Section Raid en plein effort (février 2020). © École polytechnique - J. Barande

Être une femme à Polytechnique : les ambiguïtés d’un statut minoritaire

Dossier : 50 ans de féminisation de l'XMagazine N°777 Septembre 2022
Par Alisée KOCH (X19)

La vie d’une femme à Poly­tech­nique ne dif­fère appa­rem­ment pas beau­coup de la vie d’un homme. Mais le fait d’être dans une école qui a un sta­tut mili­taire et où le sport a une place impor­tante ren­voie sou­vent les femmes à leur sta­tut mino­ri­taire dans leur vie de tous les jours : vête­ments, accès encore par­tiel aux dif­fé­rentes sec­tions spor­tives, incar­na­tion dif­fé­rente du modèle poly­tech­ni­cien. Cin­quante ans après le début de la fémi­ni­sa­tion de l’École, le sta­tut de femme à l’X n’est pas encore clai­re­ment défi­ni pour les élèves polytechniciennes.

Com­ment par­ler de la vie des femmes à l’X ? Aus­si, com­ment décrire la vie à l’X, et com­ment dépeindre la vie des femmes ? Fina­le­ment, qu’est-ce que la vie des femmes à l’X ? Afin d’en don­ner un aper­çu, l’appel aux témoi­gnages est oppor­tun. Ces témoi­gnages per­mettent de rendre compte de la diver­si­té du quo­ti­dien sur le pla­tâl, et de l’ambiguïté de se défi­nir comme fille à l’X. Ils dépeignent le dyna­misme de la vie des poly­tech­ni­ciennes, mais apportent plus de ques­tions que de réponses.

La vie des femmes au quotidien à l’X

Au quo­ti­dien, la vie des femmes à l’X res­semble à celle des mecs de l’X. Elles font du sport, vont en cours, au BôB. Pour tous, la vie à l’X est celle de plu­sieurs vies qui se suc­cèdent au cours de la journée. 

Décri­vons un mar­di typique. 

8 heures : j’enfile un maillot de bain, un jog­ging, des tongs. Je file à la pis­cine pour ne pas faire de pompes – qui sanc­tionnent de manière uni­sexe le moindre retard des étudiants. 

10 heures : je prends un peu plus de temps que mon cama­rade qui m’attend pour aller en cours d’anglais, car je dois me sécher les che­veux. Loin d’être un caprice fémi­nin, c’est essen­tiel pour ne pas attra­per froid. Je porte un che­mi­sier, un pan­ta­lon, des baskets.

“Au quotidien, la vie des femmes à l’X ressemble à celle des mecs de l’X.”

13 heures : direc­tion Magnan. Hommes et femmes se mélangent, s’attendent, patientent au stand végé­ta­rien. Une odeur com­mune de grillade émane de nos vête­ments. Elle pro­vient par­fois du BE, par­fois du Magnan. D’un pas déci­dé, nous nous ren­dons au BôB pour le tra­di­tion­nel kawa. Les femmes devant le BôB rient, fument, échangent, glissent, tombent, boivent, oublient. Mon amie reçoit sa pinte d’anniversaire à 13 h 30. Avec sa des­cente, la vider d’un trait ne serait pas un grand chal­lenge. Mais il est déjà 14 heures et nous devons aller en maths. 

18 heures : fin des cours. Je me change pour aller cou­rir : j’arbore fiè­re­ment le short de sport des pompiers. 

20 heures : c’est la cohue au BE et je meurs de faim. Je retrouve trois amis de la sec­tion pour cui­si­ner les poi­reaux de l’appro fraîche­ment arri­vée. Je porte une jupe et des bottes. 

23 heures : c’est mar­di, y’a BB. Je troque mon che­mi­sier contre un t‑shirt de soi­rée et mes bottes contre des bas­kets résis­tantes à la bière. Je retrouve mon amie dont c’est l’anniversaire. Elle porte son sweat BscK­BL noir de jais. Nous fes­toyons, chan­tons, dan­sons, oubliant lar­ge­ment si nous por­tons jupe ou pan­ta­lon, che­mi­sier ou sweat binet, bottes ou bas­kets déla­vées. Évi­dem­ment, les remarques peuvent fuser si l’une s’habille trop, ou pas assez. La vie des femmes à l’X res­semble aus­si à celle des femmes en dehors de l’X.

