Appareillage GE HEALTHCARE manipulé par une ingénieure

Ingénieure au XXIe siècle, une réalité contrastée

Dossier : PolytechniciennesMagazine N°712 Février 2016
Par Aline AUBERTIN

La popu­la­tion mas­cu­line reste majo­ri­taire dans les métiers d’ingénieurs, mais l’é­tat d’es­prit change. Les entre­prises cherchent désor­mais à rendre leurs équipes mixtes, les études de per­for­mances s’accordent pour mon­trer que la diver­si­té femme-homme est un fac­teur de per­for­mance et de ren­ta­bi­li­té et qu’elle favo­rise l’innovation.

Face à des chiffres qui montrent que la popu­la­tion mas­cu­line reste majo­ri­taire dans les métiers d’ingénieurs, il est impor­tant de res­ter mobi­li­sés pour chan­ger cette réalité.

REPÈRES

Il y a aujourd’hui plus d’un siècle que les écoles d’ingénieurs se sont ouvertes aux filles1, tandis que, depuis 1924, les programmes des études secondaires sont identiques pour les filles et les garçons. Dès lors, on pourrait croire qu’il n’est plus utile de se mobiliser pour favoriser la parité parmi les ingénieurs.
Pourtant, les chiffres nous ramènent brutalement à la réalité : seuls 28 % des élèves ingénieurs sont des filles, ce qui ne représente que 3 points de plus qu’il y a 10 ans ; 22 % des ingénieurs sont des ingénieures2.
Ces chiffres cachent de grandes disparités : si les étudiantes sont à parité dans les spécialités de la biologie, de la chimie et de l’agronomie, les ingénieures sont moins de 15 % dans certains secteurs tels que l’informatique, l’électronique, la fabrication d’équipements et de matériel de transport.

Des métiers pour les filles

Le diplôme d’ingénieur per­met d’accéder à des métiers variés, dans des sec­teurs d’activité eux-mêmes très divers, où les femmes réus­sissent. Les ingé­nieurs et ingé­nieures sont mas­si­ve­ment satis­faits de leur tra­vail, en par­ti­cu­lier de son conte­nu, de l’autonomie dont ils et elles dis­posent, de la recon­nais­sance de leur tra­vail par leurs pairs, des rela­tions inter­per­son­nelles au tra­vail, et enfin de la sécu­ri­té de l’emploi.

Le taux de deman­deuses d’emploi, hors recherche du pre­mier emploi, n’est que de 3,5 %2, trois fois moins que le taux de chô­mage des femmes dans l’ensemble de la popu­la­tion3.

DÉPASSER LES STÉRÉOTYPES

Depuis une petite dizaine d’années, l’association Femmes Ingénieurs a pu mesurer la prise de conscience des entreprises, qui cherchent désormais très activement à rendre leurs équipes mixtes et à recruter des ingénieures. Cela contraste avec les stéréotypes qui perdurent chez les lycéennes.
Face à cette situation, la responsabilité de chacun et chacune est engagée. Femmes Ingénieurs, qui réalise déjà une intervention par jour dans les établissements scolaires, a besoin de toujours plus de relais pour qu’aucune jeune fille dans notre pays ne manque la chance de comprendre notre réalité d’ingénieure et de s’y projeter.

Performance et innovation

Toutes les études de per­for­mances éco­no­miques et finan­cières s’accordent pour mon­trer que la diver­si­té femme-homme à tous les niveaux de l’entreprise, et en par­ti­cu­lier dans les ins­tances diri­geantes, est un fac­teur de per­for­mance et de ren­ta­bi­li­té4.

VALORISER LES INGÉNIEURES

Membre de la Fédération des Femmes Administrateurs, l’association Femmes Ingénieurs se mobilise pour valoriser les ingénieures auprès des entreprises, et les aider à mettre leur profil en valeur pour postuler.
Leur formation scientifique et leur expérience de la gestion de projet leur donnent des compétences utiles à l’entreprise et à l’efficacité du conseil d’administration, outre leur aptitude à prendre en compte les enjeux de la responsabilité sociale de l’entreprise et de l’actionnariat.

Dans une étude récente, le groupe Sodexo5 a mon­tré que les équipes mana­gé­riales situées dans une four­chette com­prise entre 40 % et 60 % d’hommes et de femmes obtiennent en moyenne de meilleurs résul­tats, plus durables et prévisibles.

La diver­si­té femme-homme au sein des équipes favo­rise éga­le­ment l’innovation. Cet effet a été étu­dié à diverses reprises par des groupes de tra­vail au sein du Cercle Inter­Elles, réseau de femmes d’entreprises tech­no­lo­giques6.

