Le sablier de nos souvenirs

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°684 Avril 2013Rédacteur : Bernard DUCONGÉ (59)

Dans sa pré­face, le pré­sident de l’ATA (anciens tau­pins d’Alger), Charles Pom­péi, expose la moti­va­tion de ses auteurs et le cli­mat unique de ces témoignages.

Ouvrage col­lec­tif d’une tren­taine d’entre nous, ce livre est le résul­tat d’une ren­contre entre une idée, une envie et un anniversaire.

Une idée : celle d’un des nôtres qui, en automne 2010, pro­po­sa à l’ATA de trans­po­ser une expé­rience per­son­nelle à par­tir d’entretiens à bâtons rom­pus avec des col­lègues de son entre­prise, il avait par­ti­ci­pé à la rédac­tion de « Cahiers d’histoire » d’une grande indus­trie métallurgique.

Une envie : celle de beau­coup d’entre nous de se sou­ve­nir, avant que nos fenêtres ne se referment, de tous ceux qui nous les avaient ouvertes, de revivre les pay­sages, les che­mins par­cou­rus et les liens tis­sés ensemble, et le désir d’en lais­ser une trace à ceux qui nous suivent.

Couverture du livre : Le sablier de nos souvenirs, histoire des taupins d'AlgerUn anni­ver­saire : il y a cin­quante ans que ces classes pré­pa­ra­toires, matrices de notre com­mu­nau­té, ont ter­mi­né leur his­toire plus que cen­te­naire. Nous avons vou­lu rendre, avec ce modeste ouvrage, un hom­mage à tous ceux et toutes celles qui, de l’école pri­maire à la « Taupe d’Alger », nous ont aidés à deve­nir ce que nous aurons été.

Ces sou­ve­nirs remontent par­fois à plus de quatre ou cinq géné­ra­tions. Comme dans un sablier, ils convergent vers le point sin­gu­lier com­mun de nos « années Bugeaud » pour diver­ger ensuite sur les nom­breuses routes où nous avons conduit nos propres aventures.

À tra­vers ces témoi­gnages de nos ori­gines, on trouve une image remar­qua­ble­ment cohé­rente du peu­ple­ment de cette aven­ture unique que fut la colo­ni­sa­tion fran­çaise en Algé­rie, sans oublier ceux dont les ancêtres étaient déjà là-bas en 1830. Des arrière-arrière-arrière-arrière-grands-parents, par­fois venus des fins fonds de toutes les pro­vinces fran­çaises, mais aus­si de Malte, de Grèce, d’Italie, de Rou­ma­nie, d’Espagne, de Cap­pa­doce ou de Pales­tine, etc.

Des « bou­seux » de Cor­rèze, des sou­deurs de boîtes de sar­dines de Bre­tagne, des ter­ras­siers indi­gents d’Espagne. Et pour les plus dému­nis d’entre eux, la fuite devant la misère, l’antisémitisme, les conflits du Moyen-Orient (déjà) ou les remous poli­tiques du Second Empire, tous à la recherche d’un « Eldorado ».

Cet Eldo­ra­do, ils le trou­vèrent dans les « marais de la Mitid­ja », « les forêts de la zone semi-déser­tique des hauts pla­teaux de Tlem­cen », et un peu plus tard dans l’administration colo­niale nais­sante : écoles, postes, che­mins de fer, gen­dar­me­rie, etc. Pour ceux qui sur­vé­curent à la mala­ria, au décou­ra­ge­ment ou à des choix hasar­deux d’entrepreneurs, l’ascenseur social fonc­tion­na bien, sou­te­nu par un res­pect fami­lial qua­si reli­gieux de l’instruction et de l’éducation.

Tous ces témoi­gnages disent, sou­vent avec émo­tion, ce que nous devons à nos ensei­gnants d’alors et com­ment nous avons été len­te­ment « pro­gram­més » pour nous retrou­ver un jour au-des­sus de la cour claus­trale d’une grande bâtisse, à la ter­rasse du second étage, dans les classes de la « Taupe » du lycée Bugeaud.

Ces années de taupe, puis d’écoles ou d’universités, nous mar­quèrent si pro­fon­dé­ment de leurs impi­toyables exi­gences qu’aujourd’hui encore elles cimentent notre amitié.

Pour cer­tains d’entre nous elles coïn­ci­dèrent, par­fois sous l’uniforme, avec la fin dra­ma­tique de l’Eldorado rêvé par nos ancêtres.

Mais, pour d’autres, c’était la nais­sance d’une nou­velle nation. Années de déchi­re­ments, de tra­gé­dies, et de dou­lou­reuses contro­verses au regard de l’Histoire. À cette aune, d’autres Eldo­ra­dos n’ont-ils pas lais­sé de plus lourds sou­ve­nirs à des peuples dis­lo­qués dont ils étaient les berceaux ?

Mais, à la lec­ture des der­niers cha­pitres, com­ment ne pas être frap­pé par l’optimisme et une cer­taine fier­té qui s’en dégagent, en essayant de ne rete­nir de l’Algérie que « ses pay­sages, ses lumières, et ses odeurs » res­tés ins­crits dans nos mémoires.

Commentaire

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COSSERAT JOELrépondre
11 juin 2013 à 7 h 01 min

le sablier de nos sou­ve­nirs
Quel est le coût de ce livre dont j’ai­me­rais com­man­der un exemplaire ?
Avec mes remerciements

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