peut main­te­nant réflé­chir en enten­dant des argu­ments pour et contre. La France est absente du TIAN et les Fran­çais béné­fi­cient peu de ces débats, car ils sont peu relayés dans les médias de notre pays, mais cela progresse.

Cette pro­gres­sion se confirme par les son­dages men­tion­nés dans l’article cité de Recherches inter­nationales, mais celui-ci a été écrit avant la guerre en Ukraine donc après une longue période où aucune menace nucléaire n’a pesé sur le monde. On peut donc légi­ti­me­ment se deman­der si les menaces nucléaires pro­fé­rées et réité­rées par Pou­tine lors de son attaque de l’Ukraine ont chan­gé la per­cep­tion qu’a la socié­té civile de l’utilité de la dis­sua­sion nucléaire. 

Les conséquences de la guerre en Ukraine

En effet, on a par­lé de la dis­sua­sion nucléaire et des menaces de guerre nucléaire depuis février 2022 davan­tage que dans les décen­nies écou­lées depuis la crise de Cuba en 1962. De nom­breux articles de presse ont relayé des décla­ra­tions variées sur la dis­sua­sion, mais mal­heu­reu­se­ment tout ce qu’on a pu lire n’a fait que reflé­ter la diver­si­té d’opinions indi­vi­duelles ou par­ti­sanes quant au pari que repré­sente la dis­sua­sion, lais­sant chaque lec­teur per­plexe et face à sa croyance personnelle.

On a ain­si pu lire que l’agression de l’Ukraine était la preuve de l’efficacité de la dis­sua­sion, puisque Pou­tine par sa menace nucléaire a dis­sua­dé l’Occident d’affronter direc­te­ment la Rus­sie et que le même Pou­tine se tient soi­gneu­se­ment à l’écart des pays de l’Otan. On a aus­si pu lire que l’agression de l’Ukraine était la preuve de l’échec de la dis­sua­sion, puisque l’Occident avec toutes ses armes nucléaires n’a pas pu dis­sua­der Pou­tine d’attaquer l’Ukraine.

« La dissuasion nucléaire a une forte composante psychologique. »

On a encore pu lire que, si l’Ukraine avait gar­dé ses armes nucléaires lors du déman­tè­le­ment de l’URSS, Pou­tine ne l’aurait cer­tai­ne­ment jamais agres­sée (ce der­nier argu­ment est par­ti­cu­liè­re­ment irres­pon­sable, car il pous­se­rait tous les États mena­cés à se doter d’armes nucléaires pour leur sécu­ri­té, alors que l’on cherche à évi­ter le risque de pro­li­fé­ra­tion depuis 1970). On a pu lire que l’Ukraine, sans armes nucléaires, résiste à la Rus­sie qui les pos­sède (comme le Viet­nam face aux USA) et qu’elles sont donc inutiles et n’empêchent pas les guerres conven­tion­nelles ; on a enfin pu lire que les puis­sances occi­den­tales et la Chine, dotées d’armes nucléaires, ont réus­si à dis­sua­der Pou­tine d’utiliser ses armes nucléaires.

Toutes ces asser­tions ne peuvent évi­dem­ment être ni prou­vées ni démen­ties et per­sonne ne sait ce qui se passe réel­le­ment dans la tête de Pou­tine, ni ce qu’il est prêt à faire pour gar­der le pou­voir et sau­ver la face. La dis­sua­sion nucléaire a une forte com­po­sante psy­cho­lo­gique et res­semble à la théo­rie des jeux de bluff, sans que l’on sache lequel des deux joueurs sera le plus inti­mi­dé par la menace de l’autre et céde­ra en pre­mier. La socié­té civile se retrouve donc au degré zéro de la réflexion sur le risque réel de guerre nucléaire. 

Les incertitudes des doctrines d’emploi

Le seul rai­son­ne­ment pos­sible repose sur ce qu’on sait des doc­trines d’emploi des armes nucléaires par les dif­fé­rents pays (à noter : doc­trines d’emploi pour ces armes dont on dit que ce sont des armes de non-emploi !).

