Livré en 2019 à Strasbourg, Sensation est un complexe de logements et commerces bas carbone illustrant la démarche de décarbonation de Bouygues Immobilier.

Bouygues Immobilier : un acteur engagé de la décarbonation de l’immobilier

Dossier : Vie des entreprisesMagazine N°775 Mai 2022
Par Guillaume CARLIER

Guillaume Car­lier, direc­teur de la stra­té­gie cli­mat de Bouygues Immo­bi­lier, nous explique com­ment un acteur incon­tour­nable du monde de l’immobilier comme Bouygues Immo­bi­lier se mobi­lise en faveur de la décar­bo­na­tion et de la neu­tra­li­té car­bone. Rencontre.

Comment un acteur comme Bouygues Immobilier appréhende la question du climat ? 

Au sein du groupe Bouygues, nous sommes posi­tion­nés sur le métier de la pro­mo­tion immo­bi­lière qui couvre trois volets : l’aménagement ; la pro­mo­tion de loge­ments ; la pro­mo­tion de tertiaire. 

Au sein du groupe, la mise en place d’une stra­té­gie cli­mat est une démarche assez récente. D’abord appré­hen­dée au niveau de l’activité de construc­tion, elle l’est main­te­nant aus­si au niveau de la pro­mo­tion immo­bi­lière et sur l’ensemble du cycle de vie d’un pro­jet immo­bi­lier, depuis la recherche du fon­cier jusqu’à la fin de vie du bâti­ment en tant que tel. 

Plus particulièrement, comment s’articule votre stratégie bas carbone ? 

Dans cette démarche, nous allons au-delà de l’approche clas­sique qui consiste à décar­bo­ner notre acti­vi­té au m2 : d’abord, en déve­lop­pant les acti­vi­tés de réno­va­tion et de recon­ver­sion des ouvrages pour aug­men­ter leur durée de vie et limi­ter « le tout construc­tion neuve », et puis, par la limi­ta­tion de l’empreinte car­bone des uti­li­sa­teurs de nos pro­duits et ser­vices. Pour y par­ve­nir, nous misons sur une pro­po­si­tion de valeur qui va jus­te­ment per­mettre aux uti­li­sa­teurs, à l’échelle d’un bureau, d’un com­merce, d’un loge­ment et du quar­tier, de réduire son empreinte carbone. 

Nous explo­rons d’ores et déjà les enjeux d’adaptation au chan­ge­ment cli­ma­tique et de res­tau­ra­tion des fonciers.

« Bouygues Immobilier s’engage en tant qu’acteur sociétal de la décarbonation. »

Enfin, nous nous enga­geons auprès des dif­fé­rentes par­ties pre­nantes en tant qu’acteur socié­tal de la décar­bo­na­tion. Nous pre­nons part à de nom­breuses ini­tia­tives et sommes actifs dans de nom­breux groupes de tra­vail comme l’Association Bâti­ment Bas Car­bone, dont nous sommes membre fon­da­teur et mécène ; la Conven­tion des entre­prises pour le cli­mat, qui à l’instar de la Conven­tion citoyenne pour le cli­mat engage 150 diri­geants à mener une action volon­ta­riste et concrète en faveur de la tran­si­tion écologique.

Cette stra­té­gie de décar­bo­na­tion est, par ailleurs, un des vec­teurs de la trans­for­ma­tion du groupe. Au cours des der­nières décen­nies, le métier de la pro­mo­tion a connu de nom­breuses évo­lu­tions et doit faire face à de nou­veaux enjeux dont la dés­im­per­méa­bi­li­sa­tion et la non-arti­fi­cia­li­sa­tion des sols. Ces défis nous poussent à repen­ser notre acti­vi­té et notre busi­ness modèle de pro­mo­teur qui consistent de manière glo­bale à ache­ter du fon­cier, le construire pour le vendre au meilleur prix. Face aux fortes ambi­tions natio­nales en matière de neu­tra­li­té car­bone, les métiers de la pro­mo­tion et de la construc­tion immo­bi­lière sont doré­na­vant de for­mi­dables leviers au ser­vice de la décar­bo­na­tion de la pla­nète. 

Qu’en est-il en termes d’objectifs ?

Un pro­jet immo­bi­lier s’inscrit dans le temps long : entre l’achat du ter­rain, la concep­tion du pro­jet, sa construc­tion et sa livrai­son, il peut s’écouler jusqu’à 5 ans. Il est impé­ra­tif d’anticiper les pro­jets d’aménagement. En consé­quence, nos objec­tifs de décar­bo­na­tion et de neu­tra­li­té car­bone s’inscrivent dans ce temps long. Aujourd’hui, nous visons ‑32 % des émis­sions de gaz à effet de serre sur l’ensemble des scopes d’ici 2030 par rap­port à une réfé­rence que nous avons arrê­tée en 2020. Concrè­te­ment, en 2020, notre empreinte car­bone repré­sen­tait 1,5 tonnes de CO2 par m2. D’ici 2030, notre objec­tif est de des­cendre en-des­sous de 1 tonne. 

