DVD : LA FANCIULLA DEL WEST de Giacomo Puccini

Giacomo PUCCINI : La Fanciulla del West

Dossier : Arts,Lettres et SciencesMagazine N°715 Mai 2016Par : l'Opéra de Vienne, Jonas Kaufmann, Nina Stemme, direction Franz Welser-MöstRédacteur : Marc DARMON (83)Editeur : Un DVD ou un Blu-Ray Sony 888 75064079

Puc­ci­ni nous amene au Far West pour cet opé­ra créé en 1910. Mais ici les cow­boys sont désor­mais des ouvriers, les Indiens sont en réserve, les shé­rifs ne montent plus à cheval.

Pucci­ni nous a trans­por­tés au cours de sa car­rière dans la Chine médié­vale, au Japon de l’ère Mei­ji, dans le Paris des Misé­rables (quatre fois), en adap­tant chaque fois sa musique aux styles des pays et des périodes visités.

Avant les explo­ra­tions har­mo­niques de Turan­dot (inache­vé, 1924), il se devait de nous ame­ner au Far West pour cet opé­ra créé en 1910 au Metro­po­li­tan Ope­ra de New York.

Cette pro­duc­tion de La Fille du Far West à Vienne en 2013, cent ans après sa pre­mière repré­sen­ta­tion dans cette ville, trans­pose l’action dans le Middle West des années 1950.

Les cow­boys sont désor­mais des ouvriers, les Indiens sont en réserve, les shé­rifs ne montent plus à che­val. Mais les décors et cos­tumes sont très réus­sis et adaptés.

À l’apogée de sa popu­la­ri­té, après des œuvres d’un vérisme très acces­sible et popu­laire (La Bohème, Tos­ca, etc.), Puc­ci­ni tente ici une musique plus expé­ri­men­tale, comme Richard Strauss et Jana­cek l’ont ten­tée à peu près au même moment.

Peu d’airs, mais plu­tôt un flux conti­nu d’une musique pas­sion­nante et carac­té­ris­tique qui raconte et décrit l’intrigue et les sentiments.

Dans un uni­vers exclu­si­ve­ment mas­cu­lin de cher­cheurs d’or, la jeune Min­nie est natu­rel­le­ment l’objet de toutes les convoi­tises et atten­tions, d’autant qu’elle est la seule à avoir un mini­mum d’instruction. Mais elle s’éprend du ban­dit Dick John­son, ce qui rend fou de jalou­sie notre shérif.

Bien enten­du, l’amour de la sopra­no et du ténor contra­rié par le bary­ton ne semble pas ori­gi­nal. Déjà vu éga­le­ment, Min­nie, comme Tos­ca, semble prête à aban­don­ner le plus pré­cieux pour sau­ver ce qui lui est le plus cher.

Et comme dans Le Vais­seau fan­tôme, la rédemp­tion par l’amour amé­nage une fin plus heu­reuse qu’on ne l’a cru tout au long de l’opéra.

Mais cette œuvre contient de grandes ori­gi­na­li­tés et sur­prises. La ten­sion de la par­tie de poker du second acte, l’ambiance de saloon du début de l’opéra, la scène de la pen­dai­son sont d’un effet dra­ma­tique sai­sis­sant. Le célèbre air de ténor de Dick sur le point d’être pen­du est un des plus beaux airs de Puccini.

Et je vous pro­mets que voir ce ban­dit mexi­cain dégui­sé en mineur amé­ri­cain chan­tant en ita­lien à Vienne, avec le léger accent alle­mand de Kauf­mann, vaut tous les dépay­se­ments que peut offrir l’opéra.

Jonas Kauf­mann dans son magni­fique cos­tume de cuir est la star de cette pro­duc­tion. Deman­dé dans le monde entier, et donc rare par­tout (l’Opéra de Paris est pro­ba­ble­ment la seule mai­son d’opéra à pou­voir se van­ter de le pro­gram­mer dans deux pro­duc­tions pour la pro­chaine sai­son), il mérite sa réputation.

Un chant riche, émou­vant par sa voix même comme par les sen­ti­ments qu’il exprime. Et avec un phy­sique idéal. Mais il est aus­si très bien accompagné.

Nina Stemme, sopra­no sué­doise excep­tion­nelle, une Bru­ne­hilde, une Ariane, est remar­quable de musi­ca­li­té, d’engagement et de dra­ma­tisme. Le shé­rif de Tomasz Koniecz­ny, reître et vul­gaire à sou­hait, est idéal de noir­ceur et de méchan­ce­té jalouse. Et l’orchestre vien­nois brille sous la baguette douée de Franz Welser-Möst.

Simul­ta­né­ment Sony édite un réci­tal Puc­ci­ni à la Sca­la de Jonas Kauf­mann. Les œuvres sont enre­gis­trées de façon chro­no­lo­gique, et per­mettent de retrou­ver en image de vraies rare­tés (extraits de Le Vil­li, le pre­mier opé­ra de Puc­ci­ni ; le Pre­lu­dio sin­fo­ni­co, où Puc­ci­ni pui­se­ra des thèmes pour Le Vil­li et Edgar, opé­ras de jeu­nesse mais pos­té­rieurs à Par­si­fal et Otel­lo).

Les airs plus célèbres sont chan­tés par Kauf­mann de façon super­la­tive, un très bon com­plé­ment à La Fille du Far West.

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