Mais ces doc­trines sont floues et fluc­tuantes et n’aident pas le citoyen à s’y retrou­ver : même le Pré­sident Macron, inter­ro­gé sur France 2 le 12 octobre 2022, a ajou­té à la confu­sion en décla­rant qu’il ne ripos­te­rait pas nucléai­re­ment à une attaque nucléaire de la Rus­sie sur l’Ukraine, décla­ra­tion inco­hé­rente avec des décla­ra­tions pré­cé­dentes sur notre doc­trine, ce qui a pous­sé les mili­taires fran­çais à expri­mer leur mécon­ten­te­ment face à cette entorse à la doc­trine et a lais­sé nos alliés désem­pa­rés quant à la déter­mi­na­tion fran­çaise. Tant et si bien que même un spé­cia­liste de la dis­sua­sion, Ben­ja­min Hau­te­cou­ver­ture (Fon­da­tion pour la recherche stra­tégique), a écrit dans Le Monde (20 décembre 2022) que « le contre­temps pré­si­den­tiel peut être utile s’il force la réflexion fran­çaise sur la doc­trine pour la préciser ».

La pen­sée de Pou­tine ne semble pas plus fiable sur l’emploi ou non-emploi de l’arme nucléaire, puisqu’il a publié le 3 jan­vier 2022 avec les pré­si­dents des pays du P5 (USA, France, Royaume-Uni, Rus­sie et Chine) une décla­ra­tion réaf­fir­mant le prin­cipe « qu’une guerre nucléaire ne peut être gagnée et ne doit jamais être menée », cela peu avant sa pre­mière menace d’utiliser son arme nucléaire. 

Une opinion publique désemparée qui s’interroge

Devant tant d’imprécisions et de contra­dic­tions, que peut pen­ser le citoyen ? Un son­dage de sep­tembre 2022 réa­li­sé par l’Ifop à la demande d’ACDN (Action des citoyens pour le désar­me­ment nucléaire) révèle que les lignes ont légè­re­ment bou­gé par rap­port au même son­dage réa­li­sé en mai 2018 : le pour­cen­tage des Fran­çais qui sou­haitent que la France par­ti­cipe à l’abolition des armes nucléaires est des­cen­du de 85 % à 71 %.

Ce recul peut être dû à la peur, qui pousse à s’armer jusqu’aux dents, ou au doute de pou­voir négo­cier un accord fiable avec des diri­geants comme Pou­tine ou d’autres dic­ta­teurs, ou encore à la menace de pro­li­fé­ra­tion dans les pays du Moyen-Orient et d’Asie. Mal­gré cette dimi­nu­tion on reste dans une nette majo­ri­té et la crainte de l’escalade actuelle vers une guerre nucléaire n’empêche pas une majo­ri­té de pen­ser que le monde serait moins dan­ge­reux si les pays arri­vaient à s’entendre pour éli­mi­ner ces armes de façon négo­ciée et véri­fiable. 

Des occasions pour réfléchir

Il y a eu en 2022 d’autres rai­sons pour les­quelles la presse a par­lé des armes nucléaires, mais ce sont des rai­sons plus tech­niques qui ont, sans doute, moins mobi­li­sé le grand public. Il s’agit notam­ment de la pre­mière Confé­rence des États par­ties du TIAN, en juin à Vienne, et de la 10e confé­rence d’examen du Trai­té de non-pro­li­fé­ra­tion (le TNP), en août à New York. À ces occa­sions la socié­té civile a pu s’exprimer et faire des décla­ra­tions expli­cites pour aller vers la sup­pres­sion des armes nucléaires ou du moins vers un enga­ge­ment à ne pas les utiliser.

Enfin, on a beau­coup repar­lé en 2022 des essais nucléaires fran­çais en Poly­né­sie et des dégâts qu’ils y ont faits, ain­si que du dédom­ma­ge­ment des vic­times. Les essais nucléaires fran­çais ont éga­le­ment fait par­tie des sujets impor­tants lors du voyage d’Emmanuel Macron en Algé­rie en août ; la recon­nais­sance de la res­pon­sa­bi­li­té de la France a fait prendre conscience que toutes les pré­cau­tions ne sont pas for­cé­ment prises pour pro­té­ger les civils des consé­quences de la pos­ses­sion de ces armes.

Les Fran­çais peuvent se deman­der pour­quoi il n’y avait pas d’abris anti­ato­miques en France pen­dant la guerre froide, à la dif­fé­rence des USA (ou de la Suisse !). 

D’autres besoins en armement ? 

Il devient de plus en plus connu du grand public qu’on ne lui a pas tout dit sur les armes nucléaires, qu’il en est l’otage pour sa sécu­ri­té et qu’elles ne répondent pas à tous les besoins de sécu­ri­té face aux menaces hybrides actuelles, notam­ment qu’elles n’empêchent ni les guerres conven­tion­nelles ni le ter­ro­risme. Pour lut­ter contre ceux-ci, le besoin d’autres arme­ments moins coû­teux, moins dan­ge­reux pour l’humanité et mieux adap­tés se fait sen­tir, car on en manque cruel­le­ment (voir aus­si La Jaune et la Rouge n° 717 « Pour un trai­té d’interdiction totale des armes nucléaires »). Pour toutes ces rai­sons je redi­rai que, face à l’arme nucléaire, la socié­té civile fran­çaise est pas­sée entre 1960 et 2022 de l’acceptation incons­ciente (voire de l’approbation silen­cieuse) à la contro­verse inter­ro­ga­tive. 

