La Stratégie du meilleur prix de revient

Dossier : Les consultantsMagazine N°528 Octobre 1997Par : François BUS

La notion de prix de mar­ché n’est plus la notion cor­recte à prendre en compte pour étu­dier la ren­ta­bi­li­té poten­tielle des pro­jets indus­triels. Pour cal­cu­ler cette ren­ta­bi­li­té, le prix de mar­ché, c’est-à-dire celui que les clients seraient prêts à payer, n’est plus la bonne réfé­rence. Ce qu’il convient de consi­dé­rer dans ce type de cal­cul, c’est le prix mini­mum auquel les concur­rents pour­raient vendre tout en ayant une ren­ta­bi­li­té convenable.

Par consé­quent, il est indis­pen­sable de connaître le prix auquel les concur­rents pour­raient fabri­quer, car il n’est pas ques­tion ici de dum­ping mais de prix jus­ti­fiés. En effet, même si les uti­li­sa­teurs, les ache­teurs poten­tiels, étaient prêts à payer un cer­tain prix, celui qui cor­res­pond à la valeur qu’ils attri­buent à la chose pro­po­sée, ils ne le feraient pas ou plus si un autre four­nis­seur annon­çait un prix net­te­ment infé­rieur, les consom­ma­teurs étant de plus en plus sen­sibles au prix. Par ailleurs, des exemples de baisses de prix spec­ta­cu­laires sur des pro­duits très per­for­mants font que les bas prix sont de moins en moins consi­dé­rés comme syno­nymes de moindre qualité.

Le coût asymptote instantané, base de référence

La réfé­rence sur laquelle il est désor­mais indis­pen­sable de « se posi­tion­ner » en matière de prix de vente pos­sible, c’est-à-dire en matière de prix de revient néces­saire pour pra­ti­quer le prix de vente visé, n’est plus le prix de mar­ché comme il est défi­ni classiquement.

La réfé­rence à uti­li­ser est ce que nous appe­lons « le coût asymp­tote ins­tan­ta­né », c’est-à-dire le prix mini­mum qu’il serait pos­sible d’at­teindre à un ins­tant don­né, au moins en théo­rie, en uti­li­sant tous les moyens dis­po­nibles du monde, per­met­tant d’a­voir, pour cha­cune des com­po­santes du prix de revient, le niveau le plus bas. Cela est valable aus­si bien pour les matières pre­mières, les com­po­sants ou sous-ensembles, que pour les amor­tis­se­ments, la main-d’oeuvre mais aus­si toutes les autres com­po­santes du coût de fabri­ca­tion au sens large du terme.

Le coût le plus bas est donc celui auquel pour­rait fabri­quer un indus­triel s’il déci­dait de mettre en oeuvre tous les moyens exis­tants de réduc­tion des coûts. Dès à pré­sent, pour les socié­tés per­for­mantes pra­ti­quant la concep­tion à coût asymp­tote ins­tan­ta­né qui doit être pris pré­ci­sé­ment comme objec­tif, sous peine d’être en situa­tion déli­cate vis-à-vis des concur­rents natio­naux ou inter­na­tio­naux qui seraient plus près de ce coût, soit par hasard, soit parce qu’ils uti­li­se­raient cette nou­velle théo­rie. Cela est d’au­tant plus impor­tant que les pro­tec­tions tari­faires vont dis­pa­raître, ou tout au moins être dimi­nuées dans le cadre de l’OMC.

Le concept du coût asymp­tote ins­tan­ta­né est appli­cable dans tous les sec­teurs indus­triels sans dis­tinc­tion. Par­mi les sec­teurs dans les­quels il s’ap­plique par­fai­te­ment, se trouvent les hautes tech­no­lo­gies parce que ce sont des sec­teurs dans les­quels les évo­lu­tions sont très rapides. Qui dit évo­lu­tions très rapides dit remise en cause per­ma­nente des condi­tions, y com­pris des condi­tions éco­no­miques, d’où un déca­lage impor­tant entre la nais­sance de pos­si­bi­li­tés nou­velles et leur exploi­ta­tion sys­té­ma­tique, sauf dans le cas de l’u­ti­li­sa­tion du concept du coût asymp­tote. Dans les sec­teurs de l’in­for­ma­tique et de l’élec­tro­nique, tout le monde a en mémoire les chutes bru­tales de prix de cer­tains maté­riels, pro­vo­quées par l’ar­ri­vée sur le mar­ché, sans expli­ca­tion appa­rente pour les ache­teurs, de nou­veaux pro­duits à des prix très infé­rieurs aux prix pra­ti­qués précédemment.

