Usine Peroxyde d'hydrogène

Peroxyde d’hydrogène : un produit à fort potentiel

Dossier : 225e anniversaire de l'École polytechniqueMagazine N°749 Novembre 2019
Par Charles-Henri LEVAILLANT (96)

Le per­oxyde d’hydrogène, aus­si appe­lé « eau oxy­gé­née » est consi­dé­ré comme le plus « vert®» des pro­duits chi­miques. Le point avec Charles-Hen­ri Levaillant (96), Exe­cu­tive Vice Pre­sident, Gene­ral Mana­ger Per­oxydes EMEA au sein de Sol­vay.

Quelques mots sur votre parcours professionnel et les principales fonctions que vous avez endossées ?

Après une pre­mière par­tie de car­rière dans la fonc­tion publique ( auto­ri­té de régu­la­tion indé­pen­dante, cabi­net minis­té­riel, Union Euro­péenne à Bruxelles) , j’ai rejoint Viven­di pour prendre en charge la stra­té­gie et le déve­lop­pe­ment du groupe dans les télé­com­mu­ni­ca­tions, ce qui m’a ame­né ensuite à m’occuper de l’expérience client de l’opérateur GVT au Bré­sil. Suite au chan­ge­ment de stra­té­gie de Viven­di, qui a mis en vente ses actifs dans les télé­com­mu­ni­ca­tions, j’ai rejoint Sol­vay, tou­jours au B résil, pour déve­lop­per la bio­chi­mie du groupe. Puis j’ai diri­gé l’activité « Phé­nol et pro­duits déri­vés » (pétro­chi­mie) avant de rejoindre le siège de Sol­vay à Bruxelles il y a deux ans pour exer­cer mes fonc­tions actuelles.

Aujourd’hui, vous êtes Executive Vice President, General Manager Peroxides EMEA. Quels sont les principaux sujets qui vous ont mobilisé depuis votre prise de fonction et quelle est votre feuille de route ?

Depuis ma nomi­na­tion, ma pre­mière pré­oc­cu­pa­tion a été de ren­for­cer la sécu­ri­té de nos opé­ra­tions, car le per­oxyde d’hydrogène est un pro­duit hau­te­ment explo­sif, et nos usines sont clas­sées « Seve­so ». Pour mémoire, la direc­tive « Sevese » concerne les ins­tal­la­tions indus­trielles les plus dan­ge­reuses réper­to­riées selon le degré des risques qu’elles peuvent entraîner.

Il a fal­lu ensuite rendre plus effi­cace nos opé­ra­tions, déve­lop­per de nou­veaux mar­chés à l’export et de nou­velles appli­ca­tions, qui ont per­mis d’utiliser la pleine capa­ci­té de l’outil de production.

Enfin, il a fal­lu revoir notre stra­té­gie de valeur sur nos mar­chés tra­di­tion­nels en aug­men­tant nos prix. Toutes ces actions menées réso­lu­ment par les équipes des per­oxydes de Sol­vay ont conduit à une très forte amé­lio­ra­tion de notre rentabilité.

Les peroxydes sont utilisés par différentes industries. Pouvez-vous nous en dire plus ? Comment Solvay répond aux différents besoins de ses clients dans ce cadre ?

Le per­oxyde d’hydrogène ou « eau oxy­gé­née », est un pro­duit pas­sion­nant que nous trou­vons, par­fois sans le savoir, dans beau­coup d’applications de la vie de tous les jours. Par exemple le papier que nous uti­li­sons au quo­ti­dien a été blan­chi avec du per­oxyde d’hydrogène ; les briques de jus d’orange que nous buvons ont très pro­ba­ble­ment été dés­in­fec­tées au per­oxyde d’hydrogène ; le métal d’une alliance a été extrait avec du per­oxyde d’hydrogène. Le poly­uré­thane, iso­lant inté­rieur des réfri­gé­ra­teurs est fabri­qué selon un pro­cé­dé uti­li­sant le per­oxyde d’hydrogène. Nous fabri­quons aus­si l’agent blan­chis­sant des les­sives et des den­ti­frices, à par­tir du per­oxyde d’hydrogène.

Il s’agit par ailleurs d’un com­po­sé à fort poten­tiel pour sub­sti­tuer d’autres pro­duits chi­miques consi­dé­rés à risque pour l’environnement. Le per­oxyde d’hydrogène qui a pour for­mule H2O2, se trans­forme en eau (H2O) et oxy­gène (O2) une fois sa mis­sion accom­plie : c’est le pro­duit chi­mique le plus « vert » que nous pou­vons trouver.

Dans ce cadre, Sol­vay, en tant que lea­der mon­dial de l’H 2O2, répond aux dif­fé­rents besoins de ses clients en étant pré­sent sur toute la chaîne de valeur et l’ensemble des géo­gra­phies. Notre proxi­mi­té avec les clients, notre réseau exten­sif d’usines et notre avance tech­no­lo­gique, nous ont per­mis de deve­nir en 2019 un acteur de réfé­rence sur le mar­ché du per­oxyde en Europe.

Quels sont les enjeux auxquels vous êtes confrontés dans ce cadre ? Quelles sont vos perspectives ?

Notre prin­ci­pal défi est de main­te­nir une « ten­sion créa­tive » entre la néces­si­té de maxi­mi­ser les résul­tats de court terme en exploi­tant au mieux l’existant, et l’impératif d’investir et d’innover pour pré­pa­rer le futur, afin de maxi­mi­ser la valeur sur le long terme. Ain­si, des efforts d’efficacité et de ratio­na­li­sa­tion sont conduits par nos équipes au quo­ti­dien. En paral­lèle, il est essen­tiel, pour main­te­nir ce posi­tion­ne­ment stra­té­gique sur le mar­ché, de déve­lop­per l’usage du numé­rique dans nos usines et d’étendre notre réseau de production.

Cette exten­sion passe par le déve­lop­pe­ment de nou­veaux types d’usines, qui com­plé­mentent les sites tra­di­tion­nels : d’un côté des « méga-usines » (300 000 à 400 000 tonnes par an), capables de ser­vir des appli­ca­tions spé­ci­fiques et béné­fi­ciant d’économies d’échelle impor­tantes ; de l’autre, des « micro-usines », loca­li­sées direc­te­ment chez le client, ce qui per­met de sup­pri­mer les frais de trans­port et de sécu­ri­ser l’approvisionnement. Nous avons actuel­le­ment en opé­ra­tion trois de ces « méga-usines » et une « micro-usine » : le poten­tiel àhorizon 10 ans est immense.

L’innovation ne s’arrête pas au niveau de la tech­no­lo­gie : nous met­tons éga­le­ment l’accent sur le déve­lop­pe­ment de nou­velles appli­ca­tions, par exemple autour de l’aquaculture ou des semi-conduc­teurs. Les pos­si­bi­li­tés de nou­veaux usages des per­oxydes sont grandes, et nous don­nons la prio­ri­té au déve­lop­pe­ment sur les mar­chés « de spé­cia­li­tés » à forte valeur ajou­tée (appli­ca­tions médi­cales, high-tech…).

Enfin, en nous pro­je­tant dans le futur, je pense qu’il y a un poten­tiel de dis­rup­tion de nos mar­chés tra­di­tion­nels avec le déve­lop­pe­ment rapide de l’hydrogène vert comme source d’énergie : à nous d’en faire une oppor­tu­ni­té pour le per­oxyde d’hydrogène.

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