50 % de la popu­la­tion mon­diale est consti­tuée de femmes ; les besoins de ces clientes doivent être com­pris et pris en compte. Or, les équipes de recherche et déve­lop­pe­ment, sou­vent mas­cu­lines, peinent à ana­ly­ser les com­po­santes de la dimen­sion femme-homme de leur clien­tèle et à sur­mon­ter le biais des sté­réo­types dont elles sont porteuses.

L’ingénieur de demain, en charge des inno­va­tions de l’avenir, inven­teur de nou­velles tech­no­lo­gies et de nou­veaux métiers, pour­rait donc bien être une ingénieure.


Le diplôme d’ingénieur per­met d’accéder à des métiers variés.
© 2012, BILL GALLERY GE HEALTHCARE BUC

Féminiser les conseils d’administration

Des études ont com­pa­ré les indi­ca­teurs finan­ciers de socié­tés ayant des femmes dans leur conseil d’administration à celles qui n’en font pas sié­ger. Les pre­mières ont de meilleures per­for­mances, liées à une démarche glo­bale de bonne gou­ver­nance7.

Par ailleurs, la loi impose l’obligation de res­pec­ter un quo­ta de membres de chaque sexe au sein des conseils d’administration et des conseils de sur­veillance des entre­prises8.

Pour toutes ces rai­sons, choi­sis­sons le verre à moi­tié plein et réjouis­sons-nous des pers­pec­tives d’épanouissement et de déve­lop­pe­ment qui s’offrent aux ingé­nieures et aux admi­nis­tra­trices de demain, et de la com­plé­men­ta­ri­té de la col­la­bo­ra­tion entre femmes et hommes, dans le res­pect de cha­cune et cha­cun, pour le plus grand béné­fice de nos entre­prises, de notre éco­no­mie et in fine de notre société.

UN ENJEU D’AVENIR

Lors du dernier colloque du Cercle InterElles, Jean-Michel Malbrancq, président et CEO Europe de GE Healthcare, indiquait :
« Nous évoluons dans des environnements très complexes avec des signaux de plus en plus difficiles à capter. Je suis convaincu qu’une équipe diverse est plus apte à saisir des indicateurs de changements importants qu’une équipe issue d’un même moule […]. La mixité est un enjeu d’avenir. »

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1. Par­mi les pre­mières, l’Institut de chi­mie de Tou­louse en 1908, l’École supé­rieure d’électricité en 1919 et l’École poly­tech­nique fémi­nine créée en 1924. Les écoles d’ingénieurs mili­taires se fémi­nisent les der­nières, à la fin du XXe siècle : l’École de l’air en 1978, Saint-Cyr-Coët­qui­dan en 1983 et l’École navale en 1993.
2. Chiffres issus des enquêtes IESF 2014 et 2015, trai­te­ment des sta­tis­tiques sexuées par Femmes Ingénieurs.
3. 9,8 % pour l’ensemble des femmes fran­çaises (source : Insee 2014).
4. Lire, entre autres, les études annuelles Women Mat­ter de McKinsey.
5. Le groupe a ana­ly­sé des don­nées recueillies auprès de 50 000 mana­gers Sodexo de 80 pays, des cadres diri­geants aux res­pon­sables de site.
6. Voir les actes du col­loque 2013 : « Les béné­fices sont mul­tiples. De nos recherches, il res­sort que les équipes mixtes sont à la fois plus inven­tives et plus sûres. Leurs per­for­mances glo­bales sont donc meilleures », indique Lau­rence Tho­ma­zeau (Air Liquide).
7. + 42 % de chiffre d’affaires, + 66 % de ren­ta­bi­li­té des capi­taux inves­tis, + 53 % de ren­ta­bi­li­té finan­cière (Cata­lyst, 2007) // + 4 points de ren­ta­bi­li­té finan­cière, endet­te­ment plus faible, plus grande confiance du mar­ché (Cré­dit Suisse, 2012) // + 47% de ren­ta­bi­li­té finan­cière, + 55 % de résul­tat d’exploitation (McKin­sey, 2013). Source : IAE de Poi­tiers Labo­ra­toire CE RE GE.
8. Les socié­tés du CAC 40 affichent aujourd’hui en moyenne 20,6 % de femmes dans leur conseil d’administration, pour un ratio de 20 % fixé en 2014. La loi fixe pour objec­tif un quo­ta de 40 % à l’horizon 2017.

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