L’ap­pa­ri­tion de ces pro­duits net­te­ment moins chers était due à une décou­verte inopi­née ou plus sou­vent liée à une recherche inten­sive des pos­si­bi­li­tés de réduc­tion des coûts, rela­tives à l’exis­tence de poten­tia­li­tés non exploi­tées. L’a­na­lyse des prix de revient des entre­prises d’élec­tro­nique ou d’in­dus­tries connexes com­pa­rés aux prix de revient asymp­totes ins­tan­ta­nés donne les résul­tats suivants :

– dans près de 100 % des cas, le prix de revient asymp­tote ins­tan­ta­né ne repré­sente au maxi­mum que 50 % du prix de revient du pro­duit en question,
– dans 60 % des cas, il ne repré­sente que 20 % du prix de revient,
– dans 30 % des cas, il ne repré­sente que 10 % du prix de revient.

Autre­ment dit, le coût asymp­tote ins­tan­ta­né révèle que, en se limi­tant à uti­li­ser des pos­si­bi­li­tés exis­tantes, il est pos­sible de réduire les prix de revient de moi­tié, voire de 80 ou 90 %, c’est-à-dire de pro­duire deux fois, cinq fois, voire dix fois moins cher.

Un objectif précis

L’é­ta­blis­se­ment du coût asymp­tote ins­tan­ta­né per­met de faire connaître à l’en­tre­prise l’ob­jec­tif de prix de revient qu’elle doit viser. Ce n’est pas celui de ses concur­rents mais celui que ceux-ci pour­raient atteindre ; sans cela l’en­tre­prise pour­rait ren­con­trer de sérieux pro­blèmes. Comme disait Mon­sieur Kono­suke Mat­su­shi­ta, qui savait de quoi il par­lait : « une entre­prise qui ne sait pas où elle doit aller a peu de chance d’y arri­ver ». Nous dirons : « une entre­prise qui ne connaît pas le prix asymp­tote ins­tan­ta­né de ses pro­duits ne peut pas avoir la bonne stra­té­gie industrielle ».

L’objectif absolu

Le coût asymp­tote ins­tan­ta­né est aux tech­niques clas­siques de réduc­tions des coûts ce que la qua­li­té totale est aux méthodes tay­lo­riennes de contrôle de la qua­li­té. Comme la qua­li­té totale, le coût asymp­tote ins­tan­ta­né fixe l’ob­jec­tif le plus ambi­tieux qu’il soit pos­sible de réa­li­ser à un ins­tant don­né, en uti­li­sant toutes les pos­si­bi­li­tés dis­po­nibles : tech­no­lo­giques, métho­do­lo­giques (dont la qua­li­té totale), mais aus­si géo­po­li­tiques au sens éco­no­mique du terme. La méthode de coût asymp­tote ins­tan­ta­né est glo­bale et absolue.

L’é­ta­blis­se­ment du coût asymp­tote ins­tan­ta­né consiste en la recherche sys­té­ma­tique de la solu­tion exis­tante qui n’est pas for­cé­ment uti­li­sée par un concur­rent mais qui peut per­mettre, pour cha­cune des com­po­santes du prix de revient (déter­mi­née, par exemple, comme pré­cé­dem­ment) d’a­voir le coût le plus bas.

Le coût asymptote instantané proprement dit

Si pour cha­cune des com­po­santes du prix de revient est consi­dé­rée la valeur mini­mum trou­vée, le coût asymp­tote ins­tan­ta­né est la somme de ces valeurs les plus basses.

Pour­quoi le coût asymp­tote ? Parce que cette valeur est obte­nue s’il est pos­sible de béné­fi­cier, en un point du globe, de tous ces coûts mini­ma à la fois ; cela est peut-être un peu théo­rique, quoique… (voir plus loin). Il sera néan­moins pos­sible de s’en appro­cher et de consti­tuer une asymp­tote au sens mathé­ma­tique du terme.

Une asymp­tote : pro­prié­té telle que la dis­tance d’un point d’une courbe à cette droite tend vers zéro quant le point s’é­loigne à l’in­fi­ni sur la courbe.

