Choose Paris Region : technocentre Renault

Choose Paris Region : faire de l’Île-de-France l’une des premières régions d’innovation au monde

Dossier : OIN Paris-SaclayMagazine N°774 Avril 2022
Par Lionel GROTTO (2005)
Par Ulysse HENNEBELLE (2020)
Par Jean-Baptiste TARDIEU (2020)

Choose Paris Region est l’agence de pro­mo­tion et d’attractivité inter­na­tio­nale de la région Île-de-France. Pour son direc­teur géné­ral Lio­nel Grot­to (2005), l’ouverture à la diver­si­té des par­cours, l’échange entre les cur­sus et la ren­contre avec les indus­triels et les incu­ba­teurs sont les élé­ments clés de la réus­site de l’innovation et du déve­lop­pe­ment de Paris-Saclay et de toute la région.

Pourriez-vous présenter votre parcours ? 

Arri­vé à l’X, j’avais à cœur de ser­vir l’intérêt géné­ral. Cela m’a pous­sé vers le corps des Mines. Après des pre­miers postes dans l’énergie et les télé­com­mu­ni­ca­tions, je me suis inté­res­sé au déve­lop­pe­ment éco­no­mique des ter­ri­toires. Ce sujet mécon­nu mais essen­tiel est à la fron­tière entre l’innovation, le déve­lop­pe­ment durable et le quo­ti­dien des entre­prises et des habi­tants. J’ai d’abord rejoint le cabi­net de Valé­rie Pécresse à la région en 2016, avant de prendre la direc­tion de Choose Paris Region.

Quel est le rôle de Choose Paris Region ? 

L’agence Choose Paris Region compte 90 per­sonnes, avec des bureaux en Chine et aux États-Unis. Nous sommes à l’interface entre les sec­teurs public et pri­vé. Sont notam­ment membres de l’association le conseil régio­nal, de grandes inter­com­mu­na­li­tés, des grandes entre­prises fran­çaises et étran­gères, mais aus­si des acteurs aca­dé­miques comme l’École poly­tech­nique. Notre rôle est de faci­li­ter le déve­lop­pe­ment des entre­prises inter­na­tio­nales en Île-de-France. Notre stra­té­gie : cap­ter les inno­va­tions inter­na­tio­nales pour ser­vir les poli­tiques publiques, par exemple en matière de tran­si­tion éco­lo­gique, de mobi­li­té ou encore de logis­tique durable. Nous orga­ni­sons ain­si plus de 1 000 ren­contres qua­li­fiées chaque année entre des grands groupes fran­çais et des start-up inter­na­tio­nales. Nous avons éga­le­ment lan­cé en 2020 un appel à mani­fes­ta­tion d’intérêt inter­na­tio­nal sur la mobi­li­té aérienne. Les cen­taines de réponses d’entreprises et grou­pe­ments fran­çais et inter­na­tio­naux nous ont per­mis de posi­tion­ner Paris sur la carte de cette filière en fort développement.


Repères

Choose Paris Region est l’agence d’attractivité inter­na­tio­nale et ciné­ma­to­gra­phique de la région Île-de-France. Elle tra­vaille en par­te­na­riat avec tous les acteurs du ter­ri­toire fran­ci­lien pour construire l’offre ter­ri­to­riale, assu­rer sa pro­mo­tion et offrir un ser­vice d’accompagnement sur mesure aux entre­prises inter­na­tio­nales et aux pro­fes­sion­nels de la filière image. Elle est un cata­ly­seur d’affaires et d’innovation qui accom­pagne les entre­prises inter­na­tio­nales dans leur déve­lop­pe­ment en Île-de-France. L’agence conjugue son exper­tise du mar­ché et son réseau local pour aider chaque année plus de 1 400 entre­prises inter­na­tio­nales à construire des par­te­na­riats tech­no­lo­giques et d’affaires, à éla­bo­rer leur stra­té­gie de crois­sance en Île-de-France, que ce soit pour une pre­mière implan­ta­tion locale ou pour déve­lop­per leur acti­vi­té existante.
À tra­vers son équipe Film Paris Region, l’agence accom­pagne les pro­fes­sion­nels fran­çais et inter­na­tio­naux de la filière image dans leurs pro­jets en Île-de-France. À ce titre, elle est impli­quée dans l’animation de l’écosystème fran­ci­lien, le réfé­ren­ce­ment de l’offre fran­ci­lienne, la pro­mo­tion inter­na­tio­nale de la filière et l’accompagnement de plus de 400 pro­duc­tions ciné­ma­to­gra­phiques et audio­vi­suelles chaque année. Avec ses 90 col­la­bo­ra­teurs en Europe, aux États-Unis et en Chine, Choose Paris Region vise à faire de l’Île-de-France l’une des pre­mières régions au monde en termes d’activité éco­no­mique, d’innovation et de pro­duc­tion d’images.


