Synbias Pharma AG

La mixité, pour une meilleure intelligence collective

Dossier : Vie des entreprisesMagazine N°754 Avril 2020
Par Marina LUGOVA

La fémi­ni­sa­tion au niveau des entre­prises prend de l’ampleur dans divers sec­teurs qui étaient aupa­ra­vant très mas­cu­lins. Aujourd’hui, les femmes ont leur mot à dire : elles sont direc­trices, entre­pre­neures et femmes poli­tiques… Ren­contre avec Mari­na Lugo­va, CFO et membre du conseil d’administration de Syn­bias Phar­ma AG, qui nous en dit plus sur l’importance des femmes dans le sec­teur phar­ma­ceu­tique et dans la société.

En tant que CFO et membre du conseil d’administration de Synbias Pharma AG, quels sont les principaux sujets et challenges qui animent votre métier au quotidien ?

En tant que CFO, je repré­sente Syn­bias Phar­ma AG lors des négo­cia­tions avec les inves­tis­seurs, les ins­ti­tu­tions finan­cières et les banques quand il s’agit de trou­ver des finan­ce­ments rela­tifs au déve­lop­pe­ment com­mer­cial de l’entreprise. Je négo­cie les termes finan­ciers de co-déve­lop­pe­ment des médi­ca­ments avec les par­te­naires. Mes res­pon­sa­bi­li­tés incluent des fonc­tions de tré­so­re­rie, de pré­vi­sion éco­no­mique et de modé­li­sa­tion finan­cière. En col­la­bo­ra­tion avec les autres membres du conseil d’administration, nous œuvrons à la défi­ni­tion de la stra­té­gie de la socié­té et à sa conju­gai­son à la tac­tique, dans le but d’assurer et de garan­tir un déve­lop­pe­ment sain de Syn­bias Phar­ma AG, et de sou­te­nir sa crois­sance en termes de chiffre d’affaires et de rentabilité.

Aujourd’hui, on parle de plus en plus de mixité dans les organisations, et notamment de féminisation des postes à responsabilité. Comment cela se traduit-il dans le secteur pharmaceutique et plus particulièrement au sein de Synbias Pharma AG ?

La mixi­té dans les orga­ni­sa­tions est à l’origine d’une meilleure intel­li­gence col­lec­tive, pro­dui­sant des solu­tions tou­jours plus inno­vantes et par consé­quent, des entre­prises affi­chant de meilleurs ren­de­ments finan­ciers. Quant à l’économie, les PME sont un des leviers prin­ci­paux de crois­sance éco­no­mique. Dans l’Hexagone, des femmes sont à la tête de 16 % des PME fran­çaises de crois­sance. Pos­sé­dant le même nombre de sala­riés et attei­gnant les mêmes chiffres d’affaires, les entre­prises diri­gées par des femmes affichent des per­for­mances éco­no­miques supé­rieures à celles qui sont diri­gées par des hommes, avec un pour­cen­tage de + 2,6 % d’excédent brut d’exploitation, selon la pré­si­dente de Women Equi­ty Part­ners (l’index Women Equity).

La fémi­ni­sa­tion des postes à res­pon­sa­bi­li­té dans le sec­teur phar­ma­ceu­tique est une réa­li­té, notam­ment en France. Depuis plu­sieurs années, de nom­breuses femmes ont été iden­ti­fiées pour être ins­crites dans des par­cours d’excellence visant à leur pro­po­ser des postes de direc­tion, aus­si bien pour des rai­sons stra­té­giques que pour don­ner une image posi­tive de l’entreprise. Mais cette dyna­mique doit encore se pour­suivre. En effet, dans le sec­teur phar­ma­ceu­tique, les CEOs sont, sauf à quelques excep­tions près, presque uni­que­ment des hommes.

Syn­bias Phar­ma ne dif­fé­ren­cie pas entre les femmes et les hommes. Selon les postes pro­po­sés, nous accor­dons avant tout de l’importance aux com­pé­tences des can­di­dats pour chaque poste, et par la suite, nous aidons nos col­la­bo­ra­teurs à déve­lop­per des com­pé­tences solides en termes de leadership.

Depuis déjà quelques années, le nombre de femmes investisseures est en pleine croissance. Elles deviennent de plus en plus engagées dans l’impact investing. Qu’en est-il ?