Pour­quoi ins­tan­ta­né ? Parce que, dans les valeurs mini­ma recher­chées, pour cal­cu­ler ce coût asymp­tote, nous n’a­vons pris en compte que des pos­si­bi­li­tés exis­tantes, répar­ties peut-être à tra­vers le monde, mais dis­po­nibles ins­tan­ta­né­ment. S’il s’a­git de machines auto­ma­tiques, il ne s’a­git pas de machines qui pour­raient avoir telle ou telle per­for­mance si quel­qu’un essayait de les réa­li­ser, mais uni­que­ment de machines dis­po­nibles sur le mar­ché. S’il est ques­tion de matières pre­mières avec cer­taines carac­té­ris­tiques, il s’a­gi­ra de pro­duc­tions régu­lières, et non pas de maté­riaux néces­si­tant des actions de recherche et de mise au point. Cela est éga­le­ment vrai pour toutes les com­po­santes du prix de revient.

Nous avons donc un coût asymp­tote ins­tan­ta­né, c’est-à-dire un coût dont on peut s’ap­pro­cher très rapi­de­ment (autre­ment dit, s’en appro­cher à quelques pour cent près, rapi­de­ment et ce en quelques mois).

Les évolutions récentes à venir

Pour­quoi aurait-on subi­te­ment besoin de connaître le coût asymp­tote ins­tan­ta­né ? Sa connais­sance par le pas­sé aurait été très inté­res­sante, elle est aujourd’­hui vitale du fait des chan­ge­ments dans l’en­vi­ron­ne­ment des entreprises.

Les évo­lu­tions récentes et à venir du contexte éco­no­mique mon­dial font qu’il n’est plus pos­sible d’i­gno­rer à quel prix pour­rait fabri­quer un concur­rent, peut-être inexis­tant aujourd’­hui mais qui pour­rait très rapi­de­ment acqué­rir une sta­ture inter­na­tio­nale (voir les cas Amstrad, Com­paq, l’in­dus­trie auto­mo­bile coréenne, etc.). Les prin­ci­pales évo­lu­tions sont :

– l’ou­ver­ture à une éco­no­mie de mar­ché de nom­breux pays par­mi les plus grands : les pays de l’Est, la Chine prin­ci­pa­le­ment, qui amènent de nou­veaux concur­rents sur la scène internationale ;
– la déré­gu­la­tion dans les éco­no­mies occi­den­tales qui éli­mine une pro­tec­tion supplémentaire ;
– la sup­pres­sion des pro­tec­tions tari­faires, ou tout au moins leur diminution ;
– le déve­lop­pe­ment des zones franches ;
– la dimi­nu­tion du coût des trans­ports qui réduit gran­de­ment l’ef­fet dis­tance qui était une sorte de pro­tec­tion natu­relle à cause du sur­coût qu’il générait ;
– enfin la mon­dia­li­sa­tion des normes et des stan­dards, soit déci­dée, soit impo­sée de fait. Cela amène la dis­pa­ri­tion d’une pro­tec­tion tech­nique, volon­taire ou invo­lon­taire, qui était très effi­cace, au mini­mum pour retar­der l’ar­ri­vée de concurrents.

Ouverture de nouveaux pays à l’économie de marché

Sans épi­lo­guer lon­gue­ment, il est pos­sible de noter que l’ar­ri­vée de ces pays dans le sys­tème éco­no­mique mon­dial va ren­for­cer la concur­rence, soit :

– parce que l’im­mense mar­ché qu’ils repré­sentent, en par­ti­cu­lier en Chine, va per­mettre à vos concur­rents d’aug­men­ter leurs pro­duc­tions et donc de dimi­nuer leurs coûts, mais cela pour­rait éga­le­ment béné­fi­cier à votre entre­prise si vous savez tirer par­ti de ces nou­velles opportunités ;
– parce que ces pays peuvent et vont, au moins dans cer­tains domaines, deve­nir des expor­ta­teurs et que, dis­po­sant d’une main-d’oeuvre peu chère et dans de nom­breux cas de matières pre­mières, ils sont pro­ba­ble­ment au coût asymp­tote ins­tan­ta­né sur ces points-là.