12 Commentaires

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Rodri­guezrépondre
19 février 2023 à 19 h 03 min

L’enjeu est de mettre en place un TIAN qui soit robuste, fiable, irréversible :
– Robuste pour qu’il résiste à toutes les attaques aux­quelles il sera sou­mis car qui oublie­ra le pou­voir éga­li­sa­teur de l’atome ?
– Fiable pour qu’aucune tri­che­rie ou détour­ne­ment de tech­no­lo­gie ne puisse échap­per au contrôle et que ce contrôle soit cré­dible et consi­dé­rée comme tel .avec des sanc­tions à la clef ; « acces­soi­re­ment » qui sera armé pour les faires appliquer ?
– Irré­ver­sible pour qu’il soit impos­sible, alors qu’aujourd’hui toutes les tech­no­lo­gies et tous les sys­tèmes d’armes sont duaux, de jouer de cette dua­li­té pour conduire des tra­vaux léga­le­ment interdits ; .
In fine fau­dra-t-il inter­dire ou mettre un agent AIEA à côté de chaque machine outil déve­lop­pée pour les nano tech­no­lo­gies au motif que la nano­tech­no­lo­gie est au cœur des armes nucléaires ?
La mise en oeuvre du TIAN n’est pas pour demain, sur­tout si, au pré­lable, il fau­dra détruire toutes les armes existantes.…RJC 19 fevrier 23

JACQUES BORDÉrépondre
28 février 2023 à 12 h 17 min
– En réponse à: Rodriguez

Oui cela pren­dra du temps mais rai­son de plus pour s’y atte­ler dès main­te­nant. Les Trai­tés sur les armes chi­miques et bio­lo­giques ont eu des effets béné­fiques réels, même si il y a des Etats voyoux qui ne res­pectent pas les règles, et c’est plus dif­fi­cile de fabri­quer des armes nucléaires clan­des­ti­ne­ment que d’autres armes et les armes nucléaires sont beau­coup plus dan­ge­reuses pour l’en­semble de l’hu­ma­ni­té. On est pas­sé de 70000 à 15000 armes nucléaires après la chute du mur donc pas de pro­blèmes pour des­cendre à 0 si la volon­té est là. Les Trai­tés inter­na­tio­naux sont pleins de fai­blesses et il fauf pro­gres­ser sur le Droit inter­na­tio­nal et sur les pou­voirs réels d’or­ga­nismes comme l’O­NU pour les faire res­pec­ter avec les moyens ad hoc. Oui la plu­part des tech­no­lo­gies sont duales et les armes nucléaires en uti­lisent beau­coup, nano, infor­ma­tique, com­mu­ni­ca­tion, missiles.…et on ne va pas sur­veiller la fabri­ca­tion de chaque écrou sous pré­texte qu’il y en a dans les armes mais on peut savoir si un Etat com­mence à fabri­quer des armes nucléaires de des­truc­tion mas­sive et la coopé­ra­tion des scien­ti­fiques avec les mili­taires pour le déve­lop­pe­ment des appli­ca­tions mili­taires de nou­velles tech­no­lo­gies peut être limi­tée à cer­taines fina­li­tés accep­tables. Pour les « bombes sales », des groupes ter­ro­ristes peuvent en fabri­quer assez faci­le­ment mais ce n’est pas toute l’hu­ma­ni­té qui risque de disparaître.

Ste­fa­nel­lorépondre
23 février 2023 à 17 h 55 min

Il est regret­table de voir une opi­nion aus­si tran­chée et orien­tée, sur un sujet aus­si déli­cat, expo­sé dans cette revue sans contre point. Le sujet mérite mieux que cela, La Jaune et la Rouge devrait s’y employer..

JACQUES BORDÉrépondre
28 février 2023 à 12 h 28 min
– En réponse à: Stefanello

Mer­ci pour votre com­men­taire qui abonde dans mon sens puisque je me plains dans l’ar­ticle d’une absence de débats publics sur un sujet aus­si impor­tant. A noter que La Jaune et la Rouge avait ouvert le débat dès 2016 dans le dos­sier sur la Défense du N°715 où il y a une opi­nion tran­chée pour la dis­sua­sion nucléaire dans l’ar­ticle « La dis­sua­sion nucléaire, une arme plus actuelle que jamais », article auquel j’a­vais répon­du dans le N° 717 avec Paul Qui­lès et Jean-Pierre Dupuy comme co-auteurs.