La question du vêtement

La tenue des femmes à l’X. La ques­tion des vête­ments, si elle est peu abor­dée au quo­ti­dien, res­sur­git à l’occasion du bal de l’X. Le vête­ment ren­voie à un ima­gi­naire. Le poly­tech­ni­cien est l’homme en GU, le Vaneau des bar­ri­cades, le sol­dat héroïque ou l’ingénieur des Mines. À quoi res­semble la poly­tech­ni­cienne ? Porte-t-elle un GU ou une robe rouge ? Je rédige cet article quelques jours après le bal d’octobre 2021. Mon télé­phone est plein de pho­tos de mes amis en GU et de mes amies en robe longue. Comme cer­taines X, je suis heu­reuse de por­ter une belle robe, de me maquiller, de me coif­fer pour une telle occa­sion. Cepen­dant, je me ques­tionne sur la per­ti­nence d’une robe civile pour les femmes et d’un uni­forme mili­taire pour les hommes. Seule une mino­ri­té de poly­tech­ni­ciennes portent leur GU le soir du bal. Le mot d’ordre est simple : cha­cune fait ce qu’elle veut. Mais ce choix reste ambi­gu – car il est sou­mis aux regards des autres et ren­voie aux débats sur le GU qui ne sont pas le sujet de cet article.

Et en cours ? 

La vie des femmes en cours. Sou­li­gnons que l’égalité femme-homme dans une école sous-entend d’abord l’égalité d’accès à l’éducation. Depuis cin­quante ans, les femmes peuvent entrer à l’École poly­tech­nique. Aujourd’hui, il n’existe aucune dis­cri­mi­na­tion offi­cielle dans le choix des études, ni de dis­cri­mi­na­tion en cours. L’accès à l’éducation est tota­le­ment décor­ré­lé du genre. Rap­pe­lons que cette éga­li­té acquise est le fruit d’un com­bat pas­sé (mais encore si proche) et que nous pou­vons heu­reu­se­ment la consi­dé­rer comme nor­male. L’École poly­tech­nique reste influen­cée par les ten­dances sociales et socié­tales, et les femmes sont sou­vent moins pré­sentes dans le domaine des sciences fon­da­men­tales. S’interroger sur la vie des femmes à l’X pousse à se deman­der pour­quoi il y a encore peu de femmes en sciences.

La vie des femmes en section à l’X

La vie des femmes en sec­tion est aus­si dyna­mique et cohé­sive que celle des hommes. Dans cer­taines sec­tions, il y a assez de femmes pour « oublier » le fait que nous sommes en mino­ri­té. Méca­ni­que­ment, si des sec­tions sont exclu­si­ve­ment mas­cu­lines, d’autres ont une pré­sence fémi­nine plus impor­tante. N’oublions pas que la pré­sence fémi­nine reste limi­tée – 840 en nata­tion. Dans les bars d’étage, j’oublie que je fais par­tie d’une mino­ri­té. Mais, lorsqu’on me le rap­pelle, que dois-je en pen­ser ? Com­ment l’ignorer ?

Les sections mixtes

Les crô­taux. Les sec­tions mixtes ont deux crô­taux, qui sont sou­vent un gar­çon et une fille. Cela doit per­mettre une repré­sen­ta­tion éga­li­taire. Or, dans cer­taines sec­tions, ce n’est pas le cas. En sec­tion nata­tion, nous choi­sis­sons de faire deux élec­tions : l’une pour une fille, l’autre pour un gar­çon. Évi­dem­ment, nous ne sommes que trois filles à nous pré­sen­ter, contre six mecs. Ai-je donc deux fois plus de chances de réus­sir que les hommes ? Je suis élue crô­tale : mais suis-je crô­ta­lette ? ou crô­tale des filles ? ou crô­tale-fille ? Aurais-je été élue si j’avais été un homme ? Ces ques­tions me taraudent, mais je pense qu’imposer, même arti­fi­ciel­le­ment, la repré­sen­ta­tion des femmes à l’X est essen­tielle. Il faut trou­ver des moyens de com­pen­sa­tion. Et le prin­cipe n’est pas tant remis en cause. Mais j’ignore com­ment se passe le quo­ti­dien dans des sec­tions où il y a encore moins de filles. 

