Éditorial : Le bleu, le blanc et le rouge. La France et ses vins.

Dossier : La France et ses vinsMagazine N°612 Février 2006
Par Claude GONDARD (65)

Lorsque Claude Gon­dard (65), pré­sident du groupe X‑Vinicole, nous a pro­po­sé de consa­crer un numé­ro spé­cial de La Jaune et la Rouge au thème du vin, nous avons été recon­nais­sants à Lau­rens Del­pech qui anime depuis bien des années notre rubrique oeno­lo­gie, de s’in­té­res­ser à notre pro­jet. Il pré­pa­rait de son côté un numé­ro de l’E­na hors les murs, le maga­zine des anciens élèves de l’E­na, sur un thème voi­sin : le vin et la gas­tro­no­mie. C’est avec l’ac­cord de l’AAEE­NA, Asso­cia­tion des anciens élèves de l’E­na, et celui des auteurs que nous emprun­tons à cette revue trois articles remar­quables et une inter­view de per­son­na­li­tés émi­nentes du monde du vin. Grâce leur soit rendue.

L’ar­ticle de Thier­ry Bru­lé explique avec luci­di­té la situa­tion dans laquelle se trouve actuel­le­ment le vin fran­çais, face à la concur­rence inter­na­tio­nale. Alexandre Laza­reff, dans le pro­lon­ge­ment de cet article, montre com­ment le sys­tème des appel­la­tions contrô­lées qui a sous-ten­du le suc­cès des vins fran­çais se retourne aujourd’­hui contre eux. Pre­nant un recul étu­dié, Jean-Robert Pitte, géo­graphe de renom, met en évi­dence les points forts de la viti­cul­ture fran­çaise, insis­tant pour qu’ils soient conso­li­dés, de manière à ser­vir de points d’ap­pui à un redé­ploie­ment de notre offre.

De son côté, Claude Gon­dard nous fait part de ses réflexions d’ex­ploi­tant sur l’é­tat de la science dans le domaine viti­vi­ni­cole, et quelques membres du Groupe X‑Vinicole nous livrent leurs propres points de vue.

Nous avons enfin deman­dé à Claude Gon­dard, par ailleurs artiste médailleur tra­vaillant pour la Mon­naie de Paris et auteur d’une remar­quable série de médailles sur les grands vins fran­çais, d’illus­trer le pré­sent numéro.

La Jaune et la Rouge

Le bleu, le blanc et le rouge
La France et ses vins


Ven­danges au Domaine de la Cha­pelle Pouilly-Fuis­sé, chez Claude GONDARD

La Jaune et la Rouge avait publié en décembre 1985 un numé­ro spé­cial sur le vin inti­tu­lé « Le blanc et le rouge ». C’é­tait l’é­poque où le vin fran­çais tirait les divi­dendes d’une poli­tique d’a­mé­lio­ra­tion de la qua­li­té : la consom­ma­tion dimi­nuait alors en quan­ti­té, mais aug­men­tait en valeur. Les vins d’Ap­pel­la­tion d’o­ri­gine contrô­lée (AOC), à la fran­çaise, appa­rais­saient défi­ni­ti­ve­ment, de droit divin, comme les meilleurs nec­tars de la pla­nète. Cet excellent numé­ro, à la fois ency­clo­pé­dique et his­to­rique, poé­tique et humo­ris­tique, est à l’i­mage de cette eupho­rie. Ce numé­ro de La Jaune et la Rouge peut être, en outre, consi­dé­ré comme l’acte fon­da­teur du Groupe X‑Vinicole : qu’il me soit per­mis de rendre ici hom­mage à ses fon­da­teurs et pré­si­dents, Fer­nand CHANRION (35), aujourd’­hui dis­pa­ru, Georges RÈME (39) et mon pré­dé­ces­seur Jacques-Pas­cal CORDEROY du TIERS (47) pour la com­pé­tence, l’ef­fi­ca­ci­té et la gen­tillesse avec les­quelles ils ont su ani­mer notre groupe.