JACQUES BORDÉrépondre
28 février 2023 à 18 h 54 min
– En réponse à: Stefanello

oui et mer­ci d’a­bon­der dans mon sens puisque mon article a pour but de regret­ter le manque de débats publics et d’in­for­ma­tions objec­tives sur un sujet aus­si impor­tant et fort déli­cat puisque les ques­tions à se poser sont à la croi­sée de réflexions géo­po­li­tiques, mili­taires, scien­ti­fiques et morales. La Jaune et la Rouge a en fait déjà enta­mé le débat dès 2016 dans le dos­sier Défense du N° 715 avec l’ar­ticle « La dis­sua­sion nucléaire, une arme plus actuelle que jamais », article auquel j’ai répon­du dans le N°717 avec Paul Qui­lès et Jean-Pierre Dupuy comme co-auteurs

Cou­trotrépondre
23 février 2023 à 21 h 03 min

L’arme nucléaire a été pen­dant 70 ans une assu­rance sans faille pour ses déten­teurs de ne pas être agres­sés sur leurs ter­ri­toires . Elle n’est cepen­dant pas un obs­tacle à des conflits sur les ter­ri­toires de ceux qui n’en dis­posent pas, impli­quant le cas échéant des des puis­sances nucléaires. Elle ne peut pas être une garan­tie de paix uni­ver­selle. A t’on quelque chose de plus effi­cace à pro­po­ser dans le cas de notre pays ?
Quant aux risques acci­den­tels ou concer­nant l’environnement, voi­là une vieille ren­gaine qui a été usée à volon­té par tous les anti nucléaires depuis l’origine. Je vous laisse tirer les conclusions

JACQUES BORDÉrépondre
28 février 2023 à 19 h 34 min
– En réponse à: Coutrot

On ne peut pas prou­ver que l’ab­sence de guerres sur les ter­ri­toires amé­ri­cains et sovié­tiques pen­dant ces 70 ans soit due à l’arme nucléaire car il y a eu beau­coup d’autres rai­sons. En revanche on sait avec cer­ti­tude que l’on est pas­sé à plu­sieurs reprises à deux doigts de l’a­po­ca­lyspe nucléaire et on a eu beau­coup de chance. Comme vous le dîtes, l’é­qui­libre (instable ?) de la ter­reur ne peut être la garan­tie de paix pour des cen­taines d’an­nées et il faut trou­ver d’autres méca­nismes pour main­te­nir la paix qui ne nous fassent pas vivre dans la ter­reur (qui n’est pas une paix confor­table). On devrait com­men­cer par rendre les Ins­ti­tu­tions inter­na­tio­nales (ONU,…) et le Droit Inter­na­tio­nal plus effi­caces. Quant à l’en­vi­ron­ne­ment, vous confon­dez le nucléaire civil dont les acci­dents sont graves pour l’en­vi­ron­ne­ment et chers éco­no­mi­que­ment et socia­le­ment mais gérables avec une guerre nucléaire même limi­tée dont les consé­quences sur la pla­nète seraient d’un tout autre ordre de gran­deur : il s’a­git d’a­bord de l’im­pact huma­ni­taire, avant l’im­pact sur l’en­vi­ron­ne­ment ; celui-ci sera énorme mais il n’y aura peut-être plus per­sonne pour le déplorer.

Jouan­naudrépondre
23 février 2023 à 21 h 28 min

Que l’on soit pour ou contre, je ne com­prends pas l’in­té­rêt d’une dis­sua­tion nucléaire fran­caise dans une europe à 27 (ou 28 ?). Pour­quoi ne pas trans­fé­rer nos capa­ci­tés de dis­sua­tion à l’Eu­rope ? Je com­prends que cela pose des pro­blèmes com­plexes, tout autant ins­ti­tu­tion­nels que tech­niques, encore aurait-il fal­lu que nous fis­sions des efforts intenses en ce sens au cours des années pas­sées. Ouf, j’ai eu du mal à pla­cer cet impar­fait du subjonctif.