Le cas de la section tennis

Deux filles. En sec­tion ten­nis par exemple, il n’y a que deux filles. Flo­rine Col­lin, X19, sec­tion ten­nis, témoigne : « Dans ces sec­tions, on sent quand même assez sou­vent que l’on est dans une sec­tion très mas­cu­line, que ce soit dans les conver­sa­tions que l’on peut entendre ou dans les com­por­te­ments col­lec­tifs. Ça peut être dif­fi­cile par moments, parce qu’on n’a pas for­cé­ment de sou­tien fémi­nin, mais pour autant ce ne doit pas être pour moi un obs­tacle à la pra­tique du sport que l’on veut. D’ailleurs, on demande tou­jours aux filles qui sont seules dans leur sec­tion à l’issue de la magouilleuse si elles veulent chan­ger de sec­tion, et on les y invite for­te­ment. Ce sen­ti­ment de mino­ri­té est néan­moins par­fois ren­for­cé par les cadres mêmes de la sec­tion. En ten­nis, au début de l’année der­nière, il n’était pas natu­rel pour le « coach » de faire jouer les filles avec les gar­çons, et non pas les deux filles tou­jours ensemble. Mais, comme cela sera men­tion­né, les filles à l’X sont sou­vent habi­tuées à être dans un monde majo­ri­tai­re­ment mas­cu­lin, ce qui apprend aus­si à ne pas prendre cela pour normal. »

Quel est le regard des hommes ? 

La ques­tion est aus­si de savoir quel regard portent les hommes en sec­tion sur leurs cama­rades. Syl­vain Del­gendre, X19, sec­tion vol­ley nous confie : « Dif­fi­cile pour moi d’évoquer la per­cep­tion qu’ont les femmes de leur vie en sec­tion, mais l’idée est sans doute ici d’étudier dans quelle mesure le regard mas­cu­lin coïn­cide avec celui des femmes.

Com­men­çons par déli­mi­ter le cadre : la vie « en sec­tion » est à com­prendre comme le temps que nous pas­sons sur le pla­tâl hors des cours, du sport et des soi­rées, avec pour épi­centre un bar d’étage. Aus­si faut-il y ajou­ter quelques moments de cohé­sion : sor­ties, VOS, week-end sec­tion, popotes et autres dîners. En vol­ley, je n’ai pas le sou­ve­nir d’une quel­conque scis­sion entre les genres, d’une dis­cus­sion qui aurait fron­ta­le­ment oppo­sé filles et gar­çons ou d’événement qui aurait révé­lé une diver­gence significative.

“La vie des femmes en section est aussi dynamique et cohésive que celle des hommes.”

En fait, c’est loin d’être le point de cli­vage ou le mar­queur d’identité prin­ci­pal dans nos acti­vi­tés et nos dis­cus­sions quo­ti­diennes. C’est peut-être vrai car je vis dans une sec­tion où le point de ten­sion le plus habi­tuel se concentre sur la nour­ri­ture et les régimes ali­men­taires de cha­cun mais, à mon sens, la sec­tion vol­ley consti­tue presque un idéal de mixi­té dans la mesure où la ques­tion a tou­jours été élu­dée dans les pro­blé­ma­tiques internes. Non pas par tabou mais parce que rien n’a jamais atten­té à l’équilibre qui m’a sem­blé natu­rel­le­ment atteint. Je n’ai été témoin d’aucune dérive indi­vi­duelle au sein de la sec­tion et j’ai acquis le sen­ti­ment d’être au contact d’une popu­la­tion suf­fi­sam­ment mûre et vigilante.

Au fond, je ne pense pas qu’il existe chez nous de malaise fémi­nin ou mas­cu­lin, car rien n’est fait, de mon point de vue, pour rame­ner une per­sonne à sa condi­tion de genre et la pla­cer dans une pos­ture pro­pice à dénon­cer une dis­cri­mi­na­tion selon ce critère. »

La vie des femmes en sport

En sport aus­si, on peut oublier aus­si que les femmes sont en mino­ri­té. Les femmes par­ti­cipent aux com­pé­ti­tions au même titre que les hommes. Diane Bon­nault, X19, sec­tion nata­tion, explique : « En nata­tion, j’oublie aus­si que je fais par­tie d’une mino­ri­té. Les filles font de la com­pé­ti­tion au même titre que les hommes. En sec­tion nata­tion, à l’entraînement, nous sommes répar­tis en fonc­tion de notre niveau, sans dis­cri­mi­na­tion entre filles et gar­çons. Ceux et celles de meilleur niveau peuvent par­ti­ci­per aux com­pé­ti­tions, où foi­sonnent l’esprit d’équipe et la bonne humeur. Pour être une équipe clas­sée, il est néces­saire d’avoir un cer­tain nombre de filles. Cer­taines pour­raient alors se sen­tir moins méri­tantes dans la mesure où l’on pour­rait les avoir sélec­tion­nées parce qu’elles sont des filles et non pour leur niveau ou moti­va­tion. Il est cer­tain qu’une telle situa­tion, direc­te­ment liée à la faible pro­por­tion de filles, est déli­cate. Cepen­dant, de telles filles pour­raient vite oublier ce sen­ti­ment de ne pas se sen­tir à sa place, grâce à la cohé­sion qui existe entre nageurs, et être fina­le­ment heu­reuses de par­ti­ci­per pour repré­sen­ter l’X. »

