Export du Rafale à l’Inde.

« Il est impératif d’entretenir notre vitalité industrielle »

Dossier : Défense & souverainetéMagazine N°769 Novembre 2021
Par Joël BARRE (74)

L’avenir de notre sys­tème de défense repose sur l’anticipation tech­no­lo­gique et capa­ci­taire, tout autant que sur la pré­ser­va­tion d’une base indus­trielle sou­ve­raine et pérenne. Le DGA nous livre sa stra­té­gie en la matière.

Par­mi les mis­sions confiées à la DGA, la pré­pa­ra­tion de l’avenir des sys­tèmes de défense néces­site d’imaginer les pos­sibles, face aux menaces en constante évo­lu­tion. L’avenir se pré­pare en pre­nant en compte le long terme et le court terme afin d’éviter toute sur­prise stra­té­gique ou déclas­se­ment tech­no­lo­gique. L’avenir se pré­pare aus­si par le ren­for­ce­ment d’une base indus­trielle et tech­no­lo­gique de défense à l’échelle euro­péenne, pour garan­tir la sécu­ri­té des appro­vi­sion­ne­ments stra­té­giques et la souveraineté. 

Innover pour conserver la supériorité technologique

L’une des prin­ci­pales mis­sions de la DGA est d’équiper les armées de manière sou­ve­raine en déve­lop­pant des sys­tèmes d’armes répon­dant à leurs besoins pour exer­cer leurs opé­ra­tions aujourd’hui et dans les décen­nies à venir. Ces équi­pe­ments doivent leur garan­tir la sécu­ri­té et le meilleur niveau tech­no­lo­gique pour per­mettre leur supé­rio­ri­té opé­ra­tion­nelle, dans un modèle éco­no­mique sou­te­nable. Ils doivent aus­si per­mettre à la France de conser­ver son indé­pen­dance ain­si que son auto­no­mie d’appréciation et de décision. 

La DGA est ouverte aux nou­velles tech­no­lo­gies et sus­cite l’innovation sous tous ses aspects. Elle sou­tient l’industrie de défense, les grands maîtres d’œuvre comme les PME et start-up, et déve­loppe la coopé­ra­tion avec ses par­te­naires euro­péens. L’innovation en matière de défense s’inscrit à la fois dans le temps long, pour pré­pa­rer des inves­tis­se­ments struc­tu­rants, anti­ci­per les rup­tures tech­no­lo­giques ou s’assurer de la maî­trise des tech­no­lo­gies émer­gentes à carac­tère stra­té­gique, et dans le temps court, pour cap­ter rapi­de­ment l’innovation issue du mar­ché civil et des armées, direc­tions et ser­vices via les actions menées par l’Agence de l’innovation de défense (AID).


REPÈRES

La direc­tion géné­rale de l’armement (DGA), diri­gée par un délé­gué géné­ral pour l’armement, a été créée le 5 avril 1961 par le géné­ral de Gaulle, pré­sident de la Répu­blique, pour doter la France de la force de dis­sua­sion nucléaire. Depuis soixante ans, la DGA conduit l’ensemble des pro­grammes d’armement afin de per­mettre au pays de dis­po­ser d’un modèle d’armée com­plet, garan­tis­sant aux armées leur supé­rio­ri­té tech­no­lo­gique, tout en veillant à l’utilisation effi­ciente des deniers de l’État.


Concevoir globalement pour conserver la supériorité opérationnelle

La DGA fait évo­luer conti­nû­ment ses outils et ses méthodes d’ingénierie et de conduite des opé­ra­tions d’armement pour favo­ri­ser la coopé­ra­tion avec les armées et l’industrie et per­mettre d’accélérer les cycles de concep­tion et de déve­lop­pe­ment des pro­grammes. Pour l’équipement des forces, la supé­rio­ri­té opé­ra­tion­nelle pro­vient certes du niveau tech­no­lo­gique de chaque sys­tème d’armes mais aus­si d’une concep­tion d’ensemble leur per­met­tant de conju­guer leurs forces indi­vi­duelles dans une puis­sance collective.

Face à des menaces de plus en plus diver­si­fiées, la DGA doit conce­voir glo­ba­le­ment le sys­tème de défense de la France à l’échelle de capa­ci­tés, comme la capa­ci­té de com­bat aérien, plu­tôt que pro­gramme par pro­gramme ; cela afin de favo­ri­ser à la fois l’introduction d’innovations et la cohé­rence de bout en bout des dif­fé­rents effets mili­taires. Cette approche capa­ci­taire implique un tra­vail col­la­bo­ra­tif d’analyse des besoins et scé­na­rios opé­ra­tion­nels pour défi­nir les meilleures solu­tions tech­niques. Il est conduit conjoin­te­ment par la DGA et l’état-major des armées (EMA) ; il s’est tra­duit concrè­te­ment par le rap­pro­che­ment des équipes de l’EMA et de la DGA et par la consti­tu­tion de pla­teaux de tra­vail col­la­bo­ra­tif, y com­pris avec la par­ti­ci­pa­tion de l’industrie.

