Le record du monde de planeur : plus de 1000 km en moins de cinq heures

Dossier : X-aviationMagazine N°635 Mai 2008Par Pascal FUA (81)

Pour mes vacances de Noël, j’ai eu la chance de par­ti­ci­per à l’expédition de Jean-Marie Clé­ment, l’un des pion­niers des très grands vols en pla­neur en Amé­rique du Sud, à Bari­loche, en Argen­tine, au pied des Andes. Ces mon­tagnes consti­tuent la plus longue chaîne de la pla­nète. Étant per­pen­di­cu­laires au vent domi­nant d’ouest, elles engendrent des oscil­la­tions dans l’atmosphère qui peuvent se com­pa­rer à des vagues et que les pla­neurs peuvent exploi­ter pour gagner beau­coup d’altitude rapidement.

Nuages len­ti­cu­laires qui maté­ria­lisent l’onde et le Nim­bus 4DM que nous avons uti­li­sé pour aller leur rendre visite.
C’est au vent de ces nuages que l’on trouve sou­vent les ascen­dances les plus puissantes.


La cor­dillère des Andes est donc deve­nue le ter­rain de jeu favo­ri des meilleurs pilotes mon­diaux, ceux qui cherchent à aller tou­jours plus loin, plus haut, et plus vite. Ils ont, entre autres, mon­tré que l’on pou­vait mon­ter à plus de 15 000 m ou par­cou­rir 3 000 km en une seule jour­née, et ce sans uti­li­ser de moteur bien sûr. C’est impres­sion­nant quand on pense qu’un avion de ligne vole à une alti­tude de 10 000 à 11 000 m.
 


1 006 km en 4 h 57. Le tra­cé du vol super­po­sé sur une carte Google Earth.

Un beau matin de décembre, j’ai donc eu le pri­vi­lège d’être aux pre­mières loges pour voir com­ment on s’y pre­nait pour accom­plir ce type d’exploit. Jean-Marie et moi avons décol­lé ensemble dans son Nim­bus 4DM alors que le vent au sol était extrê­me­ment fort. Il l’était encore plus en alti­tude, créant une onde extrê­me­ment puis­sante comme en témoi­gnaient les mons­trueux nuages len­ti­cu­laires que nous avons ren­con­trés sur notre che­min. Cette onde nous a per­mis de mon­ter jusqu’à 8 600 m d’altitude, où la tem­pé­ra­ture des­cend à – 40°, tout en volant extrê­me­ment vite sur la majeure par­tie du par­cours. En 4 h 57 de vol, nous avons par­cou­ru 1 006 km, soit une moyenne de 203,14 km/h net­te­ment plus éle­vée que les 199,79 km/h du pré­cé­dent « speed over an out-and-return course of 1 000 km record ». Notre nou­veau record a donc été homo­lo­gué, non sans quelques péri­pé­ties administratives.
La figure montre le tra­cé du vol que nous avons effec­tué. Nous avons effec­tué une mon­tée rapide de 5 300 m à 8 600 m vers le milieu du vol, quand nous avons atteint la par­tie la plus favo­rable du par­cours et avons sui­vi le bord d’attaque d’un immense len­ti­cu­laire sur des cen­taines de kilomètres.
En bref, cette épo­pée Argen­tine aura été une aven­ture inou­bliable et, même si je suis conscient que Jean-Marie aurait pro­ba­ble­ment été encore plus vite avec un pilote plus expé­ri­men­té que moi sur le siège avant, ce vol res­te­ra cer­tai­ne­ment un des points d’orgue de ma car­rière aéronautique.

La capi­tale du chocolat
Le but des expé­di­tions véli­voles n’est pas seule­ment d’aller faire la chasse aux records, mais éga­le­ment de décou­vrir les mer­veilles natu­relles de ce bout du monde, tout en pra­ti­quant un vol d’onde presque illi­mi­té dans des condi­tions météo­ro­lo­giques idéales, sans aucune tur­bu­lence, dans des condi­tions de sécu­ri­té com­pa­rables à celles de notre vieille Europe.
Une occa­sion unique de décou­vrir des pay­sages extra­or­di­naires, allant des chutes d’Iguazu à l’extraordinaire gla­cier Per­ito More­no, en pas­sant par les forêts pétri­fiées ou les caresses aux pin­gouins et aux baleines. Le vol à voile se pra­tique dans des condi­tions de confort, de convi­via­li­té et de séré­ni­té uniques dans cette région. San Car­los de Bari­loche (800 m) offre tous les ser­vices et les plai­sirs que l’on peut attendre de la plus grande sta­tion de mon­tagne de l’Amérique du Sud, ran­don­née sur les vol­cans, pêche spor­tive, para­pente, wind­surf et kite-surf, raf­ting et kayak, pis­cine, pati­noire, vélo­drome, deux golfs 18 trous, voile, navi­ga­tion tou­ris­tique, VTT, ran­don­nées à che­val, loca­tion d’avion.
Et, pour les plus gour­mands, c’est aus­si la capi­tale sud-amé­ri­caine du chocolat.
http://topfly.free.fr/:

Pas­cal FUA (81) est pro­fes­seur de vision par ordi­na­teur à l’École poly­tech­nique fédé­rale de Lau­sanne (EPFL).
Il y déve­loppe des tech­niques infor­ma­tiques visant à ému­ler la capa­ci­té du cer­veau humain à inter­pré­ter les images et à en extraire des infor­ma­tions utiles. À ses heures per­dues, il est pilote d’avion et de planeur.
http://cvlab.epfl.ch/~fua/perso/glide /06/bari/
http://cvlab.epfl.ch/

Poster un commentaire