Gérard Worms

Gérard Worms (55) mousquetaire de l’industrialisation de la France

Dossier : TrajectoiresMagazine N°759 Novembre 2020
Par Hubert LÉVY-LAMBERT (53)

Décé­dé le 31 août 2020, Gérard Worms a com­men­cé sa car­rière dans l’administration puis a eu d’importants postes dans l’industrie avant de ter­mi­ner dans la banque. Il a été un acteur clé de l’industrialisation de notre pays.

Né le 1er août 1936 à Paris d’une famille juive d’origine alsa­cienne, Gérard Worms a dû pas­ser une par­tie de la guerre caché dans le Ver­cors. Lau­réat du concours géné­ral en latin, il envi­sage la khâgne mais choi­sit la taupe et est reçu en 1955 à l’ENS et à l’X, mais choi­sit l’X dont il sort troi­sième dans le corps des Mines.

En 1960, sa pre­mière affec­ta­tion est l’Organisation com­mune des régions saha­riennes (OCRS), créée par le géné­ral de Gaulle pour ten­ter de main­te­nir dans le giron de la Répu­blique ce qu’on appe­lait alors dépar­te­ments des Oasis et de la Saou­ra, mais en 1962 les accords d’Évian marquent la fin de l’OCRS. Son patron Oli­vier Gui­chard est char­gé de créer la Datar et Gérard le suit. Il le suit encore en 1967 quand il est nom­mé ministre de l’Industrie puis en 1968 ministre du Plan et de l’Aménagement du territoire.

Dossiers industriels

Après le réfé­ren­dum de 1969 et le départ du Géné­ral, Gérard entre au cabi­net du Pre­mier ministre Jacques Cha­ban-Del­mas. Il y tra­vaille sous la direc­tion de Simon Nora sur les dos­siers indus­triels, en étroite liai­son avec Lio­nel Sto­le­ru (56) aux Finances,
Jean-Paul Parayre (57) à l’Industrie et Bernard
Esam­bert (54) à l’Élysée. Ce der­nier explique dans Pom­pi­dou, capi­taine d’industries (Odile Jacob, 1994) que ce qua­tuor sera bap­ti­sé les Mous­que­taires de l’industrialisation !

Gérard accepte ensuite la pro­po­si­tion que lui fait Simon Nora d’être DGA de Hachette. Il en devient DG en 1975 puis admi­nis­tra­teur en 1978. Il est appe­lé par Jean Gan­dois (49) en 1980 pour deve­nir DG de Rhône-Pou­lenc. En 1983, Jean Pey­re­le­vade (58), DG de la Com­pa­gnie finan­cière de Suez, l’embauche comme DGA. Il devient DG en 1986 au départ de Pey­re­le­vade, puis pré­sident en 1990 à la mort de Renaud de La Genière. Mais ce n’est pas un poste de tout repos et il est mis en mino­ri­té en 1995 par son conseil d’administration, pour être rem­pla­cé par son dau­phin Gérard Mes­tral­let (68). Gérard entre alors à la banque Roth­schild et Cie comme pré­sident du conseil des com­man­di­taires, puis asso­cié gérant en 1999 et senior advi­sor en 2006.

Des engagements multiples

Paral­lè­le­ment à ses acti­vi­tés pro­fes­sion­nelles, Gérard a eu, tout au long de sa vie, de nom­breuses autres acti­vi­tés d’intérêt géné­ral : vice-pré­sident du Syn­di­cat natio­nal de l’édition ; pré­sident de l’Association natio­nale de la recherche tech­nique ; de la Socié­té d’économie poli­tique ; du Siècle ; de COE-Rexe­code ; de l’IUT de Com­piègne ; de l’Association Coup de Pouce ; des amis de l’Université Ben Gou­rion de Beer-She­va ; de la chaîne His­toire… Mais sa plus impor­tante acti­vi­té, qui conci­lie toutes ses expé­riences, est sans aucun doute la pré­si­dence de la sec­tion fran­çaise de la Chambre de com­merce inter­na­tio­nale, puis de la Chambre de com­merce inter­na­tio­nale elle-même, qui l’amène à par­ti­ci­per aux plus grands som­mets internationaux.

Gérard a éga­le­ment ensei­gné l’économie à HEC, à la facul­té des lettres et de sciences humaines de Paris et à l’X. Il a écrit un livre (Les méthodes modernes de l’économie appli­quée, Dunod, 1965) et de nom­breux articles et, tout récem­ment, ses mémoires à l’intention de sa famille.

Grand mélo­mane, Gérard avait épou­sé en octobre 1960 Michèle Rous­seau, musi­cienne, fon­da­trice en 1984 de la Lettre du musi­cien. Ils ont eu 2 enfants : Fré­dé­ric, nor­ma­lien et agré­gé de phi­lo­so­phie, actuel­le­ment direc­teur adjoint de l’ENS, et Anne-Cécile, Sciences Po Paris, serial entre­pre­neure, actuel­le­ment fon­da­trice et pré­si­dente des entre­prises inno­vantes Art2M et ArtJaws.

Tous ceux qui ont ren­con­tré Gérard Worms ont été frap­pés par l’empathie qu’il mon­trait en toute occasion.

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