Bandol et ses vins

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°551 Janvier 2000Rédacteur : Laurens DELPECH

Bandol est un char­mant petit port bai­gné de soleil situé au pied de col­lines boi­sées qui le pro­tègent des vents du nord. Le vignoble est répar­ti alen­tour sur plu­sieurs com­munes, entre les oli­viers, les fleurs et les bas­tides : c’est le royaume du cépage Mour­vèdre qui s’épanouit ici mieux que par­tout ailleurs en France. La forte pro­por­tion de ce cépage qui entre dans l’assemblage des ban­dol rouges explique une grande part de leur séduc­tion car elle leur donne ce bou­quet savou­reux et inimi­table de fruits noirs, de cuir et de truffes.

Les meilleurs ban­dol sont des vins de gas­tro­no­mie, dignes de la plus grande cui­sine fran­çaise, qu’elle soit tra­di­tion­nelle ou “ nou­velle cui­sine ”. Il ne faut pas les boire trop jeunes, ils sont alors fer­més et leur force tan­nique peut sur­prendre. Avec l’âge, les tan­nins se fondent et on a affaire à un vin gras, concen­tré, épi­cé, avec une belle lon­gueur en bouche. L’expression la plus ache­vée du ban­dol est le ban­dol rouge, mais le ban­dol rosé apporte une fraî­cheur et une viva­ci­té appré­ciables et il a géné­ra­le­ment plus de corps que les autres rosés de Pro­vence. Il y a aus­si quelques bons vins blancs secs, par­faits avec les pois­sons et les fruits de mer.

Voi­ci quatre domaines qui comptent par­mi les meilleurs de l’appellation :

Château de Pibarnon

Le comte de Saint Vic­tor est deve­nu un pas­sion­né de vin dès l’âge de 27 ans en déjeu­nant à Paris, à La Clo­se­rie des Lilas (Un foie gras poê­lé avec un Vieux Châ­teau Cer­tan, un des meilleurs pome­rol que j’ai bu). Mais il a fal­lu que ce grand voya­geur devant l’Éternel atteigne l’âge de 52 ans pour se rendre compte qu’on fai­sait aus­si de très grands vins rouges en Pro­vence… En 1973, donc, Hen­ri de Saint Vic­tor déjeu­nait sur le port de Ban­dol quand il com­men­ça à boire le vin qui était dans son verre… Deve­nu un afi­cio­na­do des vins de Ban­dol, il ache­tait quatre ans plus tard, à Modeste Ramo­li­no, pro­duc­teur de vin et de bulbes flo­raux, le Châ­teau de Pibar­non, qu’il allait com­plè­te­ment trans­for­mer en dou­blant sa super­fi­cie et en le his­sant au “ top ” de l’appellation…

On dit par­fois que les ban­dol sont les pauillac de la Pro­vence, en ce cas, le Châ­teau de Pibar­non est le Latour des ban­dol. Il pos­sède les trois carac­té­ris­tiques incon­tour­nables d’un très grand vin : lon­gueur en bouche, com­plexi­té et apti­tude au vieillis­se­ment. Les vins de Pibar­non sont sombres et puis­sants, suaves, avec beau­coup de race. Le rosé, à la robe pâle, est souple et frui­té, il accom­pagne très bien une bouillabaisse.

Château Pradeaux

Le domaine est situé sur un beau ter­roir à domi­nante cal­caire en bor­dure de la mer. Superbe rouge, bâti pour durer vingt ans. Dans les bonnes années, il faut savoir l’attendre car il est dur et aus­tère dans sa jeu­nesse. Mais quelle récom­pense pour ceux qui ont su mon­trer de la patience ! Ils pour­ront dégus­ter un vin pro­fond et élé­gant au nez d’épices, de tabac et de fruits noirs, avec de superbes arômes d’évolution (cham­pi­gnon, truffes…).

Domaine de Terrebrune

Un des plus récents domaines de Ban­dol, puisqu’il ne pro­duit du vin que depuis 1975. Il fait un rouge riche et com­plexe, très fin, qui compte par­mi les meilleurs. Excellent ban­dol blanc.

Domaine de l’Hermitage

La proxi­mi­té de la mer apporte la fraî­cheur, et le mis­tral contri­bue à un par­fait état sani­taire des rai­sins. Nous sommes ici dans un domaine qui se carac­té­rise par la régu­la­ri­té de sa pro­duc­tion, année après année et par des prix très sages. Le rouge est puis­sant, mais déve­loppe vite une grande richesse aro­ma­tique. Le ban­dol rosé, à la robe élé­gante (pâle sau­mon), aux arômes de fleurs et de fruits est le vin idéal de l’été.

Si vous avez la chance de pas­ser par Ban­dol, il faut aller voir le Châ­teau de Pibar­non. Vous y arri­ve­rez par une petite route qui ser­pente dans les vignes, avec de superbes échap­pées sur le Bec de l’Aigle ou Les Embiez. Pibar­non est sur la col­line du Télé­graphe, où se trou­vait l’ancien télé­graphe optique reliant Tou­lon à Paris. Vous êtes là au som­met de l’appellation dans tous les sens du terme, car Pibar­non domine tout le vignoble et même Le Castellet.

Ce vil­lage for­ti­fié aux rem­parts bien conser­vés abrite une église du XIIe siècle, ses rues sont encore habi­tées par le sou­ve­nir de Mar­cel Pagnol qui y tour­na La Femme du bou­lan­ger. Vous pour­rez y déjeu­ner ou y dîner dans un bon res­tau­rant, le Cas­tel Lumière, dans un cadre superbe, avec une très belle vue sur le vignoble de Ban­dol et la baie de La Ciotat.

De là, un petit tra­jet en voi­ture et une brève marche diges­tive vous mène­ront à la cha­pelle Notre-Dame du Vieux Beaus­set, de style roman pro­ven­çal, qui abrite notam­ment un groupe de san­tons vieux de quatre siècles, figu­rant la fuite en Égypte.

Avant de par­tir, faites un cro­chet par le Domaine de Sou­viou, à l’intérieur des terres, pour y ache­ter de l’huile d’olive. Ce beau domaine pro­duit aus­si des vins de Ban­dol d’un bon niveau.

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  • Châ­teau de Pibar­non, 83740 La Cadière d’Azur.
  • Châ­teau Pra­deaux, quar­tier Les Pra­deaux, 83270 Saint-Cyr-sur-Mer.
  • Domaine de Ter­re­brune, Che­min de la Tou­relle, 83190 Ollioules.
  • Domaine de l’Hermitage, Le Rouve, BP 41, 83150 Le Beausset.

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