L’impact inves­ting est un sujet brû­lant par­mi les per­sonnes qui se sou­cient du chan­ge­ment social ; cette ten­dance nous vient des États-Unis et fait l’objet d’une crois­sance expo­nen­tielle dans le monde entier. Elle est le prin­ci­pal moteur d’initiatives telles que la créa­tion d’emplois, l’adoption d’une éner­gie propre, et l’amélioration des niveaux de vie. L’impact inves­ting dif­fère de la démarche phi­lan­thro­pique clas­sique, qui consiste à faire des dons aux orga­nismes de bien­fai­sance, cette der­nière n’étant aujourd’hui plus la seule façon de faire bou­ger les choses ; en effet, l’impact inves­ting est désor­mais consi­dé­ré comme un moteur-clé pour le chan­ge­ment posi­tif. Les femmes, en par­ti­cu­lier celles issues de la géné­ra­tion Y, contrôlent aujourd’hui de plus en plus de capi­taux, et ont plus d’expérience au niveau mul­ti­cul­tu­rel que leurs aînées de la géné­ra­tion pré­cé­dente. Cela leur donne la pos­si­bi­li­té de pou­voir jouer un rôle impor­tant dans l’impact inves­ting, ce der­nier consis­tant à inves­tir dans des domaines qui n’ont plus une, mais plu­sieurs formes de retour sur inves­tis­se­ment. C’est une approche dite du « triple résul­tat » (ou triple bot­tom line, en anglais), à savoir, un pro­jet qui génère non seule­ment un ren­de­ment finan­cier, mais aus­si des ren­de­ments sociaux et envi­ron­ne­men­taux. Pour de nom­breux inves­tis­seurs d’impact, les 17 objec­tifs mon­diaux (Objec­tifs de déve­lop­pe­ment durable, ODD) sont deve­nus une ligne direc­trice pour les indi­ca­teurs de ren­de­ment clés (IPC). Selon JP Mor­gan, les inves­tis­se­ments d’impact, une classe d’actifs émer­gente, va don­ner l’opportunité, « au cours des 10 pro­chaines années, d’investir un capi­tal de pas moins de 400 mil­liards de dol­lars — et un béné­fice entre 183 et 667 mil­liards de dollars ».

Tout comme pour les postes à responsabilité, les femmes ont aussi leur mot à dire dans les institutions politiques. Qu’en est-il ?

Pen­dant très long­temps, il y a eu un fos­sé entre les femmes et la poli­tique, celles-ci se tenant à dis­tance des sujets poli­tiques, notam­ment à cause de sté­réo­types pro­fon­dé­ment enra­ci­nés dans la socié­té, qui excluaient le rôle des femmes dans toutes les affaires poli­tiques. On était convain­cus que les femmes ne devaient rien avoir à voir avec la poli­tique. Les faits, cepen­dant, viennent à prou­ver le contraire. En effet, les femmes en poli­tique ne réus­sissent pas moins bien que les hommes. Le nombre de femmes poli­tiques et de diri­geantes aug­mente chaque jour. L’autonomisation poli­tique des femmes peut deve­nir un outil puis­sant pour accroître l’importance de la place des femmes dans la socié­té, car cela per­met à ces der­nières d’élever la voix auprès d’un large public.

Quels conseils donneriez-vous aux femmes autour de cette thématique ?

La croyance fon­da­men­tale est que les femmes sont les agentes du changement.

Les femmes sont dotées de très fortes capa­ci­tés de col­la­bo­ra­tion et de négo­cia­tion. Avec l’égalité des chances comme ligne direc­trice, elles peuvent amé­lio­rer non seule­ment leur vie per­son­nelle, mais aus­si amé­lio­rer celle des com­mu­nau­tés et par consé­quent, à plus grande échelle, la vie de tous les humains sur terre. Les femmes éprouvent un fort désir de vivre dans un monde meilleur pour nos enfants et petits-enfants. Si nous confions aux femmes la tâche de façon­ner le monde, ce der­nier sera beau­coup plus vivable et agréable pour tous qu’il ne l’est actuellement.

L’agilité, la rési­lience et la per­sé­vé­rance sont les qua­li­tés que les femmes doivent déve­lop­per si elles pensent qu’elles sont sur la bonne voie de crois­sance, aus­si bien sur le plan pro­fes­sion­nel que per­son­nel. Les femmes doivent voir grand et se sou­te­nir les unes les autres via le men­to­rat, l’encouragement mutuel, en s’ouvrant des portes les unes aux autres, et enfin, en entre­te­nant des liens entre elles, des réseaux, parce qu’ensemble, elles peuvent rendre le monde meilleur.

Quand un groupe de femmes se réunit, elles consti­tuent une force impa­rable. Je crois que les femmes ne devraient pas avoir peur de voir grand.

Cepen­dant, les hommes ne devraient pas être tenus à dis­tance de cette dyna­mique. Ces der­niers peuvent en effet être des par­te­naires égaux, très favo­rables à ce che­min vers l’égalité des sexes. La mixi­té et la diver­si­té à tous les niveaux de l’entreprise sont la vraie clef de la crois­sance éco­no­mique et du pro­grès social. Par consé­quent, ne lais­sons pas les hommes en dehors du dialogue.

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