Le rugby et le foot

Le rug­by et le foot ne sont pas des sec­tions ouvertes aux filles en 2019. Il est ques­tion de les ouvrir aux filles l’année sui­vante. En atten­dant, les filles jouent au rug­by et au foot au sein de binets. Louise Per­rau­din, X19, sec­tion hand­ball, nous raconte : « J’ai com­men­cé le rug­by en pré­pa et j’ai tout de suite accro­ché à ce sport répu­té pour être un sport “mas­cu­lin” par sa vio­lence et sa qua­li­fi­ca­tion de sport de “bour­rin”. Ma grand-mère m’a dit : “Mais quelle idée de se mettre à ce sport ? Tu vas juste avoir des bleus par­tout.” En arri­vant à l’X, je n’ai pas eu accès à la sec­tion rug­by car elle n’était pas ouverte aux femmes. J’ai donc choi­si la sec­tion hand­ball pour tout de même pra­ti­quer un sport col­lec­tif de contact. Mais j’avais envie de conti­nuer le rug­by d’une manière ou d’une autre. Je me suis donc enga­gée dans le 7×7, l’association de rug­by fémi­nin de l’X. Aujourd’hui, je suis capi­taine de l’équipe de rug­by fémi­nin ras­sem­blant à la fois des mas­ters, des bache­lors et des filles du cycle ingé­nieur, ce qui per­met aus­si de ren­con­trer de nou­velles per­sonnes. Je m’épanouis plei­ne­ment chaque semaine à l’entraînement et j’essaye d’organiser des matchs ami­caux pour pou­voir faire aus­si un peu de com­pé­ti­tion. Nous sommes entraî­nées par les deuxième et troi­sième années de la sec­tion rug­by. Pour moi, le 7×7 a été un lieu de ren­contres avec les coachs et cela m’a per­mis de me rap­pro­cher de la sec­tion rug­by au quo­ti­dien, mais il est aus­si vrai qu’il est étrange de se faire coa­cher par des per­sonnes de sa propre pro­mo­tion, voire de la pro­mo­tion du des­sous. Il y a un sen­ti­ment de supé­rio­ri­té des coachs qui gêne et inti­mide cer­taines per­sonnes et qui les empêche de venir aux entraî­ne­ments et de pro­fi­ter du rug­by. Aujourd’hui nous ne pou­vons pas encore être inté­grées au cham­pion­nat uni­ver­si­taire et nous n’avons pas d’entraîneur qua­li­fié, mais l’ouverture aux filles de la sec­tion rug­by dans les pro­chaines années appor­te­ra sûre­ment des chan­ge­ments à ce niveau-là. » 

La vie des femmes en minorité à l’X

La vie asso­cia­tive. Au quo­ti­dien, il est encore pos­sible d’oublier que les femmes sont en mino­ri­té à l’X. Sur­tout, les filles sont pro­ba­ble­ment habi­tuées à évo­luer dans un monde dans lequel il y a une majo­ri­té de gar­çons – car c’est sou­vent une carac­té­ris­tique des classes pré­pa­ra­toires et des licences scien­ti­fiques. D’autre part, les femmes s’investissent dans la vie asso­cia­tive. Dans les binets dont je fais par­tie, les filles sont pré­sentes et leur pré­sence ne dérange pas – c’est bien nor­mal, mais sou­li­gnons-le tou­jours. Est-ce que les filles sont plus pré­sentes dans la vie asso­cia­tive ou sommes-nous sim­ple­ment habi­tuées à vivre en minorité ?

“Cependant, notre situation de minorité nous revient régulièrement à l’esprit.”

