La République pour Tous

La République pour tous

Dossier : Arts, lettres et sciencesMagazine N°769 Novembre 2021Par : Erik Egnell (57)Rédacteur : Christian Mégrelis (57)Editeur : Éditions Cyrano, juillet 2021

Avec son élé­gance natu­relle, Erik Egnell nous aide à retrou­ver un des textes fon­da­teurs de ce que l’on nomme la « science » poli­tique, un de ceux qu’on nous a appris à lire à genoux, ce que plu­sieurs ont trou­vé fati­gant : La Répu­blique, de Platon.

C’est l’histoire d’une soi­rée au Pirée, voi­ci 2 440 ans. La mise en scène des copains de la « bande à Socrate » nous per­met de mesu­rer le magis­tère qu’exerçait l’ancien com­bat­tant de Poti­dée sur Pla­ton et ses deux frères. Même sa cri­tique injus­ti­fiée d’Homère n’élève pas la moindre objection !

Le thème cen­tral de la jus­tice est par­fai­te­ment maî­tri­sé par Erik. Autour de ce prin­cipe, et avant de nous assé­ner la démons­tra­tion « mathé­ma­tique » que le tyran est 729 fois plus mal­heu­reux que le monarque, il décrit, avec Pla­ton, les cinq régimes types : monar­chie, timo­cra­tie, oli­gar­chie, démo­cra­tie et tyran­nie dans les­quels le chef d’État doit être phi­lo­sophe. Le pro­blème, c’est qu’aucun de ces régimes n’est éter­nel et que tous sont ame­nés à se cor­rompre pour don­ner place au sui­vant. Ce qui nous touche de plus près est la manière dont la démo­cra­tie, née de la dégé­né­res­cence de l’oligarchie, va inexo­ra­ble­ment se muer en tyran­nie sous la pres­sion de la liber­té abso­lue. À méditer.

La socié­té pla­to­ni­cienne idéale est clas­si­fiée en citoyens, gar­diens et phi­lo­sophes. Les poètes, eux, doivent être exclus de la Cité. Aux pre­miers l’économie, aux seconds la guerre et la ges­tion, et aux phi­lo­sophes, seuls for­més à la dia­lec­tique mais contraints au Pha­lan­stère, le gou­ver­ne­ment de la Cité. Après avoir vu la lumière à la sor­tie de la caverne, ils revien­dront la décrire à leurs pauvres conci­toyens res­tés dans le noir. L’auteur aurait dû nous rap­pe­ler, dans son style inimi­table, les résul­tats pitoyables des trois mis­sions de Pla­ton à Syra­cuse pour faire de trois tyrans trois philosophes…

Mais « Pla­ton ne joue pas en deuxième divi­sion » (Gis­card d’Estaing 44)…

Tra­duc­tion très élé­gante d’un livre éternel.
À lire absolument.

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