JACQUES BORDÉrépondre
28 février 2023 à 19 h 48 min
– En réponse à: Jouannaud

Oui l’Eu­rope de la défense a beau­coup de mal à émer­ger ; il y a eu des efforts bud­gé­taires récents mais qui ont été vite orien­tés vers la coopé­ra­tion indus­trielle des arme­ments et même cela marche mal. On n’a déjà pas trou­vé le bon équi­libre entre la sou­ve­rai­ne­té natio­nale et la gou­ver­nance euro­péenne pour déci­der dans beau­coup de domaines civils. On ima­gine alors la dif­fi­cul­té pour déci­der à 27 de la doc­trine d’emploi de l’arme nucléaire. Mer­ci pour l’im­par­fait du sub­jonc­tif « fis­sions » qui est appro­prié pour l’arme thermonucléaire !

Vincent DEHAYErépondre
24 février 2023 à 13 h 18 min

Le prin­cipe de l’arme nucléaire est la dis­sua­sion. Le prin­cipe de la dis­sua­sion est la crainte de nous voir uti­li­ser cette arme.
L’arme nucléaire est une arme de des­truc­tion mas­sive. Qui redoute que la France puisse réel­le­ment uti­li­ser une telle arme ?
L’URSS est tom­bée, les chars sovié­tiques n’en­tre­ront pas à Paris. Les concepts d’emploi que l’on nous a ensei­gnés ont dis­pa­ru. Quels sont les nou­veaux concepts ? Ma par­ti­ci­pa­tion com­porte plus de ques­tions que de réponses.

JACQUES BORDÉrépondre
28 février 2023 à 20 h 12 min
– En réponse à: Vincent DEHAYE

Comme dit dans l’ar­ticle, les doc­trines d’emploi sont fluc­tuantes et peu fiables. La France ne veut pas dire quels sont ses inté­rêts vitaux et a fini par avouer qu’il n’au­rait pas appuyé sur le bou­ton même en cas d’in­va­sion sovié­tique, par peur des repré­sailles qui auraient rayé la France de la carte . Il n’y a pas vrai­ment de nou­veaux concepts sauf à répé­ter que « le monde est de plus en plus dan­ge­reux et qu’on ne sait jamais ». Mais il sera encore plus dan­ge­reux si davan­tage de pays se dotent de l’arme nucléaire et notre dis­cour’s les y incite puis­qu’on dit qu’elle est indis­pen­sable à notre sécu­ri­té. En plus les nou­veaux dan­gers sont cyber, sani­taires, spa­tiaux, envi­ron­ne­men­taux (eau, ali­men­ta­tion, res­sources miné­rales,..) pour les­quels l’arme nucléaire n’est pas adap­tée. La géo­pol­tique a chan­gé et la nature des guerres aussi.

Jaquard Phi­lipperépondre
11 mai 2023 à 11 h 04 min

Après la lec­ture de l’ar­ticle de Phi­lippe Duteste, publié en mai, je relis le tien publié en février. Un article fort bien fait pour ana­ly­ser l’é­vo­lu­tion de l” « opi­nion » sur la dis­sua­sion nucléaire. Un inter­ro­ga­tion sur celle-ci qui peut conduire à son aban­don, c’est ain­si que j’ai com­pris ton article. Ai-je tort ?
Je suis déçu par la teneur de ces deux articles impor­tants sur un sujet dont le débat reste ouvert, nous dit-on, mais qui semble igno­rer la recom­po­si­tion poli­tique à laquelle nous assis­tons avec la guerre en Ukraine.
La dis­sua­sion nucléaire est un sujet poli­tique majeur qui ne peut se tran­cher avec des opi­nions publiques ver­sa­tiles et inca­pables d’ap­pré­hen­der ces sujets.
La preuve en est que ces sujets ne font pas par­tie des pro­grammes poli­tiques des can­di­dats à la pré­si­dence de la Répu­blique et heureusement…
Mais dans cette recom­po­si­tion poli­tique mon­diale en cours, la ques­tion de l’Eu­rope (et alors laquelle?) se pose.
La France seule avec son arme nucléaire n’au­ra pas sa place dans cette recom­po­si­tion. Par contre quelques pays euro­péens ayant une soli­da­ri­té poli­tique en matière de poli­tique étran­gère et de défense nucléaire com­mune pour­raient alors comp­ter face aux autres blocs au niveau mondial.
Com­ment y arri­ver ? Je ne sais.
Mais cer­tai­ne­ment pas en se basant sur une opi­nion publique qui fait une place impor­tante à la contestation.
La construc­tion d’une autre Europe qui comp­te­ra dans la recom­po­si­tion mon­diale en cours et qui ne peut qu’être dif­fé­rente que celles qui existent, n’est-elle pas le grand enjeu de nos jeunes cama­rades de cette école à la fois civile et militaire ?

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