On oublie. Marie nous dit : « Si le chiffre du nombre de filles à l’X est constam­ment répé­té par l’École, par nos proches ou par nos cama­rades, par­fois on oublie qu’on occupe la place si par­ti­cu­lière de femme à l’X. On oublie parce que le che­min pour arri­ver jusqu’à l’École, pas­sant par la ter­mi­nale S et la pré­pa scien­ti­fique, est un che­min vers un monde de plus en plus mas­cu­lin. On oublie parce qu’en jean et sweat de sec­tion ou de binet, ou dans notre nou­vel uni­forme, les poly­tech­ni­ciens et les poly­techniciennes se mêlent et se res­semblent. On oublie aus­si parce que dans cer­taines sec­tions plus fémi­ni­sées, dans les binets, dans les soi­rées, on retrouve les mêmes visages fami­liers des autres filles de l’X. Enfin, on oublie parce qu’on a acquis les codes de ce monde où le sport, le mili­taire, la confiance en soi sont néces­saires pour s’intégrer. Faire par­tie de cette mino­ri­té est vécu de manière dif­fé­rente par cha­cune. Mais sou­vent on se rap­pelle qu’on en fait par­tie. En soi­rée par exemple, dans le flot des poly­tech­ni­ciens, on peut se sen­tir seule, avoir peur, et, si l’École et les élèves tra­vaillent à faire des évé­ne­ments à l’X des espaces sûrs, ce n’est pas encore gagné. Les tra­di­tions de l’École sont encore très mas­cu­lines ou viriles, mais l’élection de la pre­mière femme GénéK les remet en ques­tion ! Alors que dehors le fémi­nisme est dans toutes les dis­cus­sions, on se sent par­fois bien seule quand il faut expli­quer l’égalité, les déter­mi­nismes et le pla­fond de verre à sa sec­tion. Enfin, il est dif­fi­cile pour cer­taines de se retrou­ver entre filles, ce qui est par­fois néces­saire pour par­ler en toute confiance. »

Ce n’est pas si simple… 

Et pour­tant. Cepen­dant, notre situa­tion de mino­ri­té nous revient régu­liè­re­ment à l’esprit. Même en ten­tant de la mettre de côté, de vivre en l’ignorant, il est impos­sible de pas­ser à côté du sta­tut de « 17 % de poly­tech­ni­ciennes ». L’image qui nous est ren­voyée est ambi­guë. D’un côté, nous serions des proies « lâchées » dans des soi­rées com­po­sées à large majo­ri­té d’hommes, et au milieu de pro­blèmes de com­por­te­ment en situa­tion de mixi­té. D’un autre côté, nous serions des reines pou­vant « faire leur mar­ché » dans ces mêmes soi­rées, où la « concur­rence » n’est pas rude pour les femmes hété­ro­sexuelles… Si je vous cite aus­si crû­ment ces mots, c’est qu’ils nous rap­pellent quo­ti­dien­ne­ment cette situa­tion com­pli­quée de « fille à l’X ». Lorsque je demande à mes cama­rades de par­ler de la vie des femmes à l’X, les réponses ne fusent pas. Le sujet est vaste. La conver­sa­tion dérive sur le GU, sur la pos­si­bi­li­té d’une sec­tion rug­by mixte ou sur les pro­blèmes de har­cè­le­ment. Là-des­sus, c’est l’incompréhension qui règne : pour­quoi entend-on que la vie des filles à l’X est dif­fi­cile si toutes les filles que l’on ren­contre vont bien ? Plus géné­ra­le­ment, d’où vient le déca­lage entre le sou­rire des élèves sur les pho­tos et le mal-être qui res­sort ponc­tuel­le­ment ? Je n’ai pas la pré­ten­tion de par­ler au nom de la pro­mo­tion, ni de répondre à ces ques­tions. Mais je tente de trans­mettre ma joie d’être une « fille à l’X » en même temps que les inter­ro­ga­tions que ce sta­tut sou­lève. 


Glossaire d’argot polytechnicien

BB : Binet Binouze, asso­cia­tion d’élèves qui orga­nise les soi­rées du mar­di soir.

BE : Bar d’étage, c’est-à-dire espace cui­sine et salon des caserts (rési­dences étudiantes).

BôBar : Bar de l’École tenu par les élèves.

BscK­BL : Regrou­pe­ment de Binets impor­tants de la vie à l’X.

Crô­tale : Élève élu repré­sen­tant de sa sec­tion sportive.

GénéK : Chef de la Khô­miss (groupe d’élèves char­gé d’organiser les chahuts
à l’École).

GU : Grand Uni­forme polytechnicien.

Magnan : Res­tau­rant de l’École polytechnique.

Magouilleuse : Pro­gramme infor­ma­tique pour la répar­ti­tion des sec­tions sportives.

Pla­tâl : Désigne l’École sur le pla­teau de Palaiseau.

VOS : Voyage orga­ni­sé par la sec­tion, qui a lieu pen­dant les vacances
de la Toussaint.


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