L’Île-de-France souffre-t-elle d’un manque d’attractivité, pour avoir besoin d’une agence ? 

Toutes les grandes régions mon­diales ont des agences simi­laires. Le monde des agences de déve­lop­pe­ment est assez mal connu et doit être davan­tage défen­du. Nous per­met­tons aux col­lec­ti­vi­tés d’accompagner et de sim­pli­fier l’implantation des entre­prises. Face à la concur­rence mon­diale, nous jouons un rôle stra­té­gique pour atti­rer les entre­prises et les talents les plus mobiles.

Quels sont les atouts et les défauts du plateau de Saclay dans le jeu de l’attractivité internationale ? 

Dans les années 70, seuls quelques labo­ra­toires publics étaient pré­sents sur le pla­teau ! Aujourd’hui, il est clair que la dyna­mique autour du pla­teau n’est pas uni­que­ment impo­sée par l’État fran­çais. Nous fai­sons par­tie des huit hubs majeurs de la pla­nète pour la recherche et l’innovation. Le clas­se­ment de l’Université Paris-Saclay dans le clas­se­ment de Shan­ghai (n° 1 en mathé­ma­tiques) a fait la une de la presse anglo-saxonne et a donc posi­tion­né encore davan­tage Saclay à l’international. De plus en plus de pro­jets mobiles sont gagnés sur le pla­teau. Ce ne sont pas moins de 67 entre­prises inter­na­tio­nales que nous avons accom­pa­gnées dans leur implan­ta­tion entre 2017 et 2020, ce qui repré­sente 2 300 emplois. Par­mi celles-ci, des grandes entre­prises mais aus­si des start-up très inno­vantes. L’interdisciplinarité est une grande force : san­té, éner­gie, aéro­spa­tiale, défense, numérique…

La recherche du pla­teau est cepen­dant frag­men­tée en un tis­su de petits labo­ra­toires ; c’est notre rôle d’en assu­rer la lisi­bi­li­té. Enfin, les écoles com­plètent l’excellence du pôle. Le pro­jet de centre d’IA du japo­nais Fujit­su, qu’on peut voir dans le pré­sent dos­sier, était sou­mis à une concur­rence très forte et était inter­na­tio­na­le­ment mobile sur tous les conti­nents. C’est notam­ment le rayon­ne­ment uni­ver­si­taire et l’excellence des ingé­nieurs fran­çais qui ont fait por­ter le choix de l’entreprise sur Saclay.

“Nous faisons partie des huit hubs majeurs
de la planète pour la recherche et l’innovation.”

Quel est le rôle des cycles ingénieur dans le développement du plateau ? 

Depuis mon départ, l’X s’est beau­coup ouverte : élèves inter­na­tio­naux de l’X (EIX), filière uni­ver­si­taire fran­çaise (FUF), mas­ters, bache­lors. Il faut conti­nuer sur cette voie. La richesse d’un éco­sys­tème pro­vient des inter­ac­tions entre les dif­fé­rentes par­ties. Per­mettre l’échange entre les cur­sus, avec les indus­triels et incu­ba­teurs, sera la clé de l’innovation et per­met­tra à l’X non seule­ment de contri­buer tou­jours plus à la visi­bi­li­té du pla­teau, mais aus­si de ren­for­cer le niveau de sa formation.

Quelle est votre lecture de séparation entre l’X et l’UPS et de la création d’IP Paris ? 

Vous savez, à Madrid il y a le Real Madrid et l’Atlético… Blague à part, je ne pense pas que la rup­ture soit un point cri­tique pour le pla­teau. De mon point de vue d’observateur, elle a per­mis de déblo­quer une situa­tion. Ce qui compte, ce sont les hommes der­rière les struc­tures et la volon­té réelle de coopé­ra­tion et d’ouverture, les struc­tures ne font pas tout.

Quels projets actuels permettront de réveiller… euh… révéler le plateau à l’avenir ?

Quel lap­sus ! Les élèves ont-ils une si mau­vaise image du plateau ?