Ouverture du marché vers le Moyen-OrientBeau­coup moins grand que la Chine, il faut néan­moins signa­ler le Viêt-nam qui, avec la levée de l’embargo amé­ri­cain, voit dis­pa­raître un han­di­cap impor­tant. Avec actuel­le­ment soixante-douze mil­lions d’ha­bi­tants, cent vingt-cinq mil­lions pré­vus en 2025, le Viêt-nam est à consi­dé­rer sérieu­se­ment. Un des pays les plus pauvres du monde va de nos jours atti­rer de nom­breux pro­jets indus­triels avec une main-d’oeuvre ayant un reve­nu annuel moyen de mille deux cents francs français.

Mada­gas­car cherche de même à se réin­sé­rer dans une éco­no­mie de mar­ché. Là aus­si la main-d’oeuvre est abon­dante et les salaires, qui sont par­mi les plus bas du monde, atti­re­ront de nom­breuses délocalisations.

Les pays de l’Est, qui eux ont une culture indus­trielle pas­sée impor­tante, sont ou seront donc des acteurs com­pé­tents sur la scène internationale.

Les accords du GATT et l’OMC

Le GATT (Accord géné­ral sur les tarifs doua­niers et le com­merce) et par-delà l’OMC a comme objec­tif de libé­ra­li­ser le com­merce inter­na­tio­nal. Les prin­ci­pales actions visent à :

– sup­pri­mer tota­le­ment les droits de douane sur une liste de pro­duits dont :

  • les équi­pe­ments pour la construction,
  • es équi­pe­ments médicaux,
  • les pro­duits chimiques,
  • les pro­duits pharmaceutiques,
  • les machines agricoles,
  • les biens,
  • l’ameublement,
  • les pro­duits sidérurgiques ;


– sup­pri­mer les pro­duits dont les droits de douane sont supé­rieurs à 15 %, réduire de 50 % les prix tari­faires (les droits de douane sont très éle­vés sur cer­tains produits) ;
– réduire de 30 % les droits de douane sur les autres produits ;
– ouvrir l’ac­cès aux mar­chés publics ;
– régle­men­ter les sub­ven­tions des pays à leurs industries ;
– enca­drer la pro­prié­té intel­lec­tuelle des bre­vets et des marques ;
– libé­ra­li­ser les accès aux mar­chés des ser­vices (banques, assu­rances, etc.).

L’en­trée en vigueur de ces mesures per­met à des concur­rents, de cer­taines socié­tés pro­té­gées de fait, d’al­ler sur leurs mar­chés. Mais a contra­rio, beau­coup d’en­tre­prises peuvent accé­der à de nou­veaux mar­chés et à des com­pé­tences qu’il leur était impos­sible d’u­ti­li­ser jus­qu’à aujourd’­hui, d’où l’in­té­rêt de connaître les nou­veaux coûts asymp­totes ins­tan­ta­nés que vont per­mettre ces mesures.

Diminution du coût des transports

Le coût des trans­ports com­prend le coût du trans­port lui-même, les coûts du condi­tion­ne­ment et de l’emballage néces­saire, les coûts liés aux délais de trans­port. Le niveau rela­ti­ve­ment éle­vé du coût total des trans­ports a long­temps consti­tué une pro­tec­tion natu­relle qui per­met­tait à de nom­breuses pro­duc­tions de res­ter com­pé­ti­tives, mal­gré la dif­fé­rence de coût au niveau de la pro­duc­tion dans les autres pays. À cette pro­tec­tion se rajou­taient encore les pro­tec­tions tari­faires (droits de douane) qui elles aus­si sont en voie de dis­pa­ri­tion. Depuis une ving­taine d’an­nées, le coût des trans­ports inter­na­tio­naux qui a consti­tué un frein à la cir­cu­la­tion des pro­duits baisse plus rapi­de­ment que les coûts de production.

Le transport maritime

Le phé­no­mène « conte­neur » a per­mis de mini­mi­ser les temps de char­ge­ment et de déchar­ge­ment des navires et par là même leurs coûts, mais il a éga­le­ment per­mis de mieux uti­li­ser les bateaux dans les ports. D’a­près les sta­tis­tiques publiées par la Com­pa­gnie Géné­rale Mari­time, le coût du fret mari­time a bais­sé de 23 % de 1985 à 1993, ce qui en francs constants repré­sente à peu près 40 % de réduc­tion. De nos jours, le coût du trans­port, lors­qu’il est effec­tué par voie mari­time, repré­sente en moyenne 6 % seule­ment de la valeur des mar­chan­dises (le cal­cul est basé sur l’en­semble des impor­ta­tions et expor­ta­tions fran­çaises effec­tuées par mer). Mais ce coût est fonc­tion du poids et du volume des pro­duits et du tra­jet effectué.