En paral­lèle, nous avons fixé un pre­mier jalon en 2025 dans la conti­nui­té de l’entrée en vigueur de la règle­men­ta­tion RE2020. Nous sou­hai­tons ain­si que nos pro­jets soient sys­té­ma­ti­que­ment asso­ciés à du bois, du béton bas car­bone, des maté­riaux bio­sour­cés, géo­sour­cés ou recy­clés afin d’aller vers un mode de construc­tion de plus en plus décar­bo­né. Dans ce cadre, Bouygues Immo­bi­lier anti­cipe même la règle­men­ta­tion avec cette volon­té de sor­tir des loge­ments en avance de phase sur les seuils règle­men­taires dès fin 2022, pour les atteindre plei­ne­ment d’ici 2025. 

L’ambition de ces objec­tifs sera revue en 2022 pour s’inscrire dans la tra­jec­toire des Accords de Paris vali­dée au tra­vers d’un enga­ge­ment de Bouygues Immo­bi­lier dans l’initiative Science Based Target.

Dans cette démarche, quels sont les enjeux qui persistent ?

La lutte contre le chan­ge­ment cli­ma­tique et la réduc­tion des émis­sions de gaz à effet de serre sont un com­bat col­lec­tif, notam­ment au niveau des entre­prises, mais éga­le­ment indi­vi­duel au niveau des uti­li­sa­teurs de pro­duits et de ser­vices. Conscient de cet enjeu, Bouygues Immo­bi­lier a fait le choix de se doter d’une direc­tion du cli­mat dont une des mis­sions est jus­te­ment de sen­si­bi­li­ser et d’informer nos col­la­bo­ra­teurs sur ces thé­ma­tiques et problématiques. 

Nous avons ain­si lan­cé des cam­pagnes de for­ma­tion et mis en place des modules spé­ci­fiques. Plus de 90 % de nos col­la­bo­ra­teurs, quel que soit leur métier, ont sui­vi ces for­ma­tions. Et l’ensemble des nou­veaux employés sui­vront éga­le­ment ce pro­gramme de for­ma­tion qui portent sur des notions clés comme le car­bone, son impact sur nos métiers, la règle­men­ta­tion RE2020… Ce tra­vail de péda­go­gie nous per­met de les sen­si­bi­li­ser à ces ques­tions, mais aus­si de poser les bases pour conti­nuer nos efforts en termes d’atténuation et d’adaptation, car le monde de l’immobilier n’était pas for­cé­ment prêt à bas­cu­ler dans cette décar­bo­na­tion impo­sée par la règle­men­ta­tion RE2020.

« Le monde de l’immobilier n’était pas forcément prêt à basculer dans la décarbonation imposée par la règlementation RE2020. »

Cette réa­li­té a été ren­for­cée par un contexte inédit mar­qué par la pan­dé­mie, la pénu­rie de matières pre­mières, les dif­fi­cul­tés d’approvisionnement… Aujourd’hui, l’ensemble de la pro­fes­sion se mobi­lise et nous assis­tons non seule­ment à une véri­table mon­tée en com­pé­tence des dif­fé­rentes par­ties pre­nantes, mais éga­le­ment à un engoue­ment pour ces sujets qui donne une nou­velle dyna­mique au marché.

Un autre enjeu qu’il est impor­tant de prendre en compte est celui rela­tif au prix et à la pres­sion sur les fon­ciers et la construc­tion. Aujourd’hui, en effet, s’il y a une prise de conscience autour de l’urgence de la situa­tion, tout le monde n’est pas prêt à payer plus pour accé­lé­rer la décar­bo­na­tion du sec­teur. Des solu­tions doivent encore être trou­vées pour lever ce frein. 

Quelles pistes de réflexion pourriez-vous partager avec nos lecteurs sur cette thématique ?

J’invite tous les lec­teurs à prendre connais­sance des tra­vaux du think tank, The Shift Pro­ject, de Jean-Marc Jan­co­vi­ci (81) avec le Plan de décar­bo­na­tion de L’économie fran­çaise (PTEF) qui consti­tue le socle pour tra­vailler sur ces sujets. 

Les tra­vaux réa­li­sés sur le loge­ment et l’industrie cimen­tière sont dis­po­nibles et offrent de nom­breuses pistes de réflexion per­ti­nentes pour tous ceux qui s’intéressent à ces enjeux et problématiques. 

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