A polytechnique X 1901

Petit-déjeuner polytechnicien avec les X1901

Dossier : Vie de l'associationMagazine N°764 Avril 2021
Par Serge DELWASSE (X86)

L’AX nous avait vir­tuel­le­ment conviés à un petit-déjeu­ner nos­tal­gie autour du livre À Poly­tech­nique – X1901, ani­mé magis­tra­le­ment par Laurent Billès-Gara­bé­dian. Il ne man­quait que les crois­sants de la Mai­son des X, notre made­leine à tous.

L’idée d’origine de l’auteur, Her­vé Joly, his­to­rien et direc­teur de recherche au CNRS, était de suivre la car­rière des cocons de la pro­mo 1901. Une pro­mo prise au hasard – ou presque, ladite pro­mo ayant deux carac­té­ris­tiques majeures : celle de ne pas avoir de grande figure et celle, bien sûr, d’être la pre­mière du siècle. Au cours de cette pré­sen­ta­tion, il s’est en par­ti­cu­lier concen­tré sur la pre­mière par­tie du livre, celle qui décrit le recru­te­ment, le concours et la sco­la­ri­té. Puis notre cama­rade Antoine Com­pa­gnon (70), pro­fes­seur au Col­lège de France, auteur de la pré­face, a remis cette ana­lyse dans une pers­pec­tive his­to­rique, en insis­tant sur un cer­tain nombre d’invariants entre la pro­mo­tion 1901 et la pro­mo 1970, et en posant une ques­tion toute simple : 180 X par an en 1901. Com­bien en 2021 ? Un tour de table (ah, quel plai­sir que la vir­tua­li­té…) a per­mis à Éric Labaye et Mar­wan Lahoud de (ten­ter de) répondre à la ques­tion de Com­pa­gnon en intro­dui­sant l’IPParis et d’aborder la ques­tion de la diver­si­té du recru­te­ment. Les échanges avec la « salle » se sont pour­sui­vis par les ques­tions, le chat mes­sage à tous, voire les mes­sages pri­vés ou les SMS. Bref, il ne man­quait que les crois­sants de la Mai­son des X…

Une vision large à partir d’une promo particulière

Qu’il me soit per­mis de pro­fi­ter de ce compte ren­du pour vous livrer une ana­lyse cri­tique du livre d’Hervé Joly. Ce livre est une thèse uni­ver­si­taire. La lec­ture n’en est pas dif­fi­cile pour autant ; les réfé­rences, nom­breuses, et le sou­ci du détail, per­ma­nent, emportent la convic­tion du lec­teur sans jamais le décou­ra­ger. Les sources avaient une cer­taine séche­resse – et c’est bien nor­mal pour un ouvrage de recherche : les archives de l’École, les dos­siers mili­taires, les dos­siers admi­nis­tra­tifs. Le titre de l’ouvrage est par ailleurs modeste ; en fait il ne s’agit pas seule­ment d’une ana­lyse lon­gi­tu­di­nale – le sui­vi des car­rières des 180 X de la pro­mo 1901. En effet, outre la pre­mière par­tie qui décrit le concours, la sco­la­ri­té et la vie à l’école, l’auteur dans une deuxième par­tie fait une ana­lyse détaillée de la socio­lo­gie à l’entrée. Ces trois dimen­sions donnent ain­si du volume au tra­vail réa­li­sé. Le second mérite de l’auteur est de s’être inté­res­sé aux ano­nymes, approche com­plé­men­taire de celle de Chris­tian Mar­bach, par exemple, dans ses Por­traits de Polytechniciens.

Les particularités de la culture polytechnicienne

Le remar­quable tra­vail réa­li­sé était contraint par deux limites. La pre­mière tient au choix des sources. Par construc­tion, on ne peut par­ler que de ceux dont le dos­sier admi­nis­tra­tif ou mili­taire fait montre d’une cer­taine épais­seur. L’auteur passe ain­si néces­sai­re­ment à côté des vrais ano­nymes, le ventre de la gaus­sienne. La seconde limite tient aux par­ti­cu­la­ri­tés de la culture poly­tech­ni­cienne. Trois exemples. L’armée d’abord : un élève choi­sit-il l’artillerie parce qu’il est mal clas­sé ou décide-t-il, au contraire, de ne pas « jouer le clas­se­ment » parce qu’il sait que, de toutes façons, il aura sa place dans ladite artille­rie ? Les sta­tis­tiques ensuite : il y a certes beau­coup de juifs dans la pro­mo 1901, mais il y en a beau­coup moins dans les pro­mos 1900 et 1902, comme l’auteur le signale lui-même. En réa­li­té, le pour­cen­tage de juifs à l’entrée est pra­ti­que­ment constant à 3 % tout au long de la IIIe Répu­blique – qui est d’ailleurs le niveau auquel Vichy a por­té le numé­rus clau­sus en 1941… L’X enfin : l’auteur ne men­tionne pas le fait que deux figures majeures de la pro­mo, sur les­quelles il s’étend à juste titre, étaient le pre­mier GénéK – le futur géné­ral Ger­main, et le second Grosse Caisse – Müntz. Tout cela est véniel par rap­port à l’apport si intel­li­gent de ce livre à l’histoire de notre communauté !

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