Coopérer avec nos partenaires à l’échelle européenne

La coopé­ra­tion euro­péenne est en plein déve­lop­pe­ment. Le Pré­sident de la Répu­blique s’est expri­mé sur ce sujet dans la revue des ingé­nieurs de l’armement d’octobre 2020 : « Une sécu­ri­té ne peut être plei­ne­ment effi­cace que si elle est arri­mée à un pro­jet com­mun de coopé­ra­tion avec nos par­te­naires euro­péens. » Ain­si, pour équi­per les armées fran­çaises et déve­lop­per une auto­no­mie euro­péenne dans les domaines stra­té­giques, nous comp­tons aus­si sur les pro­grammes d’armement en coopé­ra­tion. Que ce soit dans des for­mats bila­té­raux-mul­ti­la­té­raux ou au tra­vers de l’Union euro­péenne, la France contri­bue acti­ve­ment à construire une Europe de la défense plus forte. 

La décli­nai­son de l’Europe de la défense en Europe de l’armement se tra­duit par la conduite de pro­grammes en coopé­ra­tion, visant à répondre à la fois aux besoins des forces armées fran­çaises et de celles des par­te­naires. À l’exception de domaines sou­ve­rains comme la dis­sua­sion, la France explore désor­mais systématique­ment la piste d’une coopé­ra­tion euro­péenne au moment de lan­cer une opé­ra­tion d’armement nou­velle. Nous n’avons pas moins de onze grands pro­grammes en coopé­ra­tion, dans tous les domaines : ter­restre, naval, aérien ou spatial.

“Explorer systématiquement la coopération européenne au lancement
d’une opération d’armement nouvelle.”

La DGA est éga­le­ment plei­ne­ment impli­quée dans les ini­tia­tives récentes lan­cées par l’Union euro­péenne dans le domaine de l’armement : d’une part, la coopé­ra­tion struc­tu­rée per­ma­nente (CSP) per­met­tant de faire émer­ger de grands pro­jets fédé­ra­teurs des­ti­nés à répondre aux besoins des armées euro­péennes et, d’autre part, les pro­grammes de défense avec le Fonds euro­péen de défense (FEDef). Le FEDef, qui s’étendra sur la période 2021–2027 avec une enve­loppe de 8 Md€, per­met­tra de sti­mu­ler les inves­tis­se­ments en R & D et déve­lop­pe­ments capa­ci­taires dans l’ensemble des États membres. Des pro­jets ambi­tieux y sont por­tés par la France, comme un pro­jet qui vise à ren­for­cer la sécu­ri­té d’approvisionnement de l’Europe pour les maté­riaux et com­po­sants des­ti­nés aux sys­tèmes d’armes.

Exporter pour garantir l’équilibre financier de notre modèle industriel

La poli­tique d’exportation de la France contri­bue éga­le­ment plei­ne­ment au sou­tien de notre indus­trie et au main­tien d’équilibre d’un modèle sou­te­nable pour l’État. Elle s’appuie sur la mise en place de par­te­na­riats de défense, qui visent à répondre aux besoins légi­times de défense des États par­te­naires, dans un cadre mutuel­le­ment avan­ta­geux, et qui reposent sur une rela­tion de confiance, bien au-delà de la stricte dimen­sion com­mer­ciale. La DGA prend toute sa part dans le déve­lop­pe­ment et l’entretien de ce réseau de par­te­naires, en main­te­nant une rela­tion per­ma­nente avec eux. Elle s’appuie pour cela sur un vaste réseau d’experts déta­chés en ambas­sades à tra­vers le monde. 

Grâce à son posi­tion­ne­ment clé entre le pays client, le sec­teur indus­triel et les armées, la DGA joue un rôle pri­mor­dial tant en amont des contrats que dans le cadre de leur exé­cu­tion. Dans la pers­pec­tive d’une concur­rence plus sou­te­nue et d’une volon­té des États de pri­vi­lé­gier leur propre indus­trie dans le contexte de relance post-crise sani­taire, la DGA doit répondre à une demande accrue de trans­ferts de tech­no­lo­gie et de pro­duc­tion de la part des par­te­naires. Ses exper­tises tech­nique et stra­té­gique sont des atouts indé­niables pour juger de la réponse pos­sible à de telles demandes. 

La sou­ve­rai­ne­té est l’un des fon­de­ments de notre défense et de notre sécu­ri­té natio­nale. La DGA s’appuie aujourd’hui sur une base indus­trielle et tech­no­lo­gique de défense (BITD) forte et com­pé­ti­tive, qui regroupe une dizaine de grands groupes avec des cham­pions natio­naux, plus de 4 000 PME, ce qui repré­sente 200 000 emplois en France. Il est impé­ra­tif d’entretenir cette vita­li­té indus­trielle pour garan­tir aux armées, dans la durée, l’accès à des équi­pe­ments au meilleur niveau tech­no­lo­gique et aux meilleurs stan­dards internationaux. 

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