Mixité à l'École polytechnique

Cap sur la mixité sociale

Dossier : Le mot du PrésidentMagazine N°749 Novembre 2019
Par Marwan LAHOUD (X83)

Les pères fon­da­teurs de l’X se sont don­né pour objec­tif de sélec­tion­ner les meilleurs jeunes gens, quelle que soit leur ori­gine sociale, capables de deve­nir des savants, des ingé­nieurs ou des offi­ciers au ser­vice de la France. Pour ce faire, ils ont sillon­né le pays tout entier, pen­dant plu­sieurs mois et ont réus­si à regrou­per les meilleurs, dans la pro­mo­tion X1794, à la mixi­té sociale et géo­gra­phique remarquable.

Deux cent vingt-cinq ans plus tard, après une ana­lyse appro­fon­die en asso­cia­tion avec l’AX et une très large par­ti­ci­pa­tion de la com­mu­nau­té poly­tech­ni­cienne, la direc­tion de l’École a remis à la ministre des Armées et la ministre de l’Enseignement supé­rieur un rap­port-pro­gramme pour accroître la mixi­té sociale à l’entrée, renouant ain­si avec l’esprit des origines.

Ce que la presse écrite et audio­vi­suelle a choi­si de mettre en avant, à savoir les points de boni­fi­ca­tion des bour­siers, n’en est qu’un des mul­tiples aspects, sans doute le plus spec­ta­cu­laire à court terme mais pas le plus effi­cace à long terme. Il est à noter que le choix fait par l’X n’est pas d’octroyer des points sup­plé­men­taires aux bour­siers mais de leur per­mettre de conser­ver leurs qua­rante points de boni­fi­ca­tion de 32, pour inci­ter ceux d’entre eux qui ont raté l’admissibilité de peu, à se repré­sen­ter en 52.

Il est vrai que l’analyse détaillée des résul­tats des concours et des jurys d’admission des dif­fé­rentes filières se tra­duit en consta­ta­tions sur­pre­nantes : la pre­mière conclu­sion notable est que le pour­cen­tage de bour­siers est divi­sé par deux par l’écrit et reste stable entre l’admissibilité et l’admission. C’est donc que les bour­siers ne sont pas assez bien pré­pa­rés aux concours. La seconde qui mérite l’attention, pas aus­si sur­pre­nante dans sa nature mais dans son ampli­tude, est, qu’à une ou deux excep­tions près, les bour­siers sont moins nom­breux dans les lycées de pré­pa­ra­tion pari­siens, alors que le dés­équi­libre Paris Pro­vince, en matière de suc­cès aux concours, s’est sen­si­ble­ment accentué.

C’est donc à un véri­table rééqui­li­brage entre Paris et la pro­vince que l’X appelle le minis­tère de l’Éducation natio­nale, avec le trans­fert de classes de MP* de Paris vers la pro­vince et un accrois­se­ment des places offertes au concours d’entrée de la filière uni­ver­si­taire en élar­gis­sant le vivier de recrutement.

C’est bien en amont de l’École que la ques­tion de la mixi­té sociale et géo­gra­phique doit être trai­tée. Il est donc pré­vu, dès la pro­chaine ren­trée sco­laire, de mobi­li­ser les élèves de pre­mière année, dans le cadre de leur « ser­vice mili­taire », pour ser­vir de tuteurs à des lycéens ou des uni­ver­si­taires bour­siers pré­pa­rant les concours d’entrée. Les anciens volon­taires seront éga­le­ment mobilisés.

Excel­lence et diver­si­té se nour­rissent mutuel­le­ment. La com­mu­nau­té doit s’engager réso­lu­ment avec l’École dans la voie de la diver­si­té sociale conforme à l’esprit des ori­gines sous la Conven­tion, mais éga­le­ment la diver­si­té inter­na­tio­nale et la mixi­té homme femme. Il est vrai que la pro­mo­tion 1794 a vu Sophie Ger­main, grande mathé­ma­ti­cienne qui tra­vailla notam­ment avec Gauss, suivre les cours en « emprun­tant » l’identité d’Antoine Leblanc (1794) qui avait déci­dé de quit­ter Paris et l’École. Mais ceci est une autre histoire.

Poster un commentaire