Espace et météo

Dossier : La météorologie partie 2Magazine N°748 Octobre 2019
Par Nicolas CHAMUSSY (87)

Constellations et pseudosatellites

L’utilisation des satel­lites en météo­ro­lo­gie a été envi­sa­gée dès le début de l’ère spa­tiale, avec le suc­cès que l’on sait. L’Europe a joué et tient un rôle majeur. Le sec­teur spa­tial vit pour­tant une révo­lu­tion de grande ampleur qui aura un impact fort sur la nature des don­nées météo­ro­lo­giques et sur la façon de les recueillir. La très forte réduc­tion du prix des ser­vices de lan­ce­ment (poste bud­gé­taire signi­fi­ca­tif dans l’acquisition d’un sys­tème satel­li­taire) et les évo­lu­tions tech­no­lo­giques et indus­trielles (minia­tu­ri­sa­tion, per­for­mances accrues des équi­pe­ments embar­qués, uti­li­sa­tion de com­po­sants « du com­merce », opti­mi­sa­tion des pro­ces­sus de déve­lop­pe­ment, de pro­duc­tion et d’industrialisation notam­ment grâce au digi­tal « de bout en bout »…) ont faci­li­té le déve­lop­pe­ment de constel­la­tions de satel­lites : des Cube­Sats de quelques kilo­grammes aux per­for­mances contraintes jusqu’aux mini­sa­tel­lites de quelques cen­taines de kilogrammes. 

Cette évo­lu­tion inexo­rable rend désor­mais envi­sa­geable le déploie­ment de constel­la­tions à voca­tion météo­ro­lo­gique (ou embar­quant des ins­tru­ments météo­ro­lo­giques sur des satel­lites non dédiés, rédui­sant ain­si le prix de la mis­sion) qui offrent une cou­ver­ture mon­diale com­plète, ins­tan­ta­née et rési­liente (en cas de perte de quelques satel­lites d’une constel­la­tion, la mis­sion peut être pour­sui­vie avec de faibles dégra­da­tions de performances).

De même, les déve­lop­pe­ments tech­no­lo­giques récents (maté­riaux struc­tu­raux très légers, cel­lules solaires de grande effi­ca­ci­té, sys­tèmes de sto­ckage d’énergie à haute den­si­té éner­gé­tique…) rendent désor­mais pos­sible la mise en œuvre de pseu­do­sa­tel­lites à haute alti­tude (High Alti­tude Pseu­do Satel­lites / HAPS), en l’occurrence des aéro­nefs / drones évo­luant à près de vingt kilo­mètres d’altitude, pen­dant plu­sieurs mois sans inter­rup­tion et embar­quant notam­ment des cap­teurs météo­ro­lo­giques. De tels sys­tèmes, en com­plé­ment des satel­lites, en patrouillant sur des ter­ri­toires d’intérêt, per­met­tront par exemple l’observation de phé­no­mènes météo­rologiques locaux.

Capteurs météorologiques au-delà de l’orbite terrestre

Alors que notre proche ban­lieue ter­restre est lar­ge­ment sur­veillée par des cap­teurs météo­ro­lo­giques et le sera plus encore au cours des pro­chaines décen­nies par le biais des constel­la­tions et de drones à haute alti­tude, ce sont main­te­nant des zones de l’espace plus éloi­gnées de la Terre qui vont être uti­li­sées et notam­ment les points de Lagrange (points d’équilibre gra­vi­ta­tion­nel du sys­tème Soleil-Terre). Un satel­lite pla­cé à l’un de ces points per­met d’observer les érup­tions solaires (sus­cep­tibles de per­tur­ber voire d’endommager les réseaux élec­triques et de com­mu­ni­ca­tion) et de dif­fu­ser des mes­sages d’alerte vers la Terre. Tel est l’objet de la mis­sion envi­sa­gée par l’Agence spa­tiale euro­péenne (ESA) au point L5 et qui pour­rait être lan­cée au milieu de la pro­chaine décen­nie. Le nom même de cette mis­sion (Space Wea­ther) est emblé­ma­tique : il tra­duit l’extension de la météo­ro­lo­gie au-delà des orbites cir­cum­ter­restres – exten­sion que les météo­ro­lo­gistes amorcent avec les astronomes.

Et pourquoi pas une météorologie martienne ?

Le regain d’intérêt pour l’exploration habi­tée de la Lune, puis son occu­pa­tion per­ma­nente, et la conquête de Mars condui­ront à de nou­velles mis­sions dans les pro­chaines années, qui requer­ront des ana­lyses météo­ro­lo­giques. De nou­veaux cap­teurs, modèles et moyens de trai­te­ment des don­nées seront déve­lop­pés pour appré­hen­der les envi­ron­ne­ments extra­ter­restres. Les grandes agences météo­ro­lo­giques s’organiseront pour créer cette exo-météo­ro­lo­gie, en sup­port aux mis­sions d’exploration du sys­tème solaire, béné­fi­ciant de toutes les com­pé­tences et exper­tises déve­lop­pées depuis des décen­nies dans l’univers météo pour la Terre.


Cet article fait par­tie d’une col­lec­tion de points de vue et de rêves sur la « météo en 2049 »…

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