Lau­rens Delpech
Depuis de nom­breuses années, Lau­rens Del­pech nous fait pro­fi­ter de son éru­di­tion dans le domaine du vin, nous pro­po­sant chaque mois des articles qui, sous la rubrique oeno­lo­gie, nous per­mettent d’ap­pro­fon­dir nos connais­sances des tré­sors que pro­duit notre pays et de décou­vrir les autres pays pro­duc­teurs de vins de notre planète.
Lau­rens Del­pech est un ancien élève de l’E­na (pro­mo­tion André Mal­raux 1977) qui a fait une car­rière brillante et variée dans divers cabi­nets minis­té­riels et orga­nismes d’État.
Long­temps res­pon­sable de l’Ena hors les murs, la revue des anciens de l’E­na, Lau­rens Del­pech consacre depuis tou­jours ses loi­sirs à sillon­ner les régions viti­coles, à décou­vrir les pro­prié­tés inté­res­santes, à faire connais­sance des meilleurs pro­duc­teurs en cher­chant à com­prendre leurs secrets. Écri­vain de talent, il sait, avec sa gen­tillesse et son humour, nous mettre l’eau à la bouche en nous fai­sant par­ta­ger ses décou­vertes. Il est, par ailleurs, l’au­teur de plu­sieurs ouvrages sur les grandes régions viti­coles de notre pays et sur Le vin et la truffe.
Ayant quit­té l’Ad­mi­nis­tra­tion, il anime main­te­nant, avec son com­plice de tou­jours, Phi­lippe Cap­douze, le Groupe Fico­fi-Lafayette Inves­tis­se­ment, un ensemble inté­res­sant de socié­tés dont l’ac­ti­vi­té, cen­trée sur les vins et spi­ri­tueux, est non seule­ment com­mer­ciale, mais aus­si cultu­relle, en orga­ni­sant des dégus­ta­tions de crus pres­ti­gieux et en ani­mant un pôle éditorial. 

Le contexte a bien chan­gé en l’es­pace d’une ving­taine d’an­nées. Atta­qués par des concur­rents qui ne se contentent plus des seuls vins de consom­ma­tion cou­rante ou de moyenne gamme, les vins fran­çais voient éga­le­ment leurs posi­tions contes­tées dans les hauts de gamme. En outre, la filière viti­vi­ni­cole fran­çaise doit faire face à de mul­tiples contraintes en France même. Les médias se sont lar­ge­ment fait l’é­cho des limi­ta­tions d’ac­cès à la publi­ci­té pour les bois­sons alcoo­li­sées (loi Évin), ou des res­tric­tions impo­sées aux conduc­teurs de véhi­cules. Mais comme les autres filières agri­coles, la viti­cul­ture est sou­mise à des contraintes envi­ron­ne­men­tales de plus en plus pres­santes, sans par­ler de celles rela­tives à l’emploi de main-d’oeuvre ou aux règles médié­vales du droit rural à la française.

Cepen­dant, cette ana­lyse pes­si­miste doit être tem­pé­rée : force est de consta­ter que la crise ne frappe pas tous les pro­duc­teurs. La Cham­pagne fait notoi­re­ment excep­tion : la san­té éco­no­mique de cette région est mani­feste. Par ailleurs, dans toutes les régions, les exploi­ta­tions, coopé­ra­tives ou mai­sons de négoce, qui ont su fidé­li­ser leurs clien­tèles par une poli­tique de qua­li­té intran­si­geante ne connaissent pas non plus de crise.

Qua­li­té : le mot est lâché ! Com­bien de men­songes et d’hy­po­cri­sies se cachent der­rière ce terme ! Com­ment défi­nir la qua­li­té, l’ob­te­nir, la contrô­ler ? Une vaste réflexion mobi­lise aujourd’­hui tous les acteurs de la filière dans notre pays : com­ment adap­ter à la demande mon­diale les AOC qui ont fait la force du vin fran­çais, sans les affai­blir ? Com­ment rendre lisible l’offre fran­çaise à un client qui n’en connaît géné­ra­le­ment pas les arcanes ?

Le pré­sent numé­ro veut mon­trer qu’au-delà des pro­blèmes ren­con­trés aujourd’­hui par la filière viti­vi­ni­cole, nous assis­tons à une mobi­li­sa­tion exem­plaire de tous ses par­te­naires pour pro­cé­der à un inven­taire objec­tif des causes du suc­cès du vin fran­çais dans le pas­sé et défi­nir les règles du suc­cès de demain. C’est un mes­sage d’es­poir, c’est la main ten­due de tout un sec­teur éco­no­mique qui a besoin d’être com­pris par tous, par vous.

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