Pierre Legoux (27) 1908–2000

Dossier : ExpressionsMagazine N°562 Février 2001Par : André MARELLE (38)

Il y a des moments – j’en ai connu plu­sieurs -, où une des­ti­née hésite et où la Pro­vi­dence décide1.

Cette réflexion de Pierre Legoux à pro­pos d’une conver­sa­tion avec le géné­ral Leclerc fin 1942 éclaire sa vie.

Né à Bou­logne-sur-Seine le 12 avril 1908, fils de phar­ma­cien, il aurait sui­vi cette voca­tion, mais un entre­tien avec un ensei­gnant l’o­riente vers » les grandes écoles « .

Après de brillantes études à l’é­cole Mas­sillon, au lycée Char­le­magne et au lycée Saint-Louis, il entre en 1927 à l’É­cole poly­tech­nique, en sort sixième de sa pro­mo­tion et clas­sé dans le corps des Mines avec enga­ge­ment colo­nial, accom­plit son ser­vice dans l’ar­tille­rie et suit de 1930 à 1932 la for­ma­tion de l’é­cole des Mines de Paris.

Juste avant de par­tir avec elle en Afrique, Pierre Legoux épouse Yvonne Péze­ril, elle-même née au Chi­li où son père, ingé­nieur de l’É­cole cen­trale, construi­sait un che­min de fer. Leur famille, très nom­breuse, compte déjà sept enfants en 1943, et main­te­nant, mal­gré des deuils cruels, dix enfants, dix-huit petits-enfants et huit arrière-petits-enfants. Peti­te­ment logés en der­nier lieu à Meu­don-la-Forêt, leur mai­son de Saint-Jean-le-Tho­mas, au bord de la baie du mont Saint-Michel, leur per­met­tait mieux d’ac­cueillir leurs descendants.

Jus­qu’en 1960, Pierre Legoux tra­vaille exclu­si­ve­ment pour l’outre-mer, d’a­bord comme adjoint au chef du ser­vice des mines de l’A­frique occi­den­tale, puis comme chef du ser­vice des mines d’A­frique équa­to­riale, ensuite comme chef du ser­vice des mines du minis­tère char­gé de la France d’outre-mer, enfin comme admi­nis­tra­teur direc­teur géné­ral de la Com­pa­gnie minière de Cona­kry, met­tant en exploi­ta­tion un gise­ment de fer.

De 1960 à son départ à la retraite en 1978, il sert en métro­pole, d’a­bord comme direc­teur de l’é­cole des Mines d’A­lès et de l’ar­ron­dis­se­ment miné­ra­lo­gique local, ensuite au Conseil géné­ral des Mines dont il pré­side de 1970 à 1978 la sec­tion juri­dique. Pen­dant toute cette période, il garde une acti­vi­té inter­na­tio­nale très appré­ciée, aus­si bien comme délé­gué dans les confé­rences et réunions (en par­ti­cu­lier sur l’é­tain), que comme expert.

Il enseigne la géo­lo­gie minière de 1948 à 1960 à l’é­cole des Mines de Nan­cy et par­ti­cipe acti­ve­ment aux tra­vaux de l’A­ca­dé­mie des sciences d’outre-mer depuis 1948. Il y pré­side jus­qu’en 1998 la sec­tion des sciences naturelles.

Avant de clore cette trop rapide des­crip­tion, il convient de reve­nir sur la période 1942–1945.

En octobre 1942, Pierre Legoux et sa famille se pré­parent à par­tir en congé de chan­ge­ment cli­ma­tique près de Cape­town (Afrique du Sud).  » Les scouts et éclai­reurs avaient orga­ni­sé à cette occa­sion2 un feu de camp où arri­vèrent impromp­tu le gou­ver­neur géné­ral Éboué et le géné­ral Leclerc, venus se repo­ser à la fraî­cheur du soir ; et là Leclerc me dit : J’au­rais aimé vous emme­ner avec moi. « 1

Après ce congé et une mis­sion d’é­tudes des mines d’A­frique du Sud, le retour à Braz­za­ville a lieu en mai et Pierre Legoux obtient, comme il l’a­vait déci­dé à la suite des pro­pos du géné­ral Leclerc, d’être mobi­li­sé avec l’ob­jec­tif de rejoindre une uni­té combattante.

Mais René Ple­ven, com­mis­saire aux colo­nies, lui fait faire aupa­ra­vant une mis­sion minière en Nou­velle-Calé­do­nie, dans des condi­tions poli­tiques dif­fi­ciles, en par­tant de Londres par l’A­mé­rique, et en ren­trant à Alger par l’Aus­tra­lie, l’Inde et l’É­gypte. C’est seule­ment en sep­tembre 1944 qu’il rejoint comme lieu­te­nant orien­teur le 1er régi­ment d’ar­tille­rie colo­niale, au sein de la Ire armée, et fait cam­pagne dans les Vosges et en Alsace jus­qu’à son rap­pel à titre mili­taire au minis­tère des Colo­nies en février 1945.

» Fran­çais libre » depuis 1940, il a ain­si, après avoir aidé de toutes ses forces l’A­frique fran­çaise libre à résis­ter avec l’ap­point des pro­duc­tions minières, par­ti­ci­pé direc­te­ment à la Libé­ra­tion de notre pays. N’est-il pas sym­bo­lique qu’il soit décé­dé le 18 juin 2000, en l’an­ni­ver­saire du pre­mier appel du géné­ral de Gaulle ?

Mon ami­tié pour lui m’a inci­té à pro­po­ser à La Jaune et la Rouge cet hom­mage à un » antique » auquel je dois beaucoup. 

______________________________
1. L’A­frique équa­to­riale dans la guerre. Pierre Legoux, 1985, inédit.
2. Pierre Legoux était alors » com­mis­saire » scout.

Poster un commentaire