Une révolution : le traitement thermique

Dossier : MécaniqueMagazine N°574 Avril 2002
Par Laurent PELISSIER

Avec l’a­vè­ne­ment de l’ère indus­trielle, l’es­sor de la métal­lur­gie a fait naître des ate­liers spé­cia­li­sés dans les recuits, la cémen­ta­tion et la trempe des aciers au sein des usines de la méca­nique. Mais la peur ances­trale du feu et aus­si une cer­taine crainte de ces hommes reje­tèrent tou­jours ces ate­liers » dans le fond, à l’autre bout… »

Il y a peu de temps encore, l’a­te­lier de trai­te­ments ther­miques était sou­vent celui que l’on ne visi­tait pas car trop sale, le sol hui­leux, l’at­mo­sphère enfu­mée, des flammes par­tout et le tout dans un local sans fenêtres et pra­ti­que­ment pas éclai­ré. Il faut dire que toute source de lumière, solaire ou arti­fi­cielle, faus­sait les appré­cia­tions de tem­pé­ra­ture faites par l’œil exer­cé des compagnons.

Une technologie en constante évolution

Créée en 1928 à Gre­noble, l’en­ti­té de construc­tion de fours du groupe Ugine, dont ECM assure la péren­ni­té ain­si que d’autres marques depuis 1985, n’a jamais ces­sé ses acti­vi­tés et a tou­jours été le moteur dans l’é­vo­lu­tion des tech­no­lo­gies. Dans les années soixante, Ugine-Infra construi­sait des fours sous vide indus­triels. Cette tech­no­lo­gie » propre » a tout d’a­bord été uti­li­sée par l’in­dus­trie aéro­nau­tique pour le trai­te­ment et le bra­sage de métaux et alliages haut de gamme comme, entre autres, le titane et les inco­nels. Les per­for­mances de refroi­dis­se­ment de cette géné­ra­tion de fours ne per­met­taient pas de trem­per les aciers, si ce n’est quelques nuances dites » auto­trem­pantes » au Ni-Cr-Mo.

La pre­mière grande évo­lu­tion fut d’in­tro­duire dans la tech­no­lo­gie des fours sous vide la pos­si­bi­li­té de refroi­dir sous pres­sion de gaz, jus­qu’à 5 bars d’a­zote et, ain­si, de trem­per la plu­part des aciers for­te­ment alliés pour outillages.

La qua­li­té des trai­te­ments obte­nus et le confort d’u­ti­li­sa­tion de ce genre de maté­riel ont vite été accep­tés dans le monde du trai­te­ment ther­mique mais ont aus­si sus­ci­té beau­coup d’en­vie, de la part du per­son­nel qui conti­nuait à tra­vailler dans les anciens ate­liers, par rap­port à cette nou­velle géné­ra­tion de » trem­peurs » offi­ciant en blouses blanches… !

La part des trai­te­ments sous vide res­tait confi­den­tielle par rap­port à tout ce qui était encore trai­té de manière conven­tion­nelle en par­ti­cu­lier pour l’in­dus­trie auto­mo­bile. Deux ver­rous res­taient à faire sau­ter : obte­nir des vitesses de refroi­dis­se­ment sous gaz sur­pres­sé com­pa­rables à une trempe à l’huile pour les aciers de construc­tion et, sur­tout, éli­mi­ner les atmo­sphères car­bu­rant libé­rant de l’oxy­gène lors du craquage.

Trempe de l'acier sous gaz. Machine ICBP 600 de ECM
ICBP 600 sur site Renault Cléon. © SOCIÉTÉ ECM

Naissance de la cémentation basse pression

Dans les années 1980, ECM a réa­li­sé de nom­breuses cam­pagnes d’es­sais avec des par­te­naires indus­triels tels que PSA et Tur­bo­mé­ca. Ce déve­lop­pe­ment, cou­ron­né de suc­cès, a per­mis en 1990 de dépo­ser des bre­vets concer­nant le pro­cé­dé de cémen­ta­tion basse pres­sion » Infra­carb® » et les ins­tal­la­tions modu­laires capables de réa­li­ser le traitement.

Le pro­cé­dé consiste en une suc­ces­sion d’in­jec­tions sous pres­sion réduite (5 à 15 mbar) d’un gaz car­bu­rant dont la molé­cule est exempte d’oxy­gène : pro­pane C3H8 ou, dans cer­tains cas, acé­ty­lène C2H2. Ces injec­tions, de courtes durées, s’ef­fec­tuent à un flux maxi­mum cor­res­pon­dant à la limite de solu­bi­li­té du car­bone dans l’a­cier à une tem­pé­ra­ture don­née com­prise entre 850 et 1 050 °C.

Il se forme alors en sur­face un film de cémen­tite instable qui est dif­fu­sée dans la matrice pen­dant les phases inter­mé­diaires de dif­fu­sion sous azote. Les périodes de renou­vel­le­ment de l’at­mo­sphère dans le labo­ra­toire sont de l’ordre de 5 s, ce qui per­met une conduite par­faite des temps d’en­ri­chis­se­ment et de dif­fu­sion, d’où une maî­trise des pro­fon­deurs de cémen­ta­tion de l’ordre de 5100 mm.

Le pro­cé­dé » Infra­carb® » per­met de réduire, dans cer­tains cas, les temps de trai­te­ment de moi­tié par rap­port aux pro­cé­dés de cémen­ta­tion gazeuse traditionnels.

Paral­lè­le­ment au déve­lop­pe­ment du pro­cé­dé, l’en­tre­prise a mis au point et bre­ve­té des cel­lules froides de trempe sous gaz admet­tant des pres­sions de 20 bars.

À ce jour, tous les construc­teurs d’au­to­mo­biles du monde, et cer­tains construc­teurs de poids lourds, ont inves­ti dans des machines ICBP (Infra­carb cémen­ta­tion basse pres­sion). ECM compte, à l’heure actuelle, 280 uni­tés de cémen­ta­tion » Infra­carb® » en ser­vice dans 13 pays différents.

Les qua­li­tés de ce genre d’ins­tal­la­tions : absence de nui­sances (bruit, fumée), absence de risques pour les uti­li­sa­teurs (flammes, atmo­sphère explo­sible) ont per­mis de sor­tir ces nou­veaux fours du fin fond des ate­liers de trai­te­ments ther­miques et la révo­lu­tion est là : les machines ICBP sont désor­mais inté­grées dans les lignes de fabrication !

ECM 46, rue Jean Vau­ja­ny, Tech­ni Sud, 38100 Gre­noble. Tél. : 04.76.49.65.60.

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Lebeau­pinrépondre
13 mars 2016 à 17 h 40 min

cémen­ta­tion basse pres­sion
Le pro­cé­dé décrit ci-des­sus est-il une évo­lu­tion de celui expé­ri­men­té fin 1980 en col­la­bo­ra­tion avec PSA par STEIN HEURTEY à l’u­sine de Bor­ny ? (Machine Thor)

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