Il est vrai que beaucoup d’élèves à l’X déplorent parfois l’ouverture que vous défendez… 

C’est jus­te­ment pour cela que j’oriente ain­si l’interview. C’est une erreur stra­té­gique de pen­ser que la fer­me­ture est une force. Aujourd’hui, le concept de pres­tige est com­plè­te­ment dépas­sé et l’innovation vien­dra de la diver­si­té. Si nous vou­lons des belles start-up, elles vien­dront de la ren­contre de dif­fé­rentes écoles, de dif­fé­rents pays, de dif­fé­rents back­grounds cultu­rels, scien­ti­fiques et non scien­ti­fiques… Pour reve­nir à votre ques­tion sur les grands pro­jets, le Grand Paris a pris du retard sur son réseau de trans­port vers les péri­phé­ries, qui aurait pu démar­rer dès les années 1990. Aujourd’hui, il est dif­fi­cile de vendre Saclay comme un hub connec­té à la capi­tale. Ce pro­jet doit être prio­ri­sé par les can­di­dats aux pré­si­den­tielles ; c’est un pro­jet pour la capi­tale, mais aus­si pour le pays. Les arri­vées du lycée inter­na­tio­nal et d’un hôpi­tal sont aus­si une clé de déve­lop­pe­ment du plateau.

On entend souvent parler de « MIT à la française » quand on évoque le plateau. Aujourd’hui peut-on se projeter comme tel sans accueillir des leaders de l’innovation comme les Gafa ? 

C’est vrai que la France n’est pas en avance sur le Busi­ness to Consu­mer (B2C) numé­rique. Cepen­dant, nous sommes bien posi­tion­nés sur le Busi­ness to Busi­ness (B2B). Le fort inves­tis­se­ment d’IBM sur l’IA, fon­dé sur les par­te­na­riats avec des entre­prises fran­çaises, s’insère très bien dans l’écosystème mul­ti­dis­ci­pli­naire du pla­teau. Les centres d’Ericsson et de Fujit­su montrent éga­le­ment le fort dyna­misme numé­rique du pla­teau sur le B2B. Les Gafa ne sont pas vrai­ment la cible pour Saclay, il ne faut pas dire que ne pas les atti­rer est un échec.

“L’innovation viendra de la diversité.”

D’accord, le plateau de Saclay est très moteur. Mais cela se fait-il au détriment d’autres régions du territoire national ? 

Saclay repré­sente 15 % de la recherche fran­çaise. C’est loin de la majo­ri­té. Cela ne cor­res­pond pas de toute façon à la volon­té de l’État fran­çais. En véri­té, les dif­fé­rents clus­ters fran­çais sont com­plé­men­taires. Le pla­teau est concen­tré sur la recherche même s’il pour­rait, je pense, déve­lop­per davan­tage la com­po­sante indus­trielle. Les mul­ti-implan­ta­tions sont cou­rantes : LVMH, qui inves­tit sur le pla­teau, pos­sède beau­coup d’usines de pointe dans le Centre-Val de Loire. Les entre­prises recherchent un accom­pa­gne­ment per­son­na­li­sé et les hubs fran­çais, voire euro­péens, doivent tra­vailler ensemble pour offrir des solu­tions adap­tées aux grands défis de notre temps. Là non plus, nous n’y arri­ve­rons pas seuls, et seule l’ouverture appor­te­ra les solutions.

En parlant d’Europe, justement, seule une faible fraction des étudiants étrangers à IP Paris ou UPS sont européens. Qu’en est-il du projet européen pour les entreprises ? 

Regar­dons les chiffres. Actuel­le­ment, nous accompa­gnons 1 700 pro­jets pou­vant créer jusqu’à 45 000 emplois poten­tiels. Les sources de ces emplois sont, dans l’ordre : les États-Unis, le Royaume-Uni, l’Allemagne, les Pays-Bas, la Chine, l’Italie, la Suède… L’Europe est clai­re­ment une source majeure d’innovations et de pro­jets, au même niveau que les États-Unis. Nos prio­ri­tés stra­té­giques pour 2022 sont d’ailleurs le Royaume-Uni et l’Allemagne. Pour vous répondre, je pense donc en effet que les échanges euro­péens dans l’enseignement supé­rieur sont impor­tants pour le déve­lop­pe­ment de l’UE.

Dernière question : en tant qu’ancien X avez-vous une certaine nostalgie face aux changements du campus ? 

Mes années à l’X ont été très mar­quantes. J’espère que l’École va conti­nuer à s’ouvrir, ce qui se passe autour repré­sente une oppor­tu­ni­té incroyable. On voit sur­tout des grues, mais c’est assez enthou­sias­mant ! J’encourage les élèves à visi­ter le ter­ri­toire pour voir ce qui se fait autour. Je ne l’avais moi-même pas assez fait…

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