Le pour­cen­tage n’est que légè­re­ment supé­rieur à 1 % pour une voi­ture de caté­go­rie moyenne livrée par voie mari­time d’I­ta­lie en Europe du Nord ; il n’est que de 2 % pour un magné­to­scope japo­nais livré en Europe. Cette réduc­tion du coût des trans­ports mari­times, qui a pour consé­quence une réduc­tion de l’ef­fet dis­tance, n’est pas homo­gène. Ain­si, le coût du trans­port d’un conte­neur de 20 pieds, au départ ou à des­ti­na­tion de l’Eu­rope com­mu­nau­taire, est de mille deux cent cin­quante dol­lars amé­ri­cains pour Hong Kong, Séoul ou Sin­ga­pour mais de mille six cents pour Mont­réal, mille cent pour la Médi­ter­ra­née orien­tale et de deux mille quatre cents pour Saint-Denis de la Réunion.

Le transport aérien

Même s’il est plus cher que le fret mari­time, il per­met de dimi­nuer les coûts logis­tiques, de tra­vailler à flux ten­dus et de dimi­nuer les délais. Comme le coût du fret mari­time, le coût du fret aérien a bais­sé ces der­nières années, et ce d’en­vi­ron 30 % en francs constants sur les sept à huit der­nières années. À noter que le trans­port des pas­sa­gers a bais­sé encore plus (envi­ron 50 %). Ces varia­tions de prix dues à une guerre des tarifs pour­raient se ralen­tir, voire s’in­ver­ser légè­re­ment, mais leurs poids dans les coûts de revient res­te­raient sen­si­ble­ment les mêmes.

De la même manière, comme en ce qui concerne le fret mari­time, le coût du trans­port n’est pas tou­jours pro­por­tion­nel à la distance.

Ain­si, par kilo­gramme, il en coûte envi­ron sept francs pour expé­dier des mar­chan­dises des aéro­ports de Paris vers Sin­ga­pour, Bang­kok ou Hong Kong et à peu près le même prix pour Vienne ou Londres. Cela coûte beau­coup plus cher, dix francs, pour Copen­hague, Oslo ou Athènes. Il en coûte le même prix, vingt francs, pour Kara­chi et Syd­ney : ain­si le trans­port pour Kara­chi coûte presque trois fois celui de Sin­ga­pour alors que la des­ti­na­tion est à mi-chemin.

Le coût pour l’A­mé­rique du Nord est le même (sept francs) que pour l’A­sie du Sud-Est, donc moins cher que pour la majo­ri­té des pays européens.

Mondialisation des normes et des standards

Aux nor­ma­li­sa­tions natio­nales et aux stan­dards spé­ci­fiques, il faut ajou­ter les sys­tèmes de qua­li­fi­ca­tions et d’ho­mo­lo­ga­tions spé­ci­fiques aux grandes entre­prises ou orga­nismes. Ces pro­tec­tions, pour ceux qui en béné­fi­cient, en géné­ral les natio­naux, vont dis­pa­raître. C’est un sou­ci de plus qui jus­ti­fie de s’in­té­res­ser aux poten­tia­li­tés des concur­rents en termes éco­no­miques, concur­rents qui jusque-là étaient main­te­nus à dis­tance par ces dif­fé­rentes protections.

Une obligation : connaître le coût asymptote instantané

Il est de la res­pon­sa­bi­li­té de chaque chef d’en­tre­prise de déve­lop­per une stra­té­gie indus­trielle qui peut revê­tir dif­fé­rents aspects. À l’ex­trême, il serait pos­sible d’i­ma­gi­ner qu’il n’ait pas de stra­té­gie du tout, ce qui serait très ris­qué. Un chef d’en­tre­prise n’a pas le droit d’i­gno­rer le coût asymp­tote ins­tan­ta­né, c’est-à-dire le prix auquel ses concur­rents pour­raient ins­tan­ta­né­ment fabri­quer s’ils déci­daient d’u­ti­li­ser les pos­si­bi­li­tés dis­po­nibles dans le monde. Par là, il connaî­tra le degré de menace et, réci­pro­que­ment, son degré de liber­té, car il pour­ra uti­li­ser tout ou par­